Prospection à l’aide d’un détecteur de métaux
Un citoyen souhaite prospecter à l'aide d'un détecteur de métaux sur un de nos terrains. Peut-il le faire ? Doit-on l’autoriser ? Qu'en est-il de la propriété de ses découvertes ?
Dans ce cas de figure, le particulier doit obtenir deux autorisations. La première émane de la région ; la seconde de la commune, en tant que propriétaire des lieux. Ensuite, le prospecteur qui découvre un objet sur le terrain d’autrui n’en deviendra pas propriétaire pour autant.
Développons ces différents aspects.
1. Autorisation du S.P.W.
L’utilisation d’un détecteur de métaux en Wallonie doit faire l’objet d’une autorisation régionale spécifique, visée aux articles D.80 et suivants du Code wallon du Patrimoine. Cette autorisation est délivrée par l’Administration du Patrimoine.
À défaut, l’utilisation d’un détecteur de métaux est interdite. Notons qu’il existe des exceptions à l’imposition d’une autorisation. C’est le cas notamment pour les professionnels dont l’activité nécessite l’utilisation de ce type de matériel, pour autant que l’activité ne soit pas liée à la recherche de biens archéologiques.
Une fois autorisée, la prospection ne peut se faire sur l’ensemble du territoire. Le détenteur d’une autorisation ne peut utiliser son matériel sur un bien classé ou assimilé, dans une zone de protection d'un bien classé ou assimilé, dans les périmètres de la carte archéologique ou encore sur un terrain qui fait l'objet d'un sondage archéologique ou de fouilles archéologiques (sauf accord préalable écrit) (art. D.81).
Par ailleurs, le détectoriste doit signaler son intention de prospecter à l’administration régionale, au plus tard trois jours ouvrables avant chaque prospection. Cette déclaration peut être effectuée en ligne.
2. Autorisation du propriétaire des lieux prospectés
L'autorisation régionale ne permet pas pour autant au détectoriste de prospecter sur les propriétés d’autrui. Une autorisation complémentaire sera requise.
En ce qui concerne les propriétés communales, nous pensons devoir distinguer les biens relevant du domaine public de ceux du domaine privé.
2.1 Domaine public
Les actions de prospection, au moyen d’un détecteur de métaux, constituent selon nous un usage privatif de l’espace public auquel il n’est pas initialement destiné. Il en sera d’autant plus ainsi, s’il est ensuite creusé dans le sol pour mettre à jour un objet enfoui. Une autorisation est donc requise.
Dans le cas d’une voirie communale, le défaut d’autorisation est érigé en infraction par le décret relatif à la voirie communale du 6 février 2014. Son article 60 prévoit et sanctionne « ceux qui, sans autorisation requise de l’autorité communale… utilisent la voirie communale d’une manière excédant le droit d’usage qui appartient à tous ». On relève que l’article 60 du décret vaut pour toutes les voiries communales, y compris celles existant sous la forme d’une servitude publique de passage.
Pour les autres lieux relevant aussi du domaine public (un parc communal, par exemple), on se référera au règlement général de police administrative (R.G.P.A.) de la commune en question. Celui-ci peut préciser dans quelle mesure ou sous quelle procédure l’autorisation doit être délivrée. Des sanctions administratives pourraient également être prises en cas de prospection sans autorisation.
L’emprise étant en principe limitée, c’est au bourgmestre qu’il appartient de délivrer l’autorisation. Sa décision est fondée sur les articles 133, alinéa 2, et 135, paragraphe 2, de la Nouvelle loi communale. Le bourgmestre dispose d’un pouvoir discrétionnaire et n’est donc pas obligé d’autoriser la prospection.
2.2 Domaine privé
L’accord de la commune reste requis si le terrain fait partie du domaine privé communal. Cet accord relève de la compétence du Collège communal, ce dernier étant chargé de l'administration des propriétés communales (art. L1123-23, 8° du CDLD).
