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Mis en ligne le 1er Novembre 2007

Quelles sont les compétences et obligations respectives de la Région et des communes en matière d'entretien et de police de la voirie?

La gestion, l'entretien et la police de la voirie

Un grand principe gouverne la matière: "la gestion des voies publiques relève des autorités dans le domaine desquelles elles se trouvent et comporte aussi bien le pouvoir de décider - discrétionnairement - les mesures d'entretien et d'amélioration paraissant utiles que la charge des dépenses qui en résultent" [1].

Autrement dit, chaque gestionnaire de voirie est responsable de l'entretien de celle-ci, sauf convention contraire et sauf disposition légale ou réglementaire contraire. Par ailleurs, l'entretien s'entend dans un sens large: cela signifie aussi bien réaliser des travaux lourds et moyens (réfection des fondations, pose d'un nouveau revêtement, …), que réaliser les travaux de nettoyage et de dégagement nécessaires [2].

Le principe est affirmé par la doctrine [3], de même que par la jurisprudence de la Cour de Cassation [4].

Quant à la police de la voirie, "tendant […] à assurer sa conservation, sa viabilité et sa beauté, [elle] est aux mains à la fois de l'autorité gestionnaire et de la commune" [5].

Ainsi, "un pouvoir de police est reconnu [aux Régions] et aux provinces sur leurs voiries respectives, pouvoir de police qui est, en partie au moins, le corollaire de leur pouvoir de gestion" [6]. Ce pouvoir de police constitue par ailleurs une obligation, la Cour de Cassation ayant jugé à plusieurs reprises que les pouvoirs publics ont l'obligation de n'établir et ouvrir à la circulation que des voies suffisamment sûres [7].

En vertu de l'article 135, par. 2, de la nouvelle loi communale, la compétence de police des communes s'exerce quant à elle sur toutes les voiries traversant son territoire (sauf les autoroutes), y compris donc sur les voiries régionales. La commune doit alors prendre les mesures pour obvier à tout danger anormal. Néanmoins, ce principe de la compétence générale des communes en matière de police de la voirie n'enlève rien à ce que la Région et les provinces ne puissent, pour leur voirie propre, prendre des mesures de police [8]: "[la Région] et la province, qui n'ont pas la charge d'appliquer [NLC, art. 135, par. 2], ont pour la voirie dont [elles] ont la gestion les mêmes devoirs que les communes" [9].

Comme le rappelle le Ministre du Budget, des Finances, de l'Equipement et Patrimoine, "ce devoir [de police des communes] n'implique pas que les communes doivent entretenir la voirie en lieu et place de l'autorité gestionnaire. Elles n'ont pas une mission de gestion [relativement aux voiries régionales], mais de police" [10].

Par ailleurs, si la commune doit se substituer à la Région pour assurer une mission tenant à la gestion de la voirie régionale, elle pourra lui réclamer ses débours. La Cour de Cassation a en effet reconnu aux communes le droit de réclamer au gestionnaire le remboursement des frais engagés, indiquant qu' "il ressort des conclusions du demandeur [l'Etat] et des constatations du jugement que l'Etat reconnaissait la présence sur sa voirie de situations dangereuses qu'il n'avait pas suffisamment signalées et se bornait à invoquer qu'en effectuant les travaux qu'elle avait exécutés, la défenderesse [la commune] n'avait fait que remplir une obligation personnelle et se trouvait dès lors sans droit de lui réclamer les frais qu'elle avait exposés; […] ayant constaté que ces frais n'avaient été assumés que pour suppléer à la carence fautive du demandeur, le juge a légalement décidé, en se fondant sur l'article 1382 du Code civil, que l'action de la défenderesse était fondée" [11].

En pratique: la voirie et ses dépendances

Pour rappel, "les voiries publiques ne sont pas seulement constituées de la chaussée où s'effectue la circulation; elles se composent encore des dépendances de la route (accotements, fossés, berges ou talus, qu'ils soient naturels ou artificiels, aire de stationnement, signalisation, éclairage, équipements de sécurité, dispositifs antibruit, routes d'accès, ouvrages d'art, etc.) qui sont nécessaires à sa conservation" [12].

