Les outils de développement urbain
Les villes sont un moteur crucial de développement régional. Offrant de nombreux biens et services et attirant une population sans cesse croissante, elles jouent un rôle central tant au niveau économique, social, culturel et environnemental.
À l’échelle locale, le développement urbain peut s’appuyer sur une multitude d’outils permettant notamment de définir au mieux la stratégie urbaine, partager des bonnes pratiques entre les villes, financer la mise en œuvre des projets ou encore évaluer l’état d’avancement et le succès de la stratégie de développement urbain.
Des outils émanant de l’Union européenne et de la Région sont ainsi mis à la disposition des villes pour soutenir leur développement. Les villes peuvent également développer leurs propres dispositifs et partenariats.
Si ces outils sont destinés aux villes, certains d’entre eux peuvent être appréhendés par des communes plus rurales dans le cadre de la gestion de leurs centres urbains.
1. Les outils européens
Doté d’un budget annuel de plus de 160 milliards d’euros, l’Union européenne soutient différentes politiques lancées par les villes, tant en termes de financement à la réalisation de projets que de mise à disposition d’outils visant à appuyer les villes dans leur gouvernance.
A. Le Fonds de cohésion européen
Les villes wallonnes sont notamment concernées par deux programmes européens : le Fonds européen de développement régional (FEDER) et le Fonds social européen (FSE). Ces programmes sont d’importance. À eux seuls, ils concentrent un tiers du budget total européen.
Ces programmes permettent de soutenir financièrement des centaines de milliers de projets à travers toute l’Europe. Les projets locaux wallons n’y font pas exceptions. Pour la programmation 2014-2020, la Wallonie aura ainsi bénéficié de plus d’un milliard d’euros.
Les projets wallons soutenus sont nombreux et variés. Ils sont portés soit par des acteurs publics parmi lesquels figurent les villes et communes, les intercommunales ou encore les CPAS, soit par le secteur privé dont notamment les entreprises. Ces projets s’articulent autour de plusieurs axes définis par le Gouvernement wallon et s’inscrivant dans le cadre de la stratégie « Europe 2020 ». Parmi les différents axes, citons notamment la formation, l’insertion socio-professionnelle, la transition énergétique, le développement urbain, l’économie et l’innovation.
Dans le cadre desquels la programmation 2021-2027, l’Union européenne a défini des nouveaux objectifs stratégiques au sein desquels la Wallonie a fixé ses priorités. Pour le FEDER, il s’agit ainsi de rendre nos territoires plus intelligents et compétitifs, plus écologiques (sobres en carbone et résilients), plus connectés par l'amélioration de la mobilité, plus sociaux et plus proches du citoyen.
Le 11 mars 2022, un appel à projets FEDER et FSE+ a été lancé par le Gouvernement wallon. Lors de la mise à jour de cette fiche, la sélection des projets pour la programmation 2021-2027 n’a pas encore eu lieu.
B. Le programme Urbact
Lancé en 2002, Urbact est un programme européen visant à encourager le développement urbain intégré en Europe, via la mise en réseau des villes européennes autour d’échanges de bonnes pratiques et d’idées. Toutes les villes, agglomérations et métropoles de l’Union européenne, de Norvège et de Suisse peuvent y participer, sans limite de taille ni de population.
Le programme Urbact a ainsi permis la création de dizaine de réseaux sur des thématiques urbaines variées (réaffectation de centres urbains, logistique urbaine, durabilité des villes, villes interactives, …). Le dernier programme Urbact (Urbact III) s’inscrivait dans le cadre de la programmation FEDER et portait donc sur les années 2014-2020. Il était doté d’un budget de 96 millions d’euros.
Les réseaux créés ont une durée de vie de deux ans et demi et se déroulent en deux phases : phase préparatoire (6 mois) et phase de mise en œuvre (24 mois). En Wallonie, les communes et villes de Braine-l’Alleud, Liège, Mons, Ottignies Louvain-la-Neuve, Seraing, ainsi que le GAL Pays des Condruses regroupant plusieurs communes, y ont activement participé.
Un nouveau programme Urbact IV (2021-2027) est actuellement en cours
C. Le Cadre de référence pour les villes durables européennes
Le Cadre de référence pour les villes durables européennes (RFSC) est un référentiel européen destiné à aider les autorités locales à mieux évaluer leur stratégie, leur politique ou leur projet de territoire. Il vise en outre à faciliter la prise en compte des principes de développement durable.
