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Mis en ligne le 29 Septembre 2008

En mai 2007, la Commune d’Etterbeek proposait, pour la première fois, à quelques citoyens candidats propriétaires, l’acquisition d'appartements et de maisons réaménagés par sa Régie foncière. Rien de bien particulier, me direz-vous? Et pourtant, l'acquisition se faisait ici sur base du droit de superficie exercé pour une durée limitée de 50 ans.

En d'autres termes, le futur propriétaire ne paie que l’espace habité sans devoir inclure dans son achat le prix du terrain et les droits d’enregistrement. Une véritable aubaine pour bon nombre de familles aux revenus faibles.

Une fois n'est pas coutume, le Mouvement communal est donc allé rencontrer une commune bruxelloise pour un projet facilement déclinable en Wallonie. Avec pour maître d'œuvre: Vincent De Wolf, Bourgmestre d'Etterbeek, mais également Professeur de droit de la propriété à l'université. Ceci expliquant sans doute cela…

M.C: Monsieur le Bourgmestre, comment vous est venue l'idée de monter un tel projet dans votre commune?

Vincent De Wolf: Tant en Wallonie qu'à Bruxelles, et dans les grandes villes certainement, le dicton "le Belge a une brique dans le ventre" a du plomb dans l'aile. Malheureusement, aujourd'hui, un couple actif qui perçoit de faibles revenus ne peut accéder aussi facilement qu'avant à la propriété. Avec un salaire mensuel de 2.400 euros à deux, alors qu'on utilise un tiers de son revenu pour rembourser un prêt immobilier, on emprunte aujourd'hui 150.000 euros sur 20 ans. Avec un tel budget, que peut-on décemment s'offrir? C'est la raison pour laquelle tant de gens optent plutôt pour la location. Enseignant la matière du droit de propriété à l'université depuis un certain nombre d'années, je me suis donc dit que le droit de superficie serait une solution.

Concrètement, comment fonctionne le droit de superficie?

Une loi fédérale de 1824 définit clairement ce qu'est le droit de superficie. La loi nous dit qu'il s'agit d'un droit réel qui consiste à posséder des bâtiments sur un fonds appartenant à autrui. Celui qui a le droit de superficie peut l'aliéner ou l'hypothéquer. Un crédit hypothécaire est donc possible. A l'expiration du droit, qui s'étend à 50 ans, la propriété des bâtiments retourne aux propriétaires du fonds. On sépare donc ainsi la propriété du sol et la propriété de ce qui est bâti sur le sol.

Vous pensez évidemment que c'est la commune qui doit, ici, être le propriétaire du sol?

Il n'y a, évidemment, aucun intérêt pour le propriétaire du sol en matière de spéculation immobilière. Seule une personne de droit public peut faire cela, c'est évident. Parce que ce n'est avantageux que pour l'acquéreur. Une personne de droit public qui est perpétuée reçoit une sorte d'anticipation de la valeur locative accumulée sur 50 ans. Elle le reçoit tout de suite et avec cela, elle peut entreprendre d'autres travaux de rénovation… Et 50 ans plus tard, elle récupère son bien qui aura été entretenu valablement. Rien n'est donc cependant perdu pour la commune.

Quels sont les avantages pour le citoyen acquéreur?

L'avantage pour le superficiaire, l'acquéreur du bâtiment, c'est de n'acheter que le bâtiment. Déjà, les droits d'enregistrement passent de 12,5 % à 0,2 %, c'est-à-dire pas grand-chose. De plus, le terrain n'est pas payé puisqu'il n'est pas vendu. Cela représente encore un gain substantiel. Enfin, on achète pour 50 ans, et non la perpétuité, ce qui fait encore une diminution de prix. Et donc, on arrive facilement à un achat envisageable dans une tranche de revenus moyens faibles. Complémentairement à la loi, nous avons créé un système propre à Etterbeek. L'acquéreur peut revendre ou louer le bien à des tiers après dix ans d'occupation. Mais pas à n'importe quel prix car il n'est pas question, ici, de s'enrichir sur le dos de la personne publique. Les propriétaires peuvent revendre au prix d'achat tel qu'indexé. Les personnes récupèrent donc exactement leur investissement. C'est une main qui est tendue vers les personnes à faibles revenus.

