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Mis en ligne le 21 Novembre 2024

Le régime juridique des cours d’eau est enfin complet 

Attendu depuis longtemps, l’arrêté du Gouvernement wallon du 23 mai 2024 portant exécution du décret du 4 octobre 2018 modifiant divers textes, en ce qui concerne les cours d'eau a été publié au Moniteur belge du 19 novembre 2024 et entrera en vigueur le 29 novembre 2024. Cet arrêté vient (enfin) exécuter la partie décrétale du Code de l’eau relative aux cours d’eau qui avait opéré en 2018 une refonte complète du régime organisé par la loi du 28 décembre 1967 relative aux cours d’eau non navigables.

Le nouvel arrêté vient donc remplir, par l’insertion des articles R.57 à R.89/22, les nombreux vides juridiques qui existaient dans la partie réglementaire du Code de l’eau notamment en ce qui concerne la procédure d’autorisation domaniale ou bien encore les règles de police concernant les cours d’eau non classés.

Travaux d’entretien et de petite réparation

L’article D.37, §2 du Code de l’eau prévoit que les gestionnaires de cours d’eau (pour rappel, les communes sont gestionnaires des cours d’eau de troisième catégorie) doivent exécuter les travaux d'entretien et de petite réparation, conformément à un règlement général sur les cours d'eau non navigables arrêté par le Gouvernement.

L’arrêté du Gouvernement vient donc apporter des précisions sur la manière de réaliser ces travaux d’entretien et de petite réparation. L’article R.61 du Code de l’eau prévoit ainsi que les gestionnaires doivent procéder au moins une fois tous les six ans à la visite des cours d'eau non navigables. Cette visite a pour objet de :

  • déterminer les cours d'eau ou parties de cours d'eau sur lesquels des travaux d'entretien et de petite réparation sont à exécuter ;
  • déterminer le type de travaux à exécuter ;
  • planifier les travaux à exécuter ;
  • identifier les travaux qui sont occasionnés ou aggravés soit par l'usage du cours d'eau par des personnes de droit privé ou public, soit par la présence d'ouvrages appartenant à des personnes de droit privé ou public.

Il est également prévu que les gestionnaires doivent se concerter préalablement à la réalisation des travaux d’entretien et de petite réparation avec le Département de la Nature et des Forêts du SPW Agriculture, Ressources naturelles et Environnement, conformément aux nouveaux articles R.79 et suivants du Code de l’eau (voir plus loin). Cela s’ajoute, pour les communes, à l’avis préalable de la Province concernée.

Enfin, l’article R.63 du Code de l’eau liste les travaux d’entretien et de petite réparation qui peuvent être réalisés par des personnes autres que les gestionnaires et fixe la procédure de déclaration préalable applicable dans ce cas (voir art. D. 37, § 3 du Code de l’eau).

Procédure d’autorisation domaniale

Pour rappel, l’article D.40 du Code de l’eau soumet à autorisation domaniale préalable et écrite du gestionnaire tous les travaux tels qu'approfondissement, élargissement, rectification et généralement toutes modifications sous, dans ou au-dessus du lit mineur du cours d'eau non navigable ou des ouvrages y établis, ainsi que la suppression ou la création de tels cours d'eau.

La procédure d’autorisation domaniale délivrée sous forme d’acte unilatéral se voit enfin précisée à l’article R.65 du Code de l’eau. On peut ainsi y lire notamment que le gestionnaire doit statuer sur le caractère complet de la demande, dans un délai de trente jours à dater du jour où il reçoit la demande et qu’il doit également se concerter avec le DNF conformément aux articles R.79 et suivants du Code de l’eau (voir plus loin). La délivrance de l’autorisation domaniale doit également faire l’objet d’un avis affiché à proximité du lieu concerné et aux endroits habituels d’affichage.

Les droits et obligations découlant de l’autorisation domaniale ainsi que la procédure de modification ou de suspension de celle-ci sont également précisés aux articles R.66 et suivants du Code de l’eau.