Il ne s’agit pas d’un dispositif contraignant, mais bien d’un outil d’aide à la décision en ligne[1]. Par une large série de questions et d’indicateurs, il permet à son utilisateur d’évaluer son approche du développement durable dans le cadre d’une stratégie. L’objectif est de susciter une réflexion au sein de l’autorité locale même si, en fonction des caractéristiques propres de celle-ci, certaines considérations s’avèreront plus ou moins pertinentes.
L’outil permet de soutenir une stratégie de développement urbain intégré et durable, tant dans son élaboration que sa mise en œuvre. L’évaluation projet par projet est également possible.
2. Les outils soutenus par l’autorité régionale
Par ses compétences en matière d’aménagement du territoire, de logement ou encore de financement des missions communales et de tutelle sur ces mêmes autorités, la Région wallonne encourage une politique de développement urbain intégré.
Ce soutien prend la forme d’outils encadrés par la Région, imposés ou non, ainsi que des mécanismes de financement corrélatif pour leur adoption et mise en œuvre.
A. Le programme stratégique transversal et la perspective de développement urbain
Le programme stratégique transversal (PST) constitue un document stratégique aidant les communes à mieux programmer et planifier leurs politiques locales en développant une culture de la planification et de l’évaluation des politiques publiques et en mettant en œuvre des principes de transversalité, de décloisonnement entre services et de responsabilisation des différents acteurs. Les PST se fondent sur une démarche stratégique définissant des objectifs, actions et projets, déterminés notamment au regard des moyens humains et financiers à disposition. La démarche est accompagnée d’indicateurs de résultats afin d’évaluer l’état d’avancement et, le cas échéant, l’impact de la stratégie souhaitée. Dès la législature communale 2018-2024, chaque commune, quelle que soit sa taille, est tenue d’élaborer un PST, dont le contenu reste cependant défini en tout autonomie[2].
Dans le cadre de leur PST, les communes à caractère urbain peuvent, si elles le souhaitent, se doter d’un outil stratégique et opérationnel nommé « perspective de développement urbain » (PDU)[3].
Cette PDU identifie les ambitions transversales et actions de la commune à mettre en œuvre au cours de la législature communale, en particulier dans les quartiers prioritaires. Elle est fondée sur une analyse contextuelle faite au regard des sept objectifs régionaux suivants :
- rendre les communes à caractère urbain plus accueillantes ;
- faire des communes à caractère urbain un vecteur de mieux vivre ensemble et de solidarité ;
- encourager la reconstruction de la ville sur la ville ;
- privilégier un logement et un cadre de vie de qualité ;
- offrir un réseau d’espaces publics attractifs, en ce compris d’espaces verts ;
- faire des communes à caractère urbain un moteur de redéploiement économique ;
- créer des communes à caractère urbain intelligentes.
Un arrêté du Gouvernement wallon en précise le contenu[4].
Soulignons qu’à l’inverse du PST, il n’y a donc aucune obligation pour les communes à caractère urbain d’élaborer cette PDU. Toutefois, l’adoption d’une PDU conditionne l’octroi des subsides liés à la Politique des grandes villes, pour les sept villes concernées (v. point B).
Précisons enfin, qu’en termes de stratégie, le Plan de cohésion sociale (PCS) constitue un autre outil programmatique d’importance. Il vise à soutenir les communes wallonnes qui s’engagent à promouvoir la cohésion sociale sur leur territoire. Par cohésion sociale, on entend l’ensemble des processus qui contribuent à assurer, à tous les individus ou groupes d’individus, l’égalité des chances et des conditions, l’accès effectif aux droits fondamentaux et au bien-être économique, social et culturel et qui visent à construire ensemble une société solidaire et coresponsable pour le bien-être de tous.
Le PCS se construit notamment au regard d’un indicateur synthétique d’accès aux droits fondamentaux, un par commune. Il comporte des actions définies sur plusieurs années dont la mise en œuvre fait l’objet d’un financement par l’autorité régionale. La programmation actuelle couvre les années 2020-2025. À la suite d’un appel à projets, 205 pouvoirs locaux wallons sont inscrits dans le dispositif[5].
B. La Politique des grandes villes
La Politique des grandes villes (PGV) a été mise en œuvre dès l’an 2000 afin de répondre aux enjeux urbains particuliers liés à l’attrait des villes concernées pour une population extérieure (mobilité, sécurité, propreté, …) mais aussi au fait urbain (population aux profils très variés, densité, phénomène d’« anonymat » urbain, …).
Par le biais d’un financement régional conséquent, elle permet la mise en œuvre de projets et d’actions en faveur du développement urbain. Elle s’illustre tant en termes de création d’infrastructure, de rénovation d’espaces publics ou encore d’actions en faveur du vivre ensemble et de la cohésion sociale.
