Dernières volontés: la commune doit-elle suivre la demande des héritiers ou la volonté du défunt ?
Il y a quelques années, une personne a obtenu une concession de sépulture en prévision de son décès. Lorsque celui-ci survient, les héritiers du défunt optent en fait pour une crémation avec dispersion des cendres. En l’absence de preuve écrite des dernières volontés, la commune doit-elle suivre la demande des héritiers, ou peut-elle prendre pour preuve suffisante de la volonté du défunt la concession qu’il avait demandée ?
Selon la loi, le choix des funérailles appartient au défunt (dernières volontés), mais lorsque ce choix n’a pas été manifesté dans les formes (mention au registre de population et des cimetières, en application de l’art. L1232-17, §2, du CDLD) - ce qui n’est jamais obligatoire -, il faut s’en remettre à d’autre modes de preuve de ces dernières volontés.
Or, le Code de la démocratie locale et de la décentralisation a accordé une place particulière au témoignage d’une personne, la « personne qualifiée pour pourvoir aux funérailles », telle que définie à l’article L1232-1, 10° (« personne désignée par le défunt par voie de testament ou, à défaut, un de ses héritiers ou ayants droit ou, à défaut, la personne qui durant la dernière période de la vie du défunt a entretenu avec celui-ci les liens d’affection les plus étroits et fréquents de sorte qu’elle puisse connaître ses dernières volontés quant à son mode de sépulture »), en considérant qu’en l’absence de dernières volontés exprimées dans les formes par le défunt, la personne ainsi définie est censée exécuter ces volontés, en choisissant le mode de sépulture pour ce défunt (CDLD, art. L1232-17, §2, dern. al.).
Lorsque l’autorité communale est informée, lors d’un décès, du choix d’une sépulture (par exemple la crémation suivie d’une dispersion des cendres) effectué par une personne qualifiée pour pourvoir aux funérailles, et que ce choix semble en contradiction avec d’autres indices en possession des responsables communaux (tels que l’existence d’une concession de sépulture payée par le ou les défunts afin d’accueillir leur dépouilles), toute la question revient donc à savoir si la commune est habilitée à procéder à des vérifications complémentaires concernant les dernières volontés du défunt, ou si elle peut – ou doit – se contenter de constater l’absence de mention en ce sens dans les registres, et de délivrer l’autorisation d’inhumation ou de crémation, conforme au choix effectué par la personne qualifiée.
Si l’on s’en tient au prescrit légal précité, la seconde solution semble devoir s’imposer.
Toutefois, rien n’empêche une autorité communale de s’assurer que la personne qui pourvoit aux funérailles est bien la seule qualifiée pour ce faire. En effet, dans l’hypothèse où il n’existe ni mention de dernières volontés dans les registres communaux, ni testament désignant une personne pour pourvoir aux funérailles, la législation (CDLD, art. L1232-17, §2, dern. al.) prévoit que la personne qualifiée pour pourvoir aux funérailles du défunt est « un de ses héritiers ou ayants droit ». Il est donc possible que deux ou plusieurs personnes puissent être considérées simultanément comme « personne qualifiée pour pourvoir aux funérailles », ce qui permet à l’autorité communale, en cas de doute quant au respect des dernières volontés du défunt par la personne qui déclare s’occuper des funérailles, de prendre contact avec la ou les autres personnes également héritières ou ayants droit, afin de leur demander si elle(s) considèrent que le choix posé est bien conforme à ce que souhaitait le défunt.
En cas de conflit entre ces personnes, la commune peut alors leur recommander de régler la question en saisissant le juge civil compétent. En vertu de l’article 587, al. 1er, 1°, du Code judiciaire, il s’agit du président du tribunal de première instance territorialement compétent.
Si en revanche, et toujours en l’absence de preuve écrite des dernières volontés, le choix initial de la personne qualifiée ne peut être soumis à une autre personne (cas de l’héritier unique), ou ne mène à aucune contestation (accord de tous les héritiers sur le choix posé), il n’appartient pas légalement à l’autorité communale de contester ce choix.