Il en va ainsi des trottoirs [13], au sujet desquels le Ministre en charge des pouvoirs locaux a d'ailleurs rappelé, en réponse à une question parlementaire, que "le maintien en bon état des voiries, en ce compris de leurs dépendances, dont les trottoirs, incombe à l'autorité qui en a la gestion", précisant par exemple que "la réalisation d'un trottoir le long d'une route provinciale incombe donc à la seule autorité provinciale" [14]. Le Ministre du Budget, des Finances, de l'Equipement et Patrimoine l'a encore récemment reprécisé: "L’entretien du domaine public appartient à l’autorité qui en a la gestion, […] la voirie englobant également […] les trottoirs, […] la Région devant entretenir les trottoirs et accotements qui ont été réalisés ou financés par elle ou par l’Etat pour la période préalable à la régionalisation" [15].

Qu'en est-t-il par ailleurs des carrefours constitués par le croisement d'une voirie régionale avec une voirie communale? Selon l'article L1223-1 du Code de la démocratie locale et de la décentralisation (ancien art. 274 NLC), le Gouvernement régional fixe la grande voirie dans la traversée des villes et des parties agglomérées des communes rurales. L'arrêté de "classement emporte attribution, à titre gratuit, de la propriété du sol de la voirie qui […] est transférée […] de la voirie communale à la voirie [régionale]" [16]. Et comme, "quand une [route régionale] traverse une place publique [communale], la place entière n'est pas assujettie au régime de la grande voirie, mais il n'y a que l'espace occupé par la largeur de cette route qui lui soit soumis" [17], l'on peut affirmer que lorsqu'une voirie régionale traverse une voirie communale, l'endroit de l'intersection appartient à la voirie régionale, sur la largeur de celle-ci. La loi relative à la police de la circulation routière le confirme en son article 3, par. 1er, 1°, eu égard à son objet, en indiquant que "le Ministre des Travaux publics [arrête] les règlements complémentaires relatifs aux voies publiques faisant partie de la grande voirie de l'Etat et aux carrefours dont une de ces voies publiques fait partie".

Le placement de la signalisation routière (y compris le marquage routier) relève des autorités légalement habilitées (A.R. 1.12.1975 portant règlement général sur la police de la circulation routière – C. de la route, art. 80.1.). La signalisation sur la voie publique incombe ainsi à l'autorité qui a la gestion de cette voie, sauf le placement des signaux qui imposent une obligation ou qui marquent une interdiction qui incombe quant à lui à l'autorité qui a pris la mesure (L. rel. à la police de la circulation routière, coord. par l'A.R. 16.3.1968, art. 13). Corollaire de cela, il est prévu que les charges résultant du placement, de l'entretien et du renouvellement de la signalisation incombent à celui qui a effectué le placement (L. coord. 1968, art. 17, par. 1er, al. 1er). Les charges de la signalisation placée en application de l'article 3, par. 2, des lois coordonnées de 1968 - soit la signalisation placée en vertu d'un règlement complémentaire de circulation routière adopté par le conseil communal notamment lorsque le Ministre en charge des travaux publics s'est abstenu de le faire - "peuvent être supportées en tout ou en partie par l'autorité qui a la gestion de la voie publique que le règlement complémentaire concerne" (L. coord. 1968, art. 17, par. 2). Comment comprendre cette dernière disposition? La réponse la plus logique à la lecture des textes, nous semble-t-il, est de dire que cette disposition vise seulement la signalisation qui est en principe placée et supportée par la commune, en tant qu'elle a pris la mesure (le règlement complémentaire), c'est-à-dire les signaux qui imposent une obligation ou qui marquent une interdiction. En effet, le placement de tous autres signaux appartient de toute façon au gestionnaire (L. coord. 1968, art. 13), de même que les charges qui en découlent (L. coord. 1968, art. 17, par. 1er, al. 1er).

Les communes sont propriétaires des égouts qu'elles ont construits et sont dès lors responsables de leur entretien. Cela comprend bien sûr les dépendances de l'égout que sont les taques et chambres de visites. En revanche, les avaloirs et les canalisations destinés à recueillir les eaux de ruissellement constituent des dépendances de la voirie qu'ils servent [18]. Il ne fait en effet aucun doute que ces dispositifs sont nécessaires à sa conservation. Aussi, leur entretien appartient au gestionnaire de la voirie concernée, en l'occurrence à la Région wallonne s'il s'agit de sa voirie. Et si, conformément à l'article 135, par. 2, de la nouvelle loi communale, la commune cure l'avaloir situé sur une voirie régionale ou provinciale parce que son mauvais entretien devient un danger pour la circulation, elle pourra réclamer ses débours à la Région ou à la province.