Acte et travaux dans les 6 mètres de la crète de berge

L’arrêté introduit une disposition très impactante pour les gestionnaires et les riverains de cours d’eau par le biais d’un article R.89/2 qui prévoit qu’à  moins de six mètres de la crête de berge d'un cours d'eau non navigable ou non classé, il est interdit de construire, placer des installations fixes ou mobiles, de reconstruire, transformer une construction existante, réaliser un dépôt de quelques produits, matériels ou matériaux que ce soit ou modifier sensiblement le relief du sol, sans l'autorisation préalable du gestionnaire.

On peut remarquer que la liste des actes et travaux soumis à cette nouvelle autorisation est extrêmement large de sorte qu’ils sont presque tous visés. Cela nous semble disproportionné et à rebours de la volonté de simplification administrative, d’autant plus que ces actes et travaux seront souvent également soumis à permis d’urbanisme. Il est heureusement prévu que le ministre ayant les cours d'eau non navigables dans ses attributions peut établir la liste des constructions et installations dispensées de cette autorisation. Il est souhaitable que cette liste sorte au plus vite.

Au niveau procédural on retiendra que la demande d’autorisation doit être faite au moyen d’un formulaire arrêté par le ministre et que la décision du gestionnaire doit être notifiée dans les cent vingt jours à partir du premier jour suivant la réception de la demande ou ses compléments. A défaut, elle est censée être refusée.

Régime des cours d’eau non classés

C’est la province qui est désignée gestionnaire des cours d’eau non classés et qui délivre les autorisations y relatives telles que les autorisations domaniales (art. R76) ou les autorisations visées à l’article R.89/2.

Les propriétaires riverains de cours d’eau non classés sont tenus par l’article R.72 du Code de l’eau d’exécuter certains travaux d'entretien et de petite réparation, uniquement lorsque la sécurité des biens et des personnes l'exige et en veillant à ne pas endommager le bon état ou le bon potentiel écologique du cours d'eau non classé. Ces travaux sont les suivants :

  • l'enlèvement des, branches, buissons, broussailles et plantes quelconques croissant dans le lit mineur, lorsqu'ils entravent l'écoulement naturel des eaux et sans modifier le lit de ce cours d'eau, ainsi que l'élimination des plantes invasives ;
  • l'enlèvement des atterrissements, dépôts quelconques ou tout objet étranger, ainsi que les terres éboulées, sans modification du lit mineur ;
  • le curage sous les ponts et les parties voûtées ;
  • la réparation et la protection des berges affaissées et des digues au moyen de matériaux appropriés, ainsi que le recépage des buissons et arbustes y croissant lorsqu'ils entravent l'écoulement naturel des eaux.

Les travaux doivent être réalisés par les propriétaires riverains le long de leurs héritages respectifs et sur la moitié de la largeur des cours d'eau non classés dans le cas où le cours d'eau fait la séparation entre deux fonds, à leur frais.

Pour le reste, les cours d’eau non classés font l’objet de dispositions similaires à celles relatives aux cours d’eau classés en ce qui concerne les pouvoirs du gestionnaire.

Concertation obligatoire

Comme mentionné plus haut, une concertation obligatoire du gestionnaire avec le DNF est prévue par l’article R.79 du Code de l’eau pour l’exécution des travaux d’entretien et de petite réparation (sauf pour certains travaux listés dans l’article), pour la délivrance des autorisations domaniales, pour l'exécution de travaux par le gestionnaire autres que ceux d'entretien et de petite réparation ainsi que pour la circulation ou l'organisation de la circulation de véhicules qui ne sont pas destinés à la navigation, sur les berges, les digues et dans le lit mineur des cours d'eau, ainsi que dans tous les passages à gué, soumise à autorisation préalable en vertu de l'article 58bis de la loi du 12 juillet 1973 sur la conservation de la nature.

