Avant-projets d’arrêté - Cours d’eau - Conservation de la nature: l’avis de l’UVCW
L’Union des Villes et Communes de Wallonie a pris connaissance avec intérêt du contenu de l’avant-projet d’arrêté portant exécution du décret modifiant divers textes en ce qui concerne les cours d’eau et de l’avant-projet d’arrêté relatif aux notifications et aux autorisations qui peuvent être délivrées en application de l’article 58 bis de la loi du 12 juillet 1973 sur la conservation de la nature, au sujet desquels elle a été consultée par René Collin, Ministre de l'Agriculture, de la Nature, de la Forêt, de la Ruralité, du Tourisme, du Patrimoine et délégué à la Grande Région. Les modifications proposées sont dans l’ensemble conformes à ce qui avait été discuté en groupe de travail mais l’UVCW a néanmoins tenu à faire valoir plusieurs remarques sur cette dernière version.
Concertation gestionnaire DNF
Une concertation préalable entre le gestionnaire du cours d’eau et le DNF dans un certain nombre de cas semble logique au vu de l’importance du rôle écologique des cours d’eau et de l’expertise dont dispose le DNF en la matière. Toutefois plusieurs modalités interpellent l’UVCW.
Ainsi, la visite préalable de terrain est organisée de façon systématique dans plusieurs cas et notamment lorsque les travaux envisagés sont soumis à autorisation préalable. Ce systématisme pose la question des moyens humains disponibles et de la nécessité de ne pas retarder la procédure en cas de difficultés à organiser la visite. Il est important que cette visite de terrain ne soit pas un élément bloquant pour les gestionnaires dans l’exécution des travaux d’entretien et dans la délivrance des autorisations domaniales qui doivent être remises dans un délai de rigueur. Ainsi, lorsque la visite de terrain ne peut être réalisée durant un certain délai, il doit être prévu que la procédure se poursuit et qu’un avis sera tout de même rendu, le cas échéant sur base d’une visite unilatérale.
En ce qui concerne l’effet de l’avis, il existe une ambiguïté dans le texte qu’il convient de lever lorsque la concertation préalable est relative à des travaux d’entretien et de petite réparation. La concertation préalable doit être considérée comme débouchant sur un avis simple en toute hypothèse. Dès lors, il doit être clair que les conditions particulières émises dans l’avis du DNF peuvent ne pas être respectées par le gestionnaire même lorsqu’il s’agit de travaux d’entretien qu’il exécute. De même, l’obligation de trouver une solution alternative ou de motiver le maintien des travaux en cas d’avis défavorable faisant suite à une visite de terrain n’a pas de sens concernant l’exécution des travaux d’entretien par le gestionnaire (un acte administratif n’est pas nécessairement pris) et ne saurait faire obstacle à ceux-ci. Par ailleurs, lorsque cette obligation s’applique dans le cadre d’une procédure d’autorisation domaniale, il ne s’agit rien d’autre que la traduction de l’obligation de motivation formelle. L’UVCW demande donc que cette obligation visée à l’article R 79, paragraphe 3, alinéa 3, dernière phrase soit supprimée car elle n’apporte qu’un risque de confusion.
Enfin, dans les faits générateurs de l’obligation de concertation préalable, il conviendrait de reformuler l’article R 77, paragraphe 1er, 2° de façon à ce que la concertation ne soit pas un préalable à l’exécution des travaux mais bien à la délivrance de l’autorisation domaniale, ce qui est plus logique et correspond davantage aux dispositions suivantes.
Rejets d’eau et prises d’eau
L’article R 81 prévoit que le débit d’eau maximum pouvant être prélevé ou déversé dans un cours d’eau est fixé par les gestionnaires. L’UVCW estime que cette disposition ne doit pas s’appliquer aux rejets d’eaux qui sont couverts par un permis d’environnement dès lors que cet aspect a déjà été évalué et réglementé dans le cadre du permis. Le gestionnaire devrait par contre-pouvoir donner son avis dans le cadre de l’instruction des demandes de permis relatives à des établissements impliquant un rejet ou une prise d’eau dans ses cours d’eau. Pour le reste, le gestionnaire dispose de la faculté de demander une modification des conditions particulières d’exploitation à l’autorité compétente.