Avec quelques obligations tout de même, je suppose?

En effet, l'obligation de payer la redevance unique à la signature de la convention, d’habiter le bien personnellement pendant les 10 premières années, de conserver le bien et de l’entretenir en bon père de famille, de payer les charges fiscales qui grèvent le bâtiment et les frais de co-propriété pour l’appartement. Et, évidemment, l'obligation de restituer le bien à l’expiration du droit de superficie.

Il s'agit d'une conception de la propriété assez révolutionnaire…

Ce n'est évidemment pas habituel puisque, en droit, il s'agit plutôt de considérer que le propriétaire du sol est le propriétaire de ce qui y est bâti. Mais, c'est supplétif. On peut y déroger.

Comment expliquez-vous que personne n'ait eu la même idée que vous auparavant?

La loi est très peu connue car plutôt ancienne. Tant que, financièrement, chacun pouvait, sans difficultés, acquérir à perpétuité son logement, celle-ci n'avait aucun intérêt. Elle a donc, petit à petit, été oubliée. Mais aujourd'hui, cette loi est plus que jamais d'actualité. J'ai été le seul à y penser, sans doute… Mais, c'est parce que j'enseigne cette matière.

Cela a dû être le succès immédiat parmi la population d'Etterbeek?

C'est le moins que l'on puisse dire. Les habitants qui se sont intéressés au projet ont trouvé cela extraordinaire. Des gens ont dormi cinq nuits devant les bâtiments de la commune pour être sûrs de profiter des logements proposés. On a ainsi vendu des villas avec jardin, qui pouvaient se vendre à 450.000 euros, pour 230.000 euros. Des actes notariés ont été signés et enregistrés… Certaines personnes m'ont remercié personnellement car elles avaient un réel problème de logement. Le succès, chez nous, a donc été démontré.

Il vous a fallu énormément communiquer pour expliquer les droits et obligations des acquéreurs?

Evidemment, c'est toujours en âme et conscience: le propriétaire sait que ce n'est que pour 50 ans. Il doit donc envisager de terminer sa vie autrement. Ou il anticipe et envisage de revendre ou de louer son bien après 10 ans. Ce qui lui permet tout de même de récupérer son investissement. L'éventuel loyer, ajouté aux revenus, permet ensuite de faire un emprunt plus important et de devenir plein propriétaire. De plus, si on vient à décéder anticipativement, la propriété passe aux héritiers avec un droit de succession quasi nul. Mais, nous avons eu des personnes de 50 ans et plus qui ont acheté: elles seront donc propriétaires à vie.

Les autres communes, bruxelloises ou autres, se sont-elles intéressées à savoir comment fonctionnent ces dossiers?

Quand j'ai émis cette idée qui n'existe actuellement pas dans le système belge, les médias ont pas mal relayé l'information. Cela a donc intéressé pas mal de mes collègues, dans les communes wallonnes également. Il faut savoir que le droit de superficie peut également fonctionner pour un terrain non bâti, les communes pouvant décider simplement d'aider les citoyens à accéder à la propriété.

Vous tenez-vous à disposition des communes qui souhaiteraient en savoir plus?

Je tiens, en effet, mon dossier à disposition. Il suffit, pour toute commune, de le copier, tant au niveau des délibérations du conseil communal qu'aux actes qui ont été signés. Le dossier est clé sur porte. Il est gratuit et il est offert à tous, tous partis confondus. Je m'engage, pour ma part, à recevoir les personnes qui seraient intéressées par le projet.

Pour toute information complémentaire:
Régie foncière - Commune d'Etterbeek
Avenue d’Auderghem, 115-117, 1040 Bruxelles
Tél. : 02.627.26.56 - Fax: 02.627.26.60
E-mail:

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Date de mise en ligne
29 Septembre 2008

Auteur
Alain Depret

Type de contenu

Matière(s)

Logement
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