Quels sont les immeubles des pouvoirs locaux qui peuvent bénéficier d’une exonération du précompte immobilier ?
Quels sont les immeubles des pouvoirs locaux qui peuvent bénéficier d’une exonération du précompte immobilier et dans quelles conditions ?
L'article 253, 3°, du Code de l'impôt sur les revenus 1992 (CIR 1992) dispose qu' "est exonéré du précompte immobilier, le revenu cadastral […] des biens immobiliers qui ont le caractère de domaines nationaux, sont improductifs par eux-mêmes et sont affectés à un service public ou d'intérêt général : l'exonération est subordonnée à la réunion de ces trois conditions".
Comme l'indique le commentaire de l'administration fiscale, cette disposition confirme la permanence d'une règle ancienne de notre législation fiscale. En effet, la loi du 3 frimaire an VII (23.11.1798), après avoir posé, comme la loi actuelle, le principe de l'imposition de toutes les propriétés foncières, envisageait néanmoins une libération de l'impôt pour les immeubles répondant à des conditions bien précises. Cette exception était liée à des considérations d'intérêt général.
Par domaine national, l'on entend traditionnellement tout ce qui appartient à la généralité, tout ce qui est la propriété de la nation entière; ce principe est étendu aux émanations de celle-ci, par exemple les communes, y compris aux établissements publics, par exemple les CPAS.
L'improductivité consiste en l'inaptitude de l'immeuble à être l'objet d'une jouissance privative de la part du pouvoir public ou de l'établissement public qui en est propriétaire, non en raison de la nature intrinsèque du bien, mais de la destination qui lui est donnée. L'immeuble sera improductif, au sens de la loi fiscale, chaque fois et aussi longtemps qu'il sera affecté à un service d'utilité générale rentrant dans les compétences du pouvoir public ou la mission légale de l'établissement public auquel il appartient.
Ce service ne doit cependant pas être nécessairement gratuit. En d'autres termes, l'improductivité exigée ne doit pas être absolue. Il faut l'entendre dans le sens où l'immeuble ne permet pas à son propriétaire d'en tirer des revenus, par exemple par une location. Aussi est-il néanmoins permis de percevoir des recettes en rémunération de ce service[1], qu'il s'agisse de redevances à proprement parler ou, le cas échéant, de taxes rémunératoires[2].
En revanche, les propriétés de l'Etat, des provinces, des communes et des autres établissements publics, louées à des particuliers, en vertu d'un contrat consensuel et synallagmatique, par exemple un bail de résidence principale ou encore un bail à ferme, sont productives et, par conséquent, ne peuvent bénéficier de l'immunisation du précompte immobilier.
L'immeuble doit encore être réservé à un service d'utilité générale. Il doit donc être utilisé à des services qui sont mis en œuvre dans l'intérêt de la généralité des citoyens et qui profitent à la collectivité. Aussi, dès l'instant où le public est admis à jouir des avantages de l'institution, cette dernière condition est remplie; elle cesse d'exister et, par conséquent, le précompte immobilier est dû si l'admission constitue un privilège ou si elle est subordonnée à des distinctions qui ne seraient pas permises par la loi.
Il faut, en outre, que le service public ou d'utilité générale auquel l'immeuble est affecté relève des compétences du pouvoir public ou rentre dans la mission légale de l'établissement public auquel il appartient. Ainsi, en dehors de sa mission légale, l'établissement public cesse d'agir en tant qu'émanation du pouvoir et retombe dans le droit commun.
Le précompte immobilier étant établi sur le revenu cadastral tel que celui-ci est déterminé au 1er janvier de l'année d'imposition, c'est à cette date que l'immeuble en question doit réunir les conditions précitées pour bénéficier de l'immunité. Autrement dit, un immeuble pour lequel lesdites conditions viendraient à être remplies en cours d'année ne peut prétendre au bénéfice de l'immunité du précompte qu'à partir du 1er janvier de l'année qui suit la date où les conditions se trouvent réunies.
Et pratiquement, l'immunité du précompte immobilier doit être demandée dans les formes et délais prévus par les articles 366 et 371 CIR 1992, c'est-à-dire comme réclamation contre l'enrôlement à l'impôt sur les revenus, y compris donc l'impôt des personnes morales. Autrement dit, toute demande tendant à obtenir l'immunité du précompte immobilier adressée par les redevables à l'administration du cadastre en cours d'exercice fera l'objet d'un rejet.
[1] V. Sepulchre, Mémento de la fiscalité locale et régionale 2010, Waterloo, Kluwer, 2010, p. 215.
[2] Ibid., pp. 211-214.