Le devoir d'entretien du gestionnaire de voirie vise également le déneigement et le sablage. Et à nouveau, en cas de carence de ce gestionnaire, la commune est tenue de prendre les mesures nécessaires pour obvier au danger, avec cependant le droit de réclamer le remboursement des frais engagés.

En conclusion

Il appartient à la Région de décider et de financer l'aménagement (trottoir, pistes cyclables, …) et l'entretien de ses voiries. Et si une quelconque mission d'entretien de la voirie régionale est mise à charge d'une commune, ce ne peut nécessairement être qu'en vertu d'une convention librement consentie.

La Région est en outre tenue de prendre sur ses voiries, en vertu de sa compétence de police, toutes les mesures destinées à les préserver et garantir la sécurité du passage sur celles-ci. Cela dit, les communes ont une obligation concurrente de sécurité sur ces mêmes voiries, puisqu'en vertu de la loi, elles sont les garantes de la sécurité sur toutes les voiries (sauf les autoroutes) qui traversent leur territoire. Mais dans ce cas, la commune pourrait prétendre récupérer auprès de la Région les frais engagés pour pallier l'inaction de cette dernière.

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  1. [Remonter] M.-A. Flamme, Droit administratif, t. II, Bruylant, Bruxelles, 1989, n° 435, pp. 1065-1066.
  2. [Remonter] S. Smoos, Responsabilité des communes en matière de voirie, Mouv. comm., 10/2005, p. 428.
  3. [Remonter] V. Bure, Les novelles, t. IV, Voirie et Construction, n° 204, p. 228; R. Wilkin, Voirie et alignement, Urbanisme et construction,Bruylant, Bruxelles, 1964, pp. 203-205; M.-A. Flamme, Droit administratif, op. cit., p. 1065.
  4. [Remonter] V. not Cass., 5.9.1969, Pas., 1969, I, p.
  5. [Remonter] M.-A. Flamme, op. cit., p. 1066.
  6. [Remonter] Flamme, Favresse, Chamart et Courtois, Droit administratif approfondi (la voirie), PUB, Bruxelles, 1971-1972, p. 8.
  7. [Remonter] Cass., 7.3.1963, Pas., 1963, I, p. 744; Cass., 9.10.1967, Pas., 1968, I, p. 174; Cass., 21.10.1993, Pas., 1993, I, p. 848; Cass., 26.5.1994, Pas., 1994, I, p. 513.
  8. [Remonter] S. Smoos, op. cit., p. 429.
  9. [Remonter] R. Wilkin, Voirie et alignement - Urbanisme et construction, Bruylant, Bruxelles, 1964, p. 204.
  10. [Remonter] Doc. parl., P.W., 2006-2007, CRAC n° 61 (Commission du budget), 12.2.2007.
  11. [Remonter] Cass., 1.2.1973, Pas., 1973, I, p. 525.
  12. [Remonter] D. Lagasse, Droit administratif spécial - Les domaines public et privé/La voirie, 11e éd., PUB, Bruxelles, 2002, pp. 166-167.
  13. [Remonter] Cass., 18.4.1910, Pas., 1910, I, p. 183.
  14. [Remonter] Réponse à la question n° 9 de Mme Saudoyer du 20.11.2001, Doc. parl., Q.R. P.W., 2001-2002, n° 2, pp. 45-46.
  15. [Remonter] Réponse à la question écrite n° 76 (2006-2007) de M. Brotcorne, disponible sur le site du P.W. à l'adresse http://parlement.wallonie.be/content/default.php?m=04&p=04-03-02&id_doc=12562.
  16. [Remonter] V. Genot, De la voirie publique par terre, 3e éd. du traité de Marcotty, Bruylant, Bruxelles, 1964, p. 132.
  17. [Remonter] Ibid., p. 120; ce même auteur ajoute, présentant une pratique d'actualité au moins à cette époque, que "c'est aujourd'hui l'Etat qui pourvoit à l'entretien des grandes routes et des ponts qui en font partie intégrante, aussi bien dans la traversée des villes que partout ailleurs" (p. 131).
  18. [Remonter] Liège, 14.12.1995, Rev. dr. comm., 3/1997, p. 148.

Annexes
Auteur Conseiller(e)(s) / personne(s) de contact
Voirie/travaux : Marie-Sophie Burton - Emmanuelle Jouniaux - Frédérique Witters
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Date de mise en ligne
1er Novembre 2007

Type de contenu

Q/R

Matière(s)

Voirie/travaux
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