L’article R 81 prévoit aussi que le gestionnaire peut donner des injonctions aux propriétaires d’ouvrages sur les cours d’eau et notamment ordonner la réduction ou la suspension du prélèvement ou du rejet d’eau. L’UVCW estime que ce pouvoir doit être soumis aux exigences de proportionnalité et qu’un recours doit être créé pour contrôler cette proportionnalité. Certains rejets d’eau, comme ceux des stations d’épuration, ont en effet également un intérêt public.
Les articles R 82 et R 83, quant à eux, imposent plusieurs conditions techniques auxquelles doivent répondre les rejets et les prises d’eau. Ici aussi, il convient de prévoir un régime spécial lorsque ces rejets ou ces prises d’eau sont couverts par un permis d’environnement. Pour les permis existants un régime transitoire doit être prévu de façon à ce qu’il n’y ait pas de contradiction avec ce qui a été autorisé. Pour les permis futurs, ces conditions doivent être considérées comme des lignes directrices desquelles il est possible de s’écarter de façon exceptionnelle.
Pour ce qui concerne les prélèvements saisonniers, l’article R 84 interdit ceux qui sont effectués à partir de la voie publique. La justification d’une telle exclusion ne paraît pas évidente. Il conviendrait pour le surplus de prévoir que la déclaration préalable puisse être instruite par le délégué du gestionnaire, sauf pour ce qui concerne l’imposition de conditions complémentaires.
Interdictions
L’interdiction de couvrir les cours d’eau de quelque manière que ce soit, formulée à l’article R 87 semble trop absolue malgré les exceptions qui sont prévues. En effet, à défaut d’une définition de ce qu’il y a lieu d’entendre par couvrir, de nombreux ouvrages ayant une emprise dans le lit du cours d’eau, tels que ceux relatifs à une centrale hydroélectrique, s’en trouvent de facto interdits. En outre, il conviendrait de prévoir que le gestionnaire peut autoriser la couverture à titre exceptionnel ou temporaire.
L’article R 88 quant à lui prévoit un nouveau régime d’autorisation pour les travaux réalisés à moins de six mètres de la crète de berge d’un cours d’eau non navigable ou non classé auquel l’UVCW s’est opposée lorsque les actes et travaux concernés sont déjà soumis à permis d’urbanisme ou unique. Il s’agit en effet d’un alourdissement procédural pour le demandeur qui peut être évité dans la mesure où le permis d’urbanisme ou unique permet déjà d’apprécier la conformité du projet au bon aménagement des lieux et que l’avis du gestionnaire pourrait être sollicité dans un tel cas dans le cadre de la procédure d’octroi du permis. Ainsi, la procédure d’autorisation du gestionnaire ne demeurerait que lorsque les travaux ne sont pas soumis à permis. Par ailleurs, une définition des travaux visés permettrait de mieux cerner le champ d’application de cette obligation de solliciter l’autorisation du gestionnaire.
Autorisation délivrée en vertu de l’article 58 bis de la loi sur la conservation de la nature
L’UVCW souhaite que soit maintenu le régime de dérogation prévu en cas de circonstances exceptionnelles ou imprévues qui était prévu à l’article 6 de l’arrêté du 19 janvier 1995 qui se trouve abrogé. En effet, certaines circonstances peuvent imposer de circuler sur les berges et dans le lit des cours d’eau sans pouvoir attendre la fin de la procédure prévue dans le nouveau texte qui vient remplacer l’arrêté du 19 janvier 1995. Une faculté pourrait être donnée dans ce cas au DNF d’imposer des travaux à postériori, dans le respect du principe de proportionnalité.
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