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Mis en ligne le 27 Octobre 2023

La question de la possible création des flexi-jobs en CPAS est apparue dans le cadre de la discussion des mémorandums. Elle a été débattue au sein de la Fédération des CPAS. A l’origine, l’objectif annoncé des flexi-jobs était d’abord la lutte contre le travail au noir dans le secteur de l’Horeca. Dans le projet de loi du 14 août 2015 (DOC 54 1297/001), le législateur d’alors exprimait aussi la volonté de tenir compte de la spécificité du secteur Horeca. Notamment la nécessité de « main-d’œuvre variable et fortement dépendante de circonstances externes comme le temps, les saisons, les fêtes, … » ; l’emploi de « travailleurs peu qualifiés, de défavorisés et de jeunes ».

Quelles sont les bases légales des flexi-jobs ? Une loi du 16 novembre 2015 porte des dispositions diverses en matière sociale et pose les principes du dispositif. Un arrêté royal du 13 décembre 2016 exécute la loi du 16 novembre 2015 portant des dispositions diverses en matière sociale en ce qui concerne les flexi-jobs.

Les secteurs concernés sont repris à l’article 2 de la loi du 16 novembre 2015. Au 1er décembre 2015, date de son entrée en vigueur, seules les entreprises relevant du secteur de l’Horeca pouvaient recourir aux flexi-jobs. Depuis le 1er janvier 2018, le contrat de travail flexi-job peut aussi être conclu dans d’autres secteurs : certains secteurs du commerce, de la coiffure, des soins de beauté et les boulangeries. Par la suite, la loi-programme du 26 décembre 2022 a étendu le champ d’application du flexi-job à d’autres secteurs. A partir du 1er janvier 2023, le secteur du sport, du cinéma, du spectacle et des soins de santé peuvent également y avoir recours. Le Fédéral s’est accordé pour que d’autres secteurs soient concernés en 2024 : la garde d'enfants, l'enseignement, le sport et la culture (dans le public) …

Pour le secteur des soins de santé, il s’agit du secteur privé et du secteur public, à l’exception des professionnels des soins de santé. Le dispositif concerne ainsi « la commission paritaire des établissements et des services de santé (CP 330) ou des établissements ou services publics relevant du secteur public des soins de santé dont le code NACE est 86101, 86102, 86103, 86104, 86109, 86210, 86901, 86903, 86905, 86906, 86909, 87101, 87109, 87301 et 87302, à l'exclusion des fonctions qui comprennent des tâches entrant « dans le champ d'application matériel de la loi coordonnée du 10 mai 2015 relative à l'exercice des professions des soins de santé; » (L. 16.11.2015 (M.B. 26.11.2015), inforum 295276).

Le secteur public est visé par les codes Nace. Parmi ceux-ci, les codes 87101, maisons de repos et de soins ainsi que 87301, maisons de repos. Il y a aussi les hôpitaux. En pratique, les maisons de repos publiques sont donc déjà dans le champ d’application des flexi-jobs, sauf pour les professionnels de la santé (infirmiers, aides-soignants, kinésithérapeutes…). La Fédération des CPAS n’a pas été concertée ni même informée à ce sujet. Elle a pris contact avec l’ONSS pour connaître le chiffre des flexi-jobs existant en MR-S et hôpitaux publics. Au premier trimestre 2023, ils étaient au nombre de 2 pour 0,3 ETP. C’est marginal.

Qui peut être engagé via ce dispositif ? Des travailleurs et des pensionnés ont la possibilité de conclure des contrats de travail flexi-job sous certaines conditions. Selon Acerta, début 2023, les pensionnés représentaient 10 % des « flexi-jobbers » et les travailleurs de 25 à 34 ans 35,7 %[1]. Bien avant les flexi-jobs, des pensionnés continuaient quelque temps sur base volontaire pour différents motifs : poursuivre un travail apprécié, sortir de chez soi, améliorer ses revenus... Il s’agit d’exceptions. Cela peut se faire aussi avec un flexi-job.

Certaines conditions sont applicables aux travailleurs. Le travailleur doit être occupé au moins à 4/5ème d’un temps plein chez un ou plusieurs autres employeurs au cours du troisième trimestre qui précède le flexi-job. On ne peut en déduire que le flexi-job ne peut être que d’un cinquième temps. En effet, le régime de temps de travail dans le premier emploi peut avoir évolué au moment de l’engagement. Assez logiquement, le travailleur ne peut avoir un contrat de travail de 4/5ème d’un temps plein et un contrat de travail flexi-job chez le même employeur[2]. Le nombre d’heures pouvant être prestées dans le cadre d’un flexi-job ne fait l’objet d’aucune limitation.

