Avant-projet d’arrêté AMUREBA - 1ère lecture: l’avis de l’UVCW
L’Union des Villes et Communes de Wallonie vient de remettre un avis à Philippe Henry, Ministre du Climat, de l’Energie et de la Mobilité, concernant l’avant-projet d’arrêté AMUREBA, 1ère lecture, dont voici la teneur:
CADRE
L’avant-projet d’arrêté vise à fusionner le volet subvention à l’audit ou l’étude dans le secteur non résidentiel des dispositifs AMURE et UREBA pour en faire un seul dénommé AMUREBA avec comme objectifs, la simplification des démarches, le renforcement du dispositif d’aide et la modernisation par le biais de la dématérialisation des procédures.
COMMENTAIRES GENERAUX DE L’AVANT-PROJET D’ARRETE
De manière générale, l’UVCW constate que la fusion proposée se base principalement sur les principes du dispositif AMURE qui serait désormais étendu aux personnes morales de droit public et aux organismes non commerciaux. Bien que l’UVCW comprenne la volonté d’harmoniser l’ensemble des procédures liées à l’audit et à l’étude dans le secteur non résidentiel, elle se demande dans quelles mesures les règles applicables aux marchés publics, à la TVA ainsi que les règles organiques spécifiques aux pouvoirs locaux, ont été prises en compte lors de la rédaction de l’AGW. L’UVCW demande que ses inquiétudes concernant l’adéquation du texte par rapport aux contraintes spécifiques des pouvoirs locaux soient prises en compte, et en l’état, qu’un travail complet sur cet arrêté soit réalisé pour ôter tous les obstacles relevés.
Par ailleurs, d’un point de vue plus macro, l’UVCW regrette que le financement de la rénovation énergétique des bâtiments publics, appartenant aux pouvoirs locaux, et de toutes les procédures connexes (cf. audit, étude de faisabilité, comptabilité énergétique, …), ne soit pas regroupé au sein d’un seul grand fonds dédié, qui serait accessible sous forme de droit de tirage. Gageons qu’une réflexion profonde sur cette demande récurrente des pouvoirs locaux soit menée à l’avenir.
L’UVCW salue cependant les principes envisagés en termes de limitation du montant engagé par les bénéficiaires de l’audit ou de l’étude au paiement de l’avance, de garantie de contrôle par le SPW du travail effectué par le prestataire de service afin que le bénéficiaire ne soit jamais pénalisé par une mauvaise prestation d’un auditeur, d’élargissement des prestations éligibles à l’audit de potentiel énergétique et de suivi performanciel, …
COMMENTAIRES PARTICULIERS
C.1. Chapitre 1. Disposition introductive, définitions et protection des données à caractère personnel
La définition de l’entité figurant à l’art. 2.10° devrait être complétée par les termes « ou partie de bâtiment » après les termes « les bâtiments » afin d’autoriser les audits et études des bâtiments qui comporteraient des parties résidentielles ou non occupées par le bénéficiaire. De plus, cette définition est complétée comme suit à la fin de ce même article pour les personnes morales de droit public ou les organismes non commerciaux : « l’entité est constituée d’un bâtiment reprenant l’ensemble des équipements et des activités du bénéficiaire », or un bâtiment ne peut reprendre l’ensemble des activités du bénéficiaire, il conviendrait d’adapter cette phrase en supprimant le terme « l’ensemble ».
La définition de l’audit figurant à l’art. 2. 25° diffère fortement de celle utilisée jusqu'ici pour les personnes morales de droit public et qui figure à l’art. 2. 4° de AGW UREBA réformé du 13 octobre 2022. L’UVCW s’interroge sur la portée des termes « systématique » et « récurrente » dans cette nouvelle définition.
C.2. Chapitre 2. La reconnaissance des prestataires de services
L’UVCW s’interroge sur la plus-value d’imposer un prestataire de service. Ne s’agit-il pas d’un intermédiaire supplémentaire qui pourrait alourdir la procédure et engendrer des frais supplémentaires ?
