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Mis en ligne le 13 Juillet 2017

Notre commune souhaite louer un bâtiment à une entreprise. Le contrat sera-t-il soumis à la réglementation sur le bail commercial ?

La loi sur le bail commercial emporte des conséquences non négligeables sur le contrat. Elle impose par exemple que le contrat soit conclu pour 9 ans minimum, avec un droit de renouvellement octroyé au locataire et un encadrement spécifique en cas de fin prématurée du contrat par le propriétaire (paiement d’indemnité et/ou motifs déterminés).

Ces règles sont impératives et tendent à protéger le locataire. Par conséquent, des clauses dérogatoires, prévues dès l’entame du contrat, sont frappées de nullité relative. Pour les communes, on relèvera toutefois qu’une certaine jurisprudence tend à admettre que l’autorité locale puisse s’écarter de ces règles, en vertu de l’article 1712 du Code civil[1]. Compte tenu du peu de jurisprudence en la matière, il existe à notre sens une réelle incertitude quant au champ d’application exact de cet article. Si une commune souhaite écarter la loi sur le bail commercial, la prudence nous semble au minimum de se limiter à déroger à certaines dispositions particulières et, lors de la décision du conseil communal portant sur les conditions de la location, d’assurer une motivation adéquate de la décision quant aux raisons justifiant ces dérogations fondées sur l’article 1712 du Code civil.

Toutefois, même s’il est fait application de l’article 1712 du Code civil, la question de savoir si la règlementation sur le bail commercial est ou non applicable n’est pas dénuée d’intérêt. De manière générale, la loi du 30 avril 1951 relative à la matière s’appliquera dès que l’ensemble des conditions suivantes sont rencontrées.

Un bail

Tout d’abord, il faut qu’il y ait un bail. L’article 1709 du Code civil définit celui-ci comme « un contrat par lequel l'une des parties s'oblige à faire jouir l'autre d'une chose pendant un certain temps, et moyennant un certain prix que celle-ci s'oblige de lui payer ». Par conséquent, le paiement d’un prix est un élément essentiel en matière de bail. Une convention visant à mettre à disposition un bien à titre gratuit ne sera pas un contrat de bail, ni a fortiori un bail commercial.

Rappelons par ailleurs qu’un bien appartenant au domaine public ne peut faire l’objet d’un contrat de location en raison de son caractère inaliénable. L’octroi de droit privatif à un particulier se réalisera par le biais d’un permis de stationnement, d’une permission de voirie ou d’une concession domaniale[2].  

Enfin, le droit de jouissance peut dans certains cas être octroyé de manière provisoire et pour une durée généralement courte. Dans ce cas, il s’agira d’une occupation précaire et non d’un bail. Si cette voie est choisie, il conviendra d’être attentif au motif justifiant le recours à ce droit d’occupation précaire et ce, afin d’éviter toute requalification du contrat en bail commercial[3].

Portant sur un immeuble ou partie d’immeuble

Le bail doit porter sur un immeuble ou une partie d’immeuble. Comme le précise Henry De Page, « la notion de bail d’immeuble implique une forme de « localisation » des droits conférés au locataire »[4]. Aussi, il importe peu qu’il s’agisse d’un immeuble bâti ou non. Cette condition implique qu’il soit possible de localiser clairement le droit de jouissance octroyé dans le cadre de la location.

Affecté à un commerce de détail ou un artisanat

La règlementation sur le bail commercial ne vise pas tous les types de commerces. Seuls les biens dans lesquels le locataire exerce un commerce de détail sont visés. Le commerce de détail se caractérise essentiellement par l’offre de vente de biens ou de services à une clientèle privée, par des relations directes avec le consommateur. Le commerce de gros ou demi-gros n’est par contre pas visé. L’artisan quant à lui, peut être défini comme exerçant personnellement un art manuel, à l’opposé d’un industriel.

Pour bénéficier de la protection de règlementation, le commerce de détail ou l’artisanat doit impliquer un contact direct avec le public en général et ce, dans les lieux loués. Ainsi, cette condition ne sera pas rencontrée si le locataire ne propose ses services qu’à une clientèle spécialisée (les professionnels ou membres d’un club privé par exemple) ou si les ventes sont conclues dans un autre lieu de manière telle que le bâtiment ne sert que de dépôt ou de siège administratif.

Enfin, signalons que cette affectation doit être effective. Elle doit donc avoir lieu dans les faits.

Affectation à titre principal

Pour être soumis à la loi sur le bail commercial, l’affectation à un commerce de détail ou un artisanat doit avoir lieu à titre principal.

En cas d’affectation mixte, la question peut donc s’avérer délicate. Tel sera le cas si l’immeuble loué sert à la fois de logement et de commerce ou encore si le commerçant vend au détail et en gros. Dans cette hypothèse, une appréciation sera à réaliser au cas par cas afin de connaître quelle affectation prime sur l’autre. Cette appréciation tiendra en principe plus compte de l’intention dominante du locataire et de la situation effective que des surfaces ou nombre de pièce consacrées à chacune des activités.

Accord du bailleur

Enfin, l’accord du bailleur est nécessaire. Cet accord porte sur l’affectation commerciale ou artisanale du bien et non sur l’application ou non de la loi sur le bail commercial, cette dernière étant automatique dès que les différentes conditions sont rencontrées.

L’accord peut être donné soit dès l’entrée en jouissance (dans la majorité des cas), soit en cours de bail. A l’entame du bail, l’on admet la possibilité d’un accord tacite résultant des circonstances propres de l’espèce (le bien était affecté antérieurement à une activité commerciale, profession du locataire,…). En cas de contestation, le juge gardera un pouvoir d’appréciation entier quant à l’existence d’un tel accord tacite ou non.

Des exceptions…

Lorsque les conditions susmentionnées sont rencontrées, il y aura application des règles en matière de bail commercial et singulièrement de la loi du 30 avril 1951. Comme mentionné précédemment, l’article 1712 du Code civil autoriserait toutefois les autorités locales à apporter des dérogations à l’application de cette loi.

En outre, l’article 2 de la loi prévoit certaines exceptions spécifiques. Relevons entre autres et sous certaines conditions, le cas des baux normalement consentis pour une durée inférieure à un an (ex : dans le cas d’une exposition ou d’une foire) ou encore les baux portant sur des immeubles expropriés ou acquis pour cause d’utilité publique.

A l’inverse, même si l’ensemble des conditions susmentionnées ne sont pas rencontrées, les parties peuvent décider de soumettre la location à la règlementation sur le bail commercial. Dans ce cas, l’insertion d’une clause dans le contrat sera suffisante et permettra d’éviter, le cas échéant, des discussions futures quant à la satisfaction des conditions légales requises pour l’application de la règlementation sur le bail commercial.

 


[1] P. Blondiau, Les communes et l’application de la loi relative aux baux commerciaux… quelques éclaircissements, in Mouv. Comm., 12/2003, p. 449, inforum n°193.532.

[2] V. à ce sujet A. Ponchaut, Le point sur les occupations privatives du domaine public, 5/2010, www.uvcw.be

[3] V. à ce sujet l’article et le modèle : A. Ponchaut, Les occupations précaires, 2012, www.uvcw.be, inforum 270.105

[4] H. De Page, Traité, T.IV, 3éd., 1972, p.532.

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Date de mise en ligne
13 Juillet 2017

Type de contenu

Q/R

Matière(s)

Gestion du patrimoine
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