Quels sont les avantages pour les employeurs et les travailleurs des flexi-jobs ?  L'employeur est redevable d'une cotisation spéciale de 25 % sur le salaire[3]. Le Fédéral a décidé que ce taux passe à 28 % en 2024. Au niveau du travailleur, le salaire est exonéré de l’impôt sur les revenus[4] et de cotisations sociales travailleurs. Son net est donc égal à son brut. A partir de 2024, si le total des heures excède 12 000 euros, la personne devra déclarer son revenu et sera taxée sur la globalité du montant.

La possible application du régime des flexi-jobs en CPAS a suscité différentes réflexions et points d’attention au sein de la Fédération des CPAS. Le niveau limité des cotisations patronales peut être vu comme attractif pour l’employeur. En CPAS, il y a toutefois des problèmes de pénurie notamment pour les travailleurs sociaux ainsi que les infirmiers et plus généralement un problème d’attractivité vis-à-vis du personnel qualifié. Ce dernier découle en bonne partie de barème pas assez « concurrentiel ». Cela a été rappelé dans l’avis commun de l’UVCW et de la Fédération des CPAS sur la réforme de la fonction publique locale[5]. On ne voit pas comment un outil d’abord conçu pour répondre à un problème de travail au noir rencontrerait ces problèmes de pénurie et d’attractivité.

Dans l’Horeca, les flexi-jobs apportent une main-d’œuvre d’appoint peu qualifiée dans un secteur où il y a des fluctuations saisonnières. On n’est pas dans un schéma de ce type en CPAS. Le besoin de travailleur est structurel, en progression régulière et le niveau de qualification recherché est plus élevé. Par ailleurs, la possibilité de flexi-jobs ne va pas susciter des « générations spontanées » de travailleurs sociaux, d’infirmiers ou d’aides-soignants.

Si l’on applique les flexi-jobs en CPAS, vu les avantages fiscaux, cela signifierait que quelqu’un qui est « extérieur » peut venir faire des heures complémentaires en étant mieux payé que ses collègues qui ne travaillent qu’en CPAS. C’est, inéquitable, « malsain » par rapport au reste du personnel.

Deux difficultés connexes sont à mentionner. Le fait qu’une personne a deux employeurs est un facteur de complexité en GRH, notamment en termes de ligne hiérarchique et de gestion d’horaires. Si une personne vient travailler en flexi-job, qu’elle donne satisfaction et qu’on lui propose de venir à temps plein, elle pourrait décliner. En effet, elle pourrait y perdre en net.

Début 2019, la Cour des comptes a constaté que 35,3 % de tous les ETP créés de 2015 à 2017 dans le cadre des flexi-jobs ne représentent pas de nouveaux emplois, mais découlent d’un glissement entre les statuts à l’échelon des travailleurs[6].

Vu l’absence d’IPP, de cotisations sociales personnelles et le niveau réduit des cotisations patronales, ces glissements impliquent une forme de définancement de la sécurité sociale et plus généralement de l’Etat fédéral. Dans un contexte où le vieillissement démographique va impliquer des dépenses croissantes de soins de santé et de pensions, est-ce opportun ? La question mérite d’autant d’être posée que, de facto, les CPAS sont déjà amenés à « suppléer » pour partie à des « lacunes ou insuffisances » dans la sécurité sociale.

A maintes reprises les syndicats ont exprimé leur opposition aux flexi-jobs. Vu le peu d’intérêt des flexi-jobs en CPAS, cela vaut-il la peine d’altérer les relations sociales ?

Dans ce contexte, en sa séance du 14 septembre 2023, le Comité directeur a exprimé son désaccord quant à l’extension du régime des flexi-jobs aux CPAS.

 

 


[1]     Le Soir, Les flexi-jobs séduisent jeunes et pensionnés, 13.6.2023.

[2]     L. 16.11.2015, art. 4.

[3]     L. 16.11.2015, art. 15.

[4]     L. 16.11.2015, art. 29.

[5]     Avis commun de l’Union des villes et communes de Wallonie et de la Fédération des CPAS sur la réforme de la fonction publique locale, 12.9.2023. 

[6]     Rapport de la Cour des comptes, février 2019 Incidence du plan horeca 2015. Flexi-jobs, travail occasionnel et heures supplémentaires nettes, p. 51.

Auteur Conseiller(e)(s) / personne(s) de contact
Aînés : Jean-Marc Rombeaux
Personnel/RH : Isabelle Dugailliez - Chloé Baudoin - Tanya Sidiras - Gaëlle De Roeck - Louise Dalla Valle - Florence CLAES
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Assemblée générale UVCW 2025

Date de mise en ligne
27 Octobre 2023

Matière(s)

Aînés Personnel/RH
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