C.3. Chapitre 3. La labellisation des auditeurs
L’art. 24 limite la durée de labellisation d’un auditeur à 3 ans, alors qu’elle est de 5 ans dans le régime UREBA actuel. Cette disposition ne va-t-elle pas engendrer une surcharge administrative, à la fois pour l’Administration mais aussi pour les auditeurs, liée à une augmentation de la fréquence des procédures de renouvellement d’agrément ? L’UVCW s’interroge également sur la pertinence de l’obligation d’identification du candidat auditeur en tant que contact auditeur d’un prestataire de service de la plateforme digitale préalablement à l’introduction de sa demande de labellisation.
L’art. 47 prévoit le contrôle, par l’administration, de la qualité des audits ou des études réalisés par les auditeurs. Cette disposition sera-t-elle également applicables aux audits réalisés dans le cadre du programme Renowatt ?
C.4. Chapitre 5. L’octroi et la liquidation des subventions
A l’art. 52, la mention « dans la limite des crédits disponibles » engendre un manque de prévisibilité budgétaire. Le principe appliqué sera-t-il « premier arrivé, premier servi ? ». Il faudrait, à tout le moins, prévoir 2 parts au niveau de l’enveloppe budgétaire, l’une dédiée aux personnes morales de droit public ainsi qu’aux organismes non commerciaux, et l’autre dédiée aux entreprises, l’idéal étant, comme indiqué dans les commentaires généraux, de tendre, à terme, vers un fonds dédié à la rénovation énergétique des bâtiments des pouvoirs locaux accessible sous forme de droit de tirage afin d’assurer une certaine prévisibilité budgétaire et une vision à long terme.
L’art. 53 prévoit que la subvention de tout audit ou étude ne peut être octroyée aux bénéficiaires pour la réalisation d’une obligation légale qui leur est imposée par un autre texte légal, or l’AGW UREBA réformé impose un audit préalable pour bénéficier des subsides à l’investissement, l’AGW Energie thermique va exiger la réalisation d’étude d’opportunité de réseau d’énergie thermique pour les pouvoirs locaux, la prétention aux subsides POLLEC impose la réalisation d’études de faisabilité, … Il est nécessaire d’adapter le texte pour que les personnes morales de droit public puissent bénéficier des subventions à l’audit et à l’étude y compris lorsqu’ils sont imposés par ailleurs.
Lors de la première demande de subvention, l’art. 55 prévoit la création d’un portefeuille électronique au nom du bénéficiaire sur la plateforme digitale AMUREBA. L’UVCW a rappelé que les pouvoirs locaux doivent déjà introduire certaines demandes de subvention via le guichet unique des pouvoirs locaux. Il apparaitrait plus rationnel et plus efficace de centraliser toutes les demandes des pouvoirs locaux au sein de ce guichet unique, y compris les demandes de subvention AMUREBA, tout en envisageant, si nécessaire, de créer des passerelles entre le guichet unique des pouvoirs locaux et la plateforme digitale AMUREBA.
De plus, pour éviter d’imposer un check régulier des demandes de renseignements complémentaires, … sur la plateforme digitale et fluidifier les contacts entre les bénéficiaires et l’administration régionale, il apparait nécessaire de prévoir une notification de toute demande de renseignements, … sur une adresse e-mail officielle.
Selon l’art. 59, certaines prestations sont conditionnées à la présence d’un audit dit récent, c’est-à-dire un audit dont la rédaction du rapport a été finalisée endéans les 4 ans. Pour les audits portant sur les bâtiments, ne pourrait-on pas considérer qu’ils sont toujours valides si aucuns travaux modifiant la PEB n’ont été effectués depuis leur réalisation ?
L’art. 61 liste les prestations pour lesquelles les personnes morales de droit public peuvent solliciter une subvention. L’UVCW constate que le spectre accessible aux personnes morales de droit public est limité par rapport à celui accessible aux entreprises. L’UVCW demande que les personnes morales de droit public puissent également bénéficier de subvention pour l’assistance à maitrise d’ouvrage dans le cadre du présent programme.
L’art. 63 traite des immeubles mixtes, dont au moins 50% de la surface d’occupation est dédiée à une activité commerciale ou industrielle. Cette notion d’immeuble mixte devrait être étendue aux immeubles dédiés aux activités des personnes morales de droit public, mais aussi de toutes PME ou entreprises éligibles.