Le gestionnaire doit également se concerter avec le Département de l'Environnement et de l'Eau du SPW ARNE (DEE) dans les cas suivants :

  • l'exécution de travaux soumis à autorisation domaniale préalable en vertu de l'article D.40 du Code de l’eau
  • l'exécution de travaux par les gestionnaires des cours d'eau de 2e et 3e catégories autres que ceux d'entretien et de petite réparation visés à l'article D.37, § 1er du Code de l’eau

Il est toutefois précisé qu’il ne doit y avoir concertation avec le DEE que lorsque les travaux sont de nature à créer une ou plusieurs nouvelles modifications des caractéristiques physiques d'un cours d'eau, susceptibles de détériorer ou d'empêcher l'atteinte du bon état ou bon potentiel écologique d'une masse d'eau de surface de manière permanente et durable.

Tant la concertation avec le DNF qu’avec le DEE ne doit pas être organisée dans deux hypothèses :

  • lorsqu'il s'agit d'actions planifiées dans le cadre d'un PARIS visé à l'article D. 33/4 du Code de l’eau, pour autant que ces actions soient suffisamment détaillées quant à leur période de réalisation ou d'exécution, à leur localisation, à leur durée, à leur modalité d'exécution et à leur ampleur.
  • en cas d'intervention urgente en raison d'un évènement soudain et imprévisible qui pourrait causer des dommages aux personnes ou aux biens en l'absence d'une prompte réaction. Dans ce cas, le gestionnaire concerné avertit dès que possible le DNF de sa localisation et des actions envisagées en urgence.

La concertation, lorsqu’elle doit être organisée, consiste en une demande d’avis dont les modalités sont déterminées à l’article R.80 du Code de l’eau et peut impliquer une visite de terrain avec le DNF dans les hypothèses visées à l’article R.81 du même code (demande du gestionnaire ou du DNF,  autorisation domaniale ou application de l’article 58bis de la LCN)  .

L’avis rendu par le DNF ou le DEE est un avis simple, ce qui signifie que le gestionnaire peut aller à l’encontre de celui-ci moyennant, lorsque l’avis est sollicité dans le cadre de l’octroi d’une autorisation, motivation spécifique. Aucun recours administratif n’est organisé contre la décision du gestionnaire d’exécuter des travaux contre l’avis du DNF ou du DEE même si cette pratique cadre peu avec le principe d’une gestion intégrée des cours d’eau.

L'avis du DNF ou du DEE doit être envoyé dans les quinze jours à dater du premier jour ouvrable qui suit l'envoi de la demande d'avis par voie électronique, sauf lorsqu’une visite de terrain est organisée (dans ce dernier cas, l’avis doit être envoyé dans les 8 jours de la visite de terrain). A défaut, l'avis est réputé favorable.

Mesures de police applicables aux cours d’eau non navigables et non classés.

L’article R.82 du Code de l’eau fixe les règles de police applicables aux cours d’eau non classés de façon assez similaire à ce que fait l’article D.408 du Code de l’eau pour les cours d’eau non navigables.

Les articles R.83 et suivants du Code de l’eau fixent ensuite les mesures de police qui sont communes aux cours d'eau non navigables et aux cours d'eau non classés. On y retrouve plusieurs mesures issues de l’arrêté royal du 5 août 1970 portant règlement général de police des cours d'eau non navigables. Plusieurs des mesures qui y sont définies permettent une application complète de l’article D.408 du Code de l’eau (voir le §1er , 6°, e, f,g,h et i de cet article).

Nous n’examinerons pas en détail ces mesures de police et renvoyons le lecteur aux articles susmentionnés.

On citera néanmoins, outre l’obligation d’autorisation du gestionnaire pour les travaux effectués dans les 6 mètres de la crète de berge dont on a déjà parlé plus haut, l’obligation pour les prélèvements saisonniers d'eau dans les cours d'eau non navigables ou non classés d’être exécutés en vertu d'un droit de riveraineté et de faire l'objet d'une déclaration préalable auprès du gestionnaire. Le gestionnaire peut imposer des conditions d’exécution par le biais de la déclaration et cette déclaration doit être renouvelée tous les 6 ans.