À ce jour, sept grandes villes wallonnes sont identifiées et bénéficient d’une part de l’enveloppe régionale annuelle de plus de 12 millions d’euros. Il s’agit de Charleroi, La Louvière, Liège, Mons, Mouscron, Seraing, Verviers. Notons que si la Politique des grandes villes était initialement du ressort de l’autorité fédérale, la matière a été aujourd’hui largement régionalisée. Le financement de l’autorité fédérale se limite à liquider l’encours des contrats passés avant la régionalisation[6].
Jusqu’il y a peu, la mise en œuvre de la PGV se réalisait par le biais d’une convention conclue annuellement entre la Région et chacune des grandes villes concernées. Cette convention comprend le programme des actions à mener, faisant l’objet d’un subventionnement régional. Depuis 2019, la PGV a évolué vers une véritable programmation pluriannuelle liée à l’adoption d’une perspective de développement urbain.
Pour plus d’information, nous renvoyons le lecteur à la fiche de la présente partie, consacré à ce dispositif.
C. La Politique intégrée de la Ville
En 2021, le Gouvernement wallon a décidé de consacrer 240 millions d’euros, notamment par le biais de réaffectations budgétaires, à destination des 9 villes wallonnes de plus de 50.000 habitants[7]. Ce dispositif s’intitule la « Politique intégrée de la Ville » (PIV). Notons que 40 millions d’euros s’y sont ajoutés, destinés à la réhabilitation des SAR.
Cette enveloppe est répartie entre les villes au prorata de leur nombre d’habitants. Elle vise à couvrir la réalisation d’actions contenues dans un plan d’actions spécifique, adopté par chacune des villes et approuvé par le Gouvernement wallon. Ce plan d’actions porte sur les années 2021 à 2024.
Les actions doivent s’inscrire dans le cadre des orientations stratégiques arrêtées dans le PST et, le cas échéant, la Perspective de développement urbain. En outre, elles doivent être en lien avec les thématiques régionales identifiées[8].
L’enveloppe régionale couvre principalement des dépenses d’investissement avec un taux de subsidiation de 80%. Elle est dévolue sous la forme d’un droit de tirage. La liquidation de l’enveloppe se réalise par tranches annuelles jusqu’en 2026. Cette liquidation a lieu de manière automatique, une fois le plan d’actions approuvé par le Gouvernement wallon, à l’exception de la dernière tranche.
D. Les outils d’aménagement actif
La Wallonie met également à disposition des outils plus spécifiques en matière d’aménagement opérationnel et de politique foncière. Ces outils portent sur des périmètres plus ou moins restreints.
Citons notamment l’opération de rénovation urbaine qui vise à restructurer, assainir ou réhabiliter un périmètre urbain spécifique en vue d’y favoriser le maintien ou le développement de la population locale et à promouvoir sa fonction sociale, économique et culturelle dans le respect de ses caractéristiques culturelles et architecturales propres[9].
Cet outil est d’initiative locale et implique une large concertation avec la population, notamment du quartier concerné. Sur la base d’une réflexion stratégique, elle débouche sur l’élaboration d’un projet global de quartier, concrétisée par différentes fiches-projets à mettre en œuvre durant les 15 prochaines années, au maximum. L’élaboration du dossier, la réalisation des fiches-projets ainsi que l’engagement d’un agent communal chargé du suivi de l’opération (appelé « conseiller en rénovation urbaine ») peuvent faire l’objet d’un subventionnement régional.
L’opération de revitalisation urbaine permet quant à elle de soutenir la mise en œuvre d’un partenariat entre le secteur public et le secteur privé. Elle porte sur la réalisation d’une action visant, à l'intérieur d'un périmètre défini, l'amélioration et le développement intégré de l'habitat, en ce compris les fonctions de commerce et de service, par la mise en œuvre de conventions associant la commune et le secteur privé[10].
Elle se concrétise par le biais d’une convention conclue entre la commune et le ou les partenaire(s) privé(s) (promoteurs, sociétés, …). Cette convention ouvre la faculté pour la commune d’obtenir la prise en charge par la Région des frais d’aménagements du domaine public (voiries, égouts, espaces verts, …), ainsi que les honoraires de l’auteur de projet pour ces aménagements. Ce financement régional peut couvrir la totalité des dépenses communales, sachant toutefois que, pour chaque euro pris en charge par la Région, le ou les partenaire(s) privé(s) doivent investir deux euros minimum dont au moins un dans le logement. En outre, le financement régional ne peut dépasser 1.250.000 euros par opération.