Concernant l’art. 68, le bénéficiaire, personne morale de droit public, doit recourir à un marché public pour désigner le prestataire service. Dans le cadre d’un marché public, la combinaison du cahier des charges du marché et de l’offre du soumissionnaire retenu constitue la convention. Il n’y a donc pas lieu d’établir une convention de prestation par la suite car elle ne peut rien ajouter ni modifier par rapport aux documents du marché et à l’offre. Lors de la présentation du projet d’AGW au Pôle, le représentant du SPW a annoncé qu'un cahier des charges type serait proposé aux personnes morales de droit public pour qu'elles soient en conformité avec les règles des marchés publics et de la plateforme qui sera mise à leur disposition. L’UVCW insiste une nouvelle fois sur la nécessité de rendre le contenu du présent AGW compatible avec les règles en matière de marchés publics, de TVA ainsi que les règles organiques des pouvoirs locaux.
Par ailleurs, pour les communes, la signature électronique du représentant légal du bénéficiaire requise sur la plateforme digitale est possible uniquement si le bourgmestre (ou son délégué) ET le Directeur Général apposent leurs signatures (cf. art. L1132-3 à 5 du Code de la Démocratie Locale). Il en va de même dans les CPAS, s’agissant du président et du directeur général (L.O., art. 28, § 2, al. 1er). Cette spécificité doit donc être envisagée.
La composition du dossier de demande visée à l’art. 69 comporte la copie du devis du prestataire de service validée par le bénéficiaire. Or, en matière de marché public, il devrait s’agir de l’offre, mais l’Art. 13 de la loi MP du 17 juin 2016 empêche ou limite la divulgation d’offre. Il convient de s’assurer de l’applicabilité de ce point.
Lorsque le dossier introduit est recevable, l’art. 72 prévoit le paiement de la quote-part du bénéficiaire auprès de l’émetteur avant prestation. Or en marchés publics, un paiement ne peut être effectué que pour un service fait et accepté (cf. art. 12 de la Loi relative aux marchés publics du 17/06/2016). Cependant, pour les marchés de faible montant (montant estimé inférieur à 30.000 €), le paiement d’une avance est autorisé. Il conviendrait de tenir compte de ces spécificités de la loi relative aux marchés publics dans la procédure envisagée pour l’AMUREBA d’autant plus que certains types de prestations excèderont les 30.000€ HTVA (nous pensons notamment aux études relatives aux réseaux de chaleur, à la géothermie, …).
De plus, l’UVCW s’interroge sur la procédure du paiement de la TVA due par le bénéficiaire de la subvention AMUREBA au prestataire de service (sur l’ensemble des prestations effectuées) sachant qu’en amont de la prestation, le bénéficiaire doit verser sa quote-part pour la couverture des services demandés, c’est-à-dire 10% du montant HTVA pour les non assujettis à la TVA, les 90% restants HTVA étant versés par l’administration à l’issue de la procédure.
L’art. 22bis §1er du code de la TVA précise que « la taxe devient exigible, pour les prestations de services au moment de l'émission de la facture, à concurrence du montant facturé, peu importe que l'émission de cette facture ait lieu avant ou après le moment où la prestation de services est effectuée ». L’art. 22bis, § 4 de ce même code traite spécifiquement des personnes morales de droit public : « par dérogation au paragraphe 1er, la taxe devient exigible, pour les prestations de services effectuées par un assujetti à des personnes de droit public visées à l'article 6 (cf. communes, CPAS... mais pas les intercommunales, RCA), au moment de la réception du paiement, en tout ou en partie, à concurrence du montant perçu ».
En pratique, la TVA serait due à l'occasion de chaque paiement, il conviendrait de s’assurer auprès du SPF Finances que le mécanisme de paiement envisagé dans AMUREBA soit conforme au code de la TVA et de l’adapter si nécessaire (par exemple en fixant un taux de subvention sur le montant TVAC pour les non assujettis à la TVA tout en veillant qu’il soit équivalent, au final, au taux demandé, voir C.6).
L’art. 73 prévoit la possibilité d’adapter les délais fixés en raison de l’évolution de la méthodologie AMUREBA. Il conviendrait de compléter ce point sur l’adaptation des délais en ajoutant « et pour cause d’évènement extérieur imprévisible » (cf. inondation, mesures prises par les autorités en raison d’une crise sanitaire, …).
