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Mis en ligne le 8 Février 2024

A l’initiative de Bénédicte Linard, ministre ayant la compétence de l’Enfance, le Parlement de la Fédération Wallonie Bruxelles a adopté, le 4 octobre 2023 le décret relatif à l'interdiction des violences à l'égard des enfants dans les structures autorisées, agréées, subventionnées ou organisées par la Communauté française, publié au Moniteur belge le 23 janvier 2024 et dont l’entrée en vigueur est le 2 février 2024.

Objectifs du décret[1]

L’objectif poursuivi par ce nouveau décret est pour le bien-être des enfants et des jeunes. Après les demandes répétées de l’Organisation des Nations unies (ONU) quant à l’interdiction explicite de toute forme de traitement dégradant à l’égard des enfants, par le biais de ce décret la Belgique va se conformer aux textes internationaux[2] à ce sujet.

Aussi, la Déclaration de politique communautaire (DPC) (2019-2024) prévoit de « lutter contre la violence à l’égard des enfants, notamment en légiférant sur les châtiments corporels ». De même, le Plan d’actions relatif aux droits de l’enfant (PADE) mentionne l’adoption d’un décret interdisant les violences dites éducatives dans les différents secteurs d’action de la Fédération Wallonie-Bruxelles et prévoit de larges campagnes visant l’information et la sensibilisation à l’éducation positive, la formation initiale et continue et l’accompagnement professionnel.

C’est en ce sens que le décret entend consacrer le droit des enfants à une éducation non violente et vise à cet effet à interdire expressément toutes les formes de violences, physiques ou psychiques, à leur égard, et ce pour l’ensemble des secteurs de la FWB s’adressant aux enfants (l’enseignement fondamental et l’enseignement secondaire ; l’accueil de la petite enfance, l’accueil temps libre et l’accompagnement de l’enfant ; la jeunesse ; l’Aide à la jeunesse ; le sport et la culture). Celles-ci couvrent notamment les violences éducatives ordinaires (VEO), ici entendues comme l'ensemble des violences physiques, psychologiques ou verbales exercées comme moyen éducatif sur un enfant visant à corriger certains comportements ou à le punir, en partant du principe selon lequel les enfants sont des êtres en construction, vulnérables, dépendants, qui ont besoin d’être protégés contre toute forme de violence pouvant être commise dans diverses institutions.[3]

Champ d’application du décret[4] 

L’interdiction des violences à l’égard des enfants s’applique aux secteurs de la Communauté française dont l’activité s’adresse à des enfants, entendus comme toute personne âgée de moins de dix-huit ans, soit :

1° l’enseignement fondamental et l’enseignement secondaire, ordinaire et spécialisé ;

2° l’accueil de la petite enfance, l’accueil temps libre et la santé de l’enfant ;

3° la jeunesse ;

4° l’aide à la jeunesse ;

5° le sport ;

6° la culture.

Notion de « toute forme de violence physique ou psychique. »

Le décret définit ce qu’il faut entendre par « toute forme de violence physique ou psychique » comme l’ensemble des actes ou comportements physiques, psychiques, verbaux ou de toute autre nature qui portent atteinte à l’intégrité morale, physique, psychique et sexuelle de l’enfant, en ce compris les violences exercées avec une intention éducative telle que punir ou corriger certains comportements[5].

A l’article 3 du décret, est consacré le droit pour tout enfant à une éducation non violente.

L’enfant doit être traité dans le respect de sa personne, de son individualité et de son intégrité et ne peut être soumis à aucune forme de violence physique ou psychique.

L’article 4 dispose ce qui suit : « Aucun enfant ne peut être soumis à toute forme de violence dans les structures autorisées, agréées, subventionnées ou organisées par la Communauté française. Les sanctions et mesures prononcées à l’encontre d’un enfant sont adaptées à la maturité et au niveau de développement de l’enfant et proportionnées à la nature et à la gravité des faits. Elles sont toujours éducatives et n’ont pas d’effet traumatisant. Les actes posés par les professionnels et les intervenants a?n de protéger l’enfant d’un comportement violent d’un autre enfant ou de lui-même mobilisent une force minimale et sans intention de nuire. Les intervenants s’entendent comme l’ensemble des individus prenant part aux activités organisées en présence d’enfants sans être des professionnels. »

Le commentaire de cet article issu des travaux parlementaires[6], éclaire quelque peu la portée de cet article… Cet article vise à interdire, dans les structures agréées[7], subventionnées ou organisées par la Communauté française, les traitements ou châtiments inhumains ou dégradants et, à ce titre, proscrire l'usage de toute forme de violence éducative ordinaire. Les actes posés afin de protéger l’enfant d’un comportement violent d’un autre enfant ou de lui-même renvoient aux mesures de coercition directe, notamment de contention quand elle est nécessaire, visées par les articles 68/1 et suivants du Code de la prévention, de l'Aide à la jeunesse et de la protection de la jeunesse.