Les sites à réaménager (SAR) sont les immeubles (bâtis et non bâtis) qui étaient destinés à accueillir une activité autre que le logement et dont le maintien dans l'état actuel est contraire au bon aménagement du site ou constitue une déstructuration du tissu urbanisé. Il vise donc non seulement les friches industrielles mais également l’ensemble des sites désaffectés où une activité économique avait eu lieu. Par réaménagement, on vise l'ensemble des actes et travaux de réhabilitation, de rénovation, d'assainissement, de construction ou de reconstruction[11].
Le périmètre du SAR est défini par le Gouvernement wallon d’initiative ou sur proposition notamment de la commune, d’une intercommunale ou du propriétaire. L’adoption d’un périmètre emporte plusieurs conséquences. Il permet notamment de faciliter la réalisation de projets qui ne répondent pas aux affectations du plan de secteur, d’assurer un certain contrôle sur les aliénations immobilières par le biais d’autorisations à obtenir ou encore de permettre d’enjoindre la réalisation d’études et travaux ayant pour effet de restaurer l’aspect des lieux, tant au niveau paysager qu’au niveau environnemental.
Précisons enfin qu’il existe également les sites de réhabilitation paysagère et environnementale considérés comme d’intérêt régional. Ceux-ci sont déterminés par le Gouvernement wallon qui en arrête la liste. Les frais d’acquisition ou de réhabilitation de ces sites peuvent faire l’objet d’une prise en charge régionale.
3. Les autres dispositifs à l’initiative des villes
À côté des outils soutenus par d’autres niveaux de pouvoir, les villes sont à l’initiative de nombreux dispositifs mis en place en vue de leur développement urbain. Ces outils sont ainsi le prolongement de leur stratégie locale.
Ainsi, la ville peut notamment mener des actions en vue du maintien et du développement du dynamisme de son centre-ville et de ses quartiers : signalétique, octroi de primes et de subsides communaux pour soutenir l’investissement, accompagnement des indépendants dans leurs démarches administratives et leur développement, animation des centres-villes, promotion des commerces locaux, etc.
La mise en place d’une structure spécifique, appelée communément « gestion centre-ville », peut s’avérer appropriée pour mener les différentes actions, en assurer la cohérence et impliquer l’ensemble des partenaires concernés. La gestion centre-ville se fonde en effet sur un partenariat public-privé fort dans la détermination des actions mais également dans leur financement. Il implique non seulement les mandataires locaux et les services communaux mais également les commerçants, les banques, les écoles, les comités de quartier ou encore les riverains.
[1] www.rfsc.eu
[2] Pour plus d’informations sur le sujet, il est renvoyé à la fiche Le PST : programme stratégique transversal communal.
[3] Art. L1123-27/1 du CDLD, inséré par le décr. 19.7.2018, M.B. 28.8.2018.
[4] AGW 8.11.2018 rel. à la perspective de développement urbain, inforum 325.776.
[5] Pour plus d’information sur le sujet, il est renvoyé à la fiche Le Plan de cohésion sociale dans la partie La Gouvernance, le PST, le PCS, Nouveaux principes.
[6] Pour plus d’information sur le sujet, il est renvoyé à la fiche La Politique des grandes villes dans la partie La commune et ses ressources : les finances communales.
[7] A savoir les villes de Charleroi, Liège, Namur, Mons, La Louvière, Tournai, Seraing, Mouscron, Verviers.
[8] Ces thématiques sont les suivantes :
- Développement des quartiers prioritaires,
- Rénovation énergétique à l’échelle de la ville et/ou par quartiers,
- Cohésion sociale,
- Politique de mobilité en ville,
- Animation et gestion commerciale des centres-villes,
- Végétalisation des villes et adaptation aux changements climatiques,
- Villes connectées,
- Tourisme et patrimoine en ville,
- Logement en ville,
- Réhabilitation des sites à réaménager situés dans les centralités des villes.
[9] CoDT, art. D.V.14.
[10] CoDT, art. D.V.13.
[11] CoDT, art. D.V.1, 2°.

Focus sur la commune
Cette fiche provient de l'ouvrage "Focus sur la commune - Fiches pour une bonne gestion communale", véritable outil réalisé en collaboration avec la DG05 pour tout savoir sur la commune, terreau de démocratie, pouvoir le plus proche du citoyen au service duquel, jour apres jour, le mandataire local assume son mandat. Indispensable aux décideurs qui veulent contribuer de façon active à la gestion de leur commune.
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