Selon l’art. 74 §2, le bénéficiaire doit, à l’issue des prestations, valider les factures ou la déclaration de créance, le rapport d’exécution du prestataire de services et le rapport d‘audit ou étude via la plateforme digitale dans les 15 jours, à défaut, l’ensemble des documents transmis par le prestataire sont réputés validés par le bénéficiaire. Cette disposition est contraire aux règles en matière de marchés publics, pour autant que les règles générales d’exécution (A.R. 14.1.2013) soient applicables, car le pouvoir adjudicateur dispose d'un délai de vérification de 30 jours plus un délai de paiement de 30 jours à compter de la fin de la vérification. De plus, les pouvoirs locaux (communes et CPAS) ne connaissent pas la figure du fonctionnaire dirigeant, c'est l'organe compétent (collège communal/conseil de l'action sociale (ou bureau permanent)) qui peut seul décider de la conformité de la prestation par rapport aux exigences du marché (cf. CDLD, art. L1222-4 / LO CPAS, art. 84).
L’art. 74§3 prévoit que le paiement d’un dossier soit suspendu si le bénéficiaire ou le prestataire de services est débiteur de montants exigibles par la Région wallonne, et ce, tant que ces montants n’ont pas été payés. Cependant, la relation contractuelle, telle qu'elle découle du marché passé par le pouvoir local concerné, est entre celui-ci et le prestataire. A l’estime de l’UVCW, la Région ne peut pas s'immiscer dans celle-ci et retarder le paiement.
Selon l’art. 75, lorsque le montant final est inférieur à celui mentionné dans le marché, l’émetteur rembourse au bénéficiaire le trop-perçu de la quote-part versée initialement. L’UVCW a tenu à rappeler que, pour les marchés de faible montant, les avances ne sont pas autorisées. Il convient donc d’adapter ce point à cette particularité.
A l’art. 76, deux liens hypertexte sont insérés dans le corps de texte.
C.5. Chapitre 6. Les dispositions modificatives, transitoires et finales
Aux art. 86 et 87, ne faudrait-il pas préciser que c'est un délai d'un an à partir du moment où la formation est organisée (vu le nombre d'auditeurs actuels, AMURE ou UREBA, qui vont devoir suivre la formation) ?
L’art. 89 fait référence à l’arrêté du 3 octobre 2022 au lieu du 13 octobre 2022.
C.6. Annexe 5. Le taux de subvention, le montant d’intervention maximal par demande et le nombre d’interventions maximum par période de quatre ans
Le taux de subvention fixé à 90% des coûts HTVA pour les bénéficiaires qui ne peuvent pas récupérer la TVA est légèrement inférieur à celui fixé à 75% complété des 21% de TVA pour les bénéficiaires qui peuvent la récupérer. Pour tendre vers une équivalence entre les bénéficiaires, l’UVCW propose de relever à 96% le taux de subvention pour les bénéficiaires qui ne peuvent pas récupérer la TVA.
De plus, la partie du tableau dédiée aux personnes morales de droit public et organismes non commerciaux devrait également comprendre une ligne dédiée à l’assistance à la maitrise d’ouvrage AMO afin qu’elles puissent également bénéficier d’un soutien financier à cette fin dans le cadre du présent arrêté.
Par ailleurs, l’UVCW s’interroge sur la différence de montant d’intervention maximale par demande HTVA pour l’audit global entre les PME et les personnes morales de droit public. L’UVCW souhaite, à minima, que ces montants soient harmonisés à 8000€ pour ces 2 types de bénéficiaires. Néanmoins, il conviendrait d’augmenter fortement les plafonds annoncés dans l’annexe 5. Sachant, par exemple, qu’un audit coûte au minimum 15000 €, les plafonds fixés actuellement, trop faibles, ne permettront quasi jamais d’atteindre le taux de subvention annoncé.
De plus, l’AGW UREBA réformé du 13 octobre 2022 propose un taux de subvention pour les audits et les études à concurrence de 75% des montants TVAC sans plafond ! Pour rendre le nouveau système AMUREBA intéressant pour les personnes morales de droit public, il est nécessaire de s’assurer qu’il soit à tout le moins équivalent à celui en vigueur actuellement.
Finances et fiscalité : Katlyn Van Overmeire - Julien Flagothier - Mathieu Lambert
Marchés publics : Mathieu Lambert - Elodie Bavay - Marie-Laure Van Rillaer