La déclaration n’est toutefois pas obligatoire pour les prélèvements réalisés par toute personne disposant d'un droit de riveraineté, pour des besoins domestiques (n’est pas un besoin domestique le remplissage de piscine, le lavage de voiture ou l’arrosage de pelouse), ou pour l'abreuvement du bétail au moyen de tout dispositif placé dans une prairie traversée ou bordée d'un cours d'eau et permettant l'abreuvement du bétail sans accès du bétail au cours d’eau.

On citera également les articles R.84 et R.85 du code qui fixent les conditions régissant l’installation d’un rejet d’eau ou d’une prise d’eau non potabilisable et non destinée à la consommation humaine dans un cours d’eau non navigable ou non classé et qui doivent être prises en considération dans le cadre de la délivrance d’autorisations.

Formulaires

On relèvera qu’à l’heure d’écrire ces lignes, les différents formulaires à arrêter par le Ministre ayant les cours d’eau dans ses attributions (formulaire de demande d’autorisation domaniale, formulaire de demande d’autorisation pour les travaux réalisés dans les 6 mètres de la crète de berge d’un cours d’eau, formulaires de déclaration, etc.) ne sont toujours pas disponibles ce qui crée des difficultés pour l’application de plusieurs dispositions.

Subsides

Un subventionnement est prévu aux articles R.89/5 et suivants du Code de l’eau dont les montants sont fixés comme suit :

  • quatre-vingt pour cent du montant total de la dépense à subventionner pour les travaux prévus à l'article D. 54/1, 3° et 6° du code (l'amélioration hydraulique et la restauration hydromorphologique de cours d'eau non navigables;  les ouvrages et aménagements visant à améliorer les habitats aquatiques et notamment l'aménagement de passes à poisson) ;
  • soixante-cinq pour cent du montant total de la dépense à subventionner pour les travaux prévus à l'article D. 54/1, 1°, du code (la construction, l'agrandissement et la transformation de stations de pompage nécessités par des travaux entrepris à l'initiative de la Région) ;
  •  quarante-cinq pour cent du montant total de la dépense à subventionner pour les travaux prévus à l'article D.54/1, 2°, 4° et 5°, du code (la construction, le renforcement et le rehaussement de digues le long de voies hydrauliques ou de cours d'eau non navigables; la construction, l'agrandissement et la transformation de stations de pompage pour l'évacuation des eaux de terres agricoles ; la création de réserves d'eau d'intérêt agricole) ;
  • trente-cinq pour cent du montant total de la dépense à subventionner pour les travaux prévus à l'article D.54/1, 7°, du code (la création et l'amélioration de réseaux d'assainissement agricole au moyen de tuyaux de drainage ou de fossés).

Nous renvoyons à ces articles pour la procédure de subventionnement.

Ajout de nouvelles rubriques de classement :

L’annexe 1 de  l’arrêté du Gouvernement wallon du 4 juillet 2002 arrêtant la liste des projets soumis à étude d’incidences, des installations et activités classées ou des installations ou des activités présentant un risque pour le sol est modifiée pour compléter la rubrique 40.10.01.05 d’une classe 3 (centrale hydroélectrique d’une puissance inférieure à 0,01 MW électrique) et pour ajouter une nouvelle rubrique 41.00.05 pour les prises d’eau permanentes de surface non potabilisables, non destinées à la consommation humaine.

Agents constatateurs provinciaux :

La partie réglementaire du Code de l’environnement est complétée par un article R.105/1 pour permettre aux Conseils provinciaux de désigner des agents constatateurs provinciaux chargés de rechercher et constater les infractions en matière de cours d’eau non navigables et non classés (art. D.408 et R.83 du Code de l’eau). Le nouvel arrêté crée ainsi une nouvelle catégorie d’agent constatateur environnemental.

Auteur Conseiller(e)(s) / personne(s) de contact
Environnement : Arnaud Ransy - Christel Termol - Marie-Sophie Burton - Emmanuelle Jouniaux - Frédérique Witters - Matteo Gastout
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Assemblée générale UVCW 2025

Date de mise en ligne
21 Novembre 2024

Auteur
Arnaud Ransy

Type de contenu

Matière(s)

Environnement
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