Les propriétaires forestiers labellisés PEFC doivent respecter les différents points repris dans la charte qu’ils ont signée.
Cette charte reprend un ensemble de 14 points concernant les différents aspects de la gestion d’une forêt, dont notamment l’équilibre Forêt-Gibier.
Extrait de la charte :
-------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
« 12. EQUILIBRE FORET - GRAND GIBIER
Assurer une gestion équilibrée entre la forêt et le grand gibier par tous les moyens mis à ma disposition et qui me permette de respecter mes engagements de la charte PEFC
Je m’engage à objectiver la pression du gibier par les moyens les plus appropriés (tels que la mise en place d’enclos-exclos, l’estimation des dégâts d’écorcement ou à la régénération) pour mesurer l’adéquation des populations en fonction de l’écosystème.
A défaut d’un équilibre, je m’engage:
- à définir et à communiquer à la SRFB (privé) ou au DNF (public), les causes du déséquilibre et les mesures prises au niveau du bail de chasse en vue de rétablir cet équilibre
- pour autant que j’en aie la maîtrise, à (faire) réguler les populations de grand gibier notamment,
Lorsque l’équilibre est atteint :
- à améliorer la capacité d’accueil de la faune sauvage par des mesures d’aménagement et de gestion sylvicole, dans un souci d’équilibre de l’écosystème. »
---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
La présence de gibier est considérée comme étant à l’équilibre avec la forêt lorsque la régénération des espèces principales se fait sans besoin de protection. En l’absence d’équilibre, les dégâts peuvent être importants avec une dépréciation des arbres pour lesquels le propriétaire a investi, une absence de régénération et un impact négatif sur la biodiversité en forêt.
Une forêt sera considérée en déséquilibre lorsque :
- Les dégâts d’écorcement, d’abroutissement ou de frotture sont tels que :
- Seules une ou deux essences de production peuvent se régénérer ;
- La régénération naturelle des essences de production n’est plus envisageable sans protection ;
- La biodiversité végétale est significativement limitée;
- La végétation forestière est impactée de manière générale ;
- …
Le déséquilibre observé ne sera pas nécessairement homogène sur l’ensemble de la forêt. Il est important de pouvoir localiser ces dégâts et estimer la proportion de forêt en équilibre et en déséquilibre à l’échelle de la propriété.
Le propriétaire peut procéder à l’évaluation du niveau d’équilibre de sa forêt soit en se basant sur sa connaissance de l’état de sa propriété, soit en s’adressant à son chef de cantonnement pour qu’il lui donne l’information.
Dans ce cas, la forêt n’est pas considérée comme étant en déséquilibre, mais lors d’un audit PEFC, le propriétaire doit pouvoir démontrer que :
- Il a amélioré ou cherche à améliorer la capacité d’accueil de sa propriété ;
- Il a mis en place des moyens d’objectiver la pression du gibier via, par exemple, l’installation d’enclos-exclos, l’estimation des dégâts d’écorcement ou portant atteinte à la régénération, …
- Il a inscrit ou va inscrire dans le prochain bail de chasse des mesures qu’il pourra activer si jamais sa propriété devait basculer dans une situation de déséquilibre.
L’absence d’une de ces mesures pourrait entraîner lors d’un audit un point d’attention avec un délai pour rectifier la situation. Il est préférable d’anticiper en les mettant en œuvre dès que possible ou en préparant l’information déjà disponible pour pouvoir la fournir d’emblée à l’auditeur.
Il se peut également que les quelques pourcentages de déséquilibre soient concentrés en un seul endroit problématique sur le territoire. Il serait utile et il sera peut-être demandé en cas d’audit d’y remédier pour éviter que cela ne se propage au reste de la propriété.
Si le déséquilibre est présent dans plus de 10% de la forêt, le point 12 de la charte précise que:
- Le propriétaire doit en avertir le DNF en précisant les causes du déséquilibre et en indiquant les mesures prises dans le bail de chasse en vue de rétablir l’équilibre ;
- Il doit réguler ou faire réguler les populations de grand gibier pour autant qu’il en ait la maîtrise, via :
Il ne faut pas attendre le passage d’un auditeur pour enclencher ces mesures, car non seulement cette surdensité porte préjudice au développement et à l’état de santé des arbres, mais cela pourrait aussi porter à conséquence lors d’un audit. Cela pourrait être interprété comme un manque de prévoyance puisque ces mesures sont reprises dans la charte et donc connues de son signataire.