L’autorité locale sera évidemment attentive à ne pas nuire aux droits qu’elle aurait éventuellement déjà octroyés sur le fonds (bien déjà donné à bail, par exemple) ou à obtenir l’accord de ces titulaires de droits. En tout état de cause, l’autorité reste libre de ne pas répondre favorablement à la demande de prospection.
On précisera que le Code civil consacre dorénavant l’existence de « simples tolérances du propriétaire ». Parmi celles-ci, l’article 3.67, alinéa 3, du code précise que « lorsqu'un immeuble non bâti et non cultivé n'est pas clôturé, quiconque peut s'y rendre, sauf si cela engendre un dommage ou nuit au propriétaire de cette parcelle ou si ce dernier a fait savoir de manière claire que l'accès au fonds est interdit aux tiers sans son autorisation ». Pour le législateur, « il ne s’agit dans ce troisième alinéa que de pouvoir se rendre temporairement (y passer, y flâner ou y jouer quelques heures) sur cet immeuble non bâti ni clôturé »[1]. Selon nous, l’utilisation d’un détecteur de métaux aux fins d’y rechercher des objets sur ou enfouis dans le sol d’un terrain non clôturé ne pourrait entrer dans le champ d’application de cette disposition. L’accord du titulaire de droits sur le fonds est donc indispensable.
L’Agence wallonne du Patrimoine met à disposition un modèle de convention d’accès à des propriétés et de dévolution du droit de propriété sur son site internet.
3. Propriété des trésors
Depuis le 1er septembre 2021, les règles liées à la propriété de choses enfouies ou cachées, anciennement dénommées « trésors », sont encadrées par les articles 3.58 et 3.59 du Code civil.
Si la chose découverte a encore un propriétaire (qu’il faut raisonnablement s’efforcer de trouver), elle continue à lui appartenir. Le prospecteur pourrait toutefois prétendre à une récompense raisonnable de sa part eu égard aux circonstances[2]. Dans les sept jours de la découverte, le détectoriste doit par ailleurs faire une déclaration de l’objet trouvé à la commune qui l’inscrira dans le registre des objets trouvés[3].
Lorsque la chose n’a pas de propriétaire, la situation est plus nuancée.
L’article 716 (aujourd’hui abrogé) de l’ancien Code civil prévoyait que la propriété revenait, pour moitié, à l’auteur de la découverte et, pour l’autre moitié, au propriétaire du fonds. Pour éviter la multiplication des chasses aux trésors, cette répartition ne valait que pour les découvertes fortuites. Tel n’est pas le cas en l’espèce, dans la mesure où le particulier recherche activement des objets, qui plus est au moyen d’un appareil spécifique. Dans ce cas, la propriété des trésors découverts sur le fond d’autrui appartenait exclusivement aux propriétaires de ce fonds[4].
Aujourd’hui, l’article 3.59, paragraphe 3, in fine, prévoit également une répartition de la propriété entre le trouveur et le titulaire de droits sur le fonds. Ce principe ne vaut que si la chose est trouvée « fortuitement », ratifiant ainsi l’évolution jurisprudentielle existante concernant l’article 716 abrogé[5]. Même si les nouvelles dispositions pourraient certainement être plus claires, nous pensons que l’ancienne règle doit prévaloir pour les objets découverts après prospection : la propriété revient au titulaire de droits sur le fonds. Le détectoriste ne pourrait prétendre à aucun droit de propriété sur les biens qu’il trouve, sauf accord contraire trouvé avec le titulaire de droits sur le fonds en question.
[1] Prop. de loi portant insertion du Livre 3 « Les biens » dans le nouveau Code civil, Commentaire des articles, Doc. parl., Ch. repr., sess. extr. 2019, n°0173/001, p.168.
[2] C. civ., art. 3.59, par. 4.
[3] C. civ., art. 3.58.
[4] J. Hansenne, Les biens – Précis, T. I, 1996, p. 230, n°217.
[5] N. Bernard, Le droit des biens après la réforme de 2020, Anthémis, 2020, p. 374.