Sont ici visées les sanctions que la législation en vigueur permet de prononcer à l’égard des enfants, notamment celles visées aux articles 1.7.9-2 et suivants du Code de l’enseignement fondamental et de l’enseignement secondaire et à l’article 70 du Code de la prévention, de l’Aide à la jeunesse et de la protection de la jeunesse et à l’article 106 du décret du 14 mars 2019 relatif à la prise en charge en Centre communautaire des jeunes ayant fait l’objet d’un dessaisissement.

Les « faits » renvoient quant à eux aux faits pouvant entrainer des sanctions : par exemple, ceux visés 1.7.9-2 et suivants du Code de l’enseignement fondamental et de l’enseignement secondaire ; et aux articles 70 et 71, 8°, du Code de la prévention, de l’Aide à la jeunesse et de la protection de la jeunesse et à l’article 105 du décret du 14 mars 2019 relatif à la prise en charge en Centre communautaire des jeunes ayant fait l’objet d’un dessaisissement.

Décret hybride et transversal

Les articles 5 à 32 du décret modifient plusieurs décrets sectoriels dans diverses compétences de la Fédération Wallonie-Bruxelles, afin d’y inclure le principe d’interdiction de la violence physique et psychique à l’égard des enfants et des jeunes. Les compétences concernées sont multiples, puisqu’il s’agit de toutes celles au sein desquelles des adultes, quelle que soit leur fonction, sont en contact avec des enfants. Elles englobent donc l’enseignement, la petite enfance, la jeunesse, l’aide à la jeunesse, le sport et la culture.

Evaluation

Une évaluation du dispositif décrétale est prévue à l’article 33 du décret. Cette évaluation sera réalisée par l’Observatoire de l’Enfance, de la Jeunesse et de l’Aide à la Jeunesse (OEJAE) qui remettra, au plus tard pour le 31 décembre 2028, et ensuite tous les quatre ans, au Gouvernement l’évaluation laquelle sera transmise au Parlement.

Conclusion

L’élaboration de ce décret est une avancée majeure pour les droits de l’Enfant au regard des obligations internationales qui incombaient à la Belgique, afin de prévoir un dispositif légal qui interdise toute forme de violences à l’égard des enfants.

Précisons tout de même que les cas les plus graves et les formes les plus visibles de violence physique sont en effet cadrées par les articles 398 et suivants du Code pénal incriminant les actes constitutifs de coups et blessures volontaires, qui prévoient des dispositions tenant compte de l’âge de la victime. L’article 405ter du même Code prévoit en outre une circonstance aggravante lorsque le fait a été commis envers un mineur par toute personne ayant autorité sur le mineur.

Il convient également de spécifier que le présent décret n’a pas vocation à intervenir dans les relations entre un enfant et ses parents dans un cadre familial. Celles-ci relèvent de la compétence de l’autorité fédérale en matière de droit civil[8].

Quant à la sensibilisation et la formation des professionnels qui devront appliquer ce décret, on peut déplorer qu’il n’y ait rien à ce sujet dans le décret. L’exposé des motifs fait pourtant référence à un volet relatif à l’accompagnement et la formation des professionnels des secteurs concernés…

 


[1] Proj. de décr. rel. à l’interdiction des violences à l’égard des enfants dans les structures autorisées, agréés, subventionnées ou organisées par la Communauté française, Exposé des motifs, doc., Parl. Comm.fr., session 2022-2023, 581, n°1

[2] En effet, si la Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant, l’observation générale n°8 du Comité des droits de l’enfant, la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, la Charte sociale européenne révisée, le Pacte international relatif aux droits civils et politiques enjoigne d’interdire expressément toute forme de violence à l’égard des enfants.

[3] Proj. de décr. précité, Exposé des motifs, doc., Parl. Comm.fr., session 2022-2023, 581, n°1, p.6

[4] Décr. 5.10.2023 relatif à l’interdiction des violences à l’égard des enfants dans les structures autorisées, agréées, subventionnées ou organisées par la Communauté française, MB 23.1.24, art.1

[5] Décr., op.cit, art.2

[6] Proj. de décr. précité, Commentaires des articles, doc., Parl. Comm.fr., session 2022-2023, 581, n°1, p.8

[7] En ce comprises les structures établies par une déclaration d’accueil telles qu’entendues à l’article 6, §1er, du décr. 17.7.2002 portant réforme de l’Office de la Naissance et de l’Enfance

[8] Comme cela a été précise dans la Discussion générale, Doc.Parl. Comm.fr., CRI N°3, p.48.

Auteur Conseiller(e)(s) / personne(s) de contact
Jeunesse/petite enfance : Ariane Michel - Tanya Sidiras
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Date de mise en ligne
8 Février 2024

Auteur
Tanya Sidiras

Type de contenu

Matière(s)

Jeunesse/petite enfance
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