Lors d’un audit, l’auditeur passera en revue un ensemble d’éléments pouvant conduire à un point d’attention ou à une non-conformité :
- Le propriétaire a apprécié le niveau de déséquilibre au sein de sa forêt et a envoyé ce constat avec les mesures correctrices au DNF. Le niveau communiqué a été comparé au taux de déséquilibre évalué par le DNF. Lors d’un audit, il doit pouvoir exprimer le fait que sa propriété est en déséquilibre sur x% et expliquer comment il a effectué cette estimation ;
- La charte prévoit un certain nombre d’actions, reprises ci-dessus, à mettre en œuvre en cas de déséquilibre. Le propriétaire doit pouvoir démontrer son intention de rétablir l’équilibre en expliquant les différentes mesures envisagées ou déjà mises en œuvre ;
- Dans le cadre d’un déséquilibre Forêt-Gibier, il est important de communiquer par écrit (les documents écrits prouvant les démarches) avec les différentes parties prenantes, comme les chasseurs et le ou les conseils cynégétiques, auxquelles le propriétaire doit faire part de la nécessité de réguler davantage le gibier afin de rétablir l’équilibre au sein de sa propriété ;
- Le point 12 de la Charte prévoit également l’obligation d’objectiver la pression du gibier par les moyens les plus appropriés, comme la mise en place d’enclos-exclos, l’estimation des dégâts d’écorcement ou portant atteinte à la régénération. Cela permet d’une part de pouvoir expliquer l’estimation du déséquilibre qui a été faite et d’autre part de pouvoir apprécier les effets des mesures mises en œuvre ;
- Le bail de chasse doit reprendre un ensemble de mesures devant lui permettre de ramener sa forêt à l’équilibre avec le grand gibier en gardant le contrôle de la situation au sein de sa propriété (voir ci-après pour les détails) ;
- Il doit appliquer les mesures inscrites dans son bail de chasse afin de retrouver un équilibre en forêt ;
- Enfin, la charte prévoit l’interdiction du nourrissage si, après deux ans d’actions pour retrouver l’équilibre, les résultats ne sont toujours pas probants. Ce point doit être repris dans le bail de chasse et être appliqué sous peine de non-conformité.
L’ensemble de ces points ne sont pas nouveaux, mais ils reflètent l’application réelle des engagements pris en signant la charte PEFC. En cas de déséquilibre, le propriétaire doit pouvoir démontrer qu’il a mis en œuvre les différents outils qui sont à sa disposition afin de ramener sa forêt à l’équilibre.
Le bail de chasse est un outil essentiel pour essayer de garder le contrôle de la situation au sein d’une propriété. Si certaines mesures y sont déjà inscrites et que la forêt est en déséquilibre, il faut les appliquer. Par contre, en leur absence, il faut profiter du renouvellement du bail pour compléter le cahier des charges afin de se doter des outils utiles en ce domaine.
En cas de dégâts importants d’écorcement mettant la durabilité de la forêt en danger, il faut agir plus largement que sur les seuls cervidés. En effet, des sangliers en surnombre vont manger la régénération et la végétation basse, ce qui va entraîner chez les cervidés, la recherche d’une nourriture alternative. Les dégâts d’écorcement iront croissant à défaut d’une autre nourriture. C’est pourquoi il faut pouvoir agir sur les différentes espèces en surnombre.
Parmi les mesures potentielles à inscrire dans le bail de chasse, nous pouvons citer :
- La limitation raisonnée et la suspension du nourrissage après deux saisons de chasse sans succès sur le niveau de déséquilibre ;
- La contractualisation des plans de tir ;
- La possibilité d’actionner la demande de destruction de gibier ;
- La fixation d’un prélèvement-cible avec sanction en cas de non-atteinte en tenant compte si nécessaire de la présence simultanée de plusieurs espèces de grand gibier ;
- La fixation d’objectifs en termes de populations de grand gibier ;
- Le dédommagement en cas de dégâts occasionnés à la forêt si l’action de chasse est inefficace ;
- La protection contre les dommages causés par le gibier ;
- L’amélioration de la capacité d’accueil ;
- …
Le propriétaire doit quand même agir afin de rétablir l’équilibre sur sa propriété. Il peut proposer au titulaire du droit de chasse voisin de signer une convention en vue de définir les conditions de respect de la certification.
Il est certain que l’équilibre entre la forêt et le gibier est un élément important pour le respect des engagements pris par le propriétaire en signant la charte PEFC, mais c’est avant tout essentiel pour le devenir de la forêt.
Lorsqu’elle est à l’équilibre, la faune présente occasionne des dégâts, mais dans des proportions telles qu’il n’y a pas d’impact significatif sur l’état de la forêt. Mais lorsque le déséquilibre s’installe, c’est tout l’écosystème forestier qui en pâtit tant dans ses composantes Biodiversité qu’au niveau économique pour les propriétaires forestiers qui voient leurs investissements partir à rien sous la dent des animaux. Un arbre abîmé voit sa valeur d’avenir nettement diminuer.
Il faut agir maintenant pour que les ventes de bois puissent continuer d’approvisionner de manière durable les budgets communaux tout en permettant à la faune et la flore de nos forêts de cohabiter avec la grande faune sauvage.
Renseignements: Christel Termol