Le congé politique des mandataires locaux
Le congé politique des mandataires locaux est réglé différemment selon que le mandataire travaille dans le secteur privé ou le secteur public.
La durée du congé politique ne correspond pas au temps que l'élu local consacre à son mandat mais au temps qu'il y consacre pendant ses heures de travail. C'est pourquoi le congé politique ne concerne que les fonctionnaires et les travailleurs salariés.
1. Le secteur public
Le congé politique des membres du personnel des services publics est régi par la loi du 18 septembre 1986[1].
Cette loi, sensiblement modifiée par la loi du 4 mai 1999 visant à améliorer les congés politiques des mandataires locaux[2], a également subi d'importantes modifications, notamment en ce qui concerne son champ d'application, par une loi du 4 février 2003[3].
Telle que modifiée, la loi ne s'applique plus au personnel communal.
Saisie pour avis sur le projet de loi modifiant la loi de 1986 précitée, la section législation du Conseil d'Etat a, à juste titre, souligné l'impact de la loi du 13 juillet 2001 (entrée en vigueur, en grande partie, le 1.1.2002) portant transfert de diverses compétences aux Régions et aux Communautés et fait remarquer que : « (…) le législateur n'est plus compétent pour adopter des dispositions relatives au congé politique des membres du personnel des provinces et des communes, (…). La modification de la loi du 18 septembre 1986 instituant le congé politique pour les membres du personnel des services publics ne peut dès lors concerner ces membres du personnel »[4].
En outre, le Conseil d'Etat précisa : « Ce qui implique que le texte actuellement en vigueur de cette loi doit subsister pour ces membres du personnel et ne peut être modifié ou remplacé que par les Régions en ce qui les concerne ».
Il en résulte que, aussi longtemps que le législateur régional ne réglemente pas la matière, la situation des mandataires locaux qui sont également des membres du personnel local continue à être régie par la loi de 1986 dans sa version antérieure à la modification intervenue en 2003[5]. Pour ce qui concerne les mandataires locaux qui sont fonctionnaires au sein d'une autorité publique autre que locale, c'est cependant la loi de 1986 dans sa version actuelle (telle que modifiée, notamment, en 2003) qui est d'application.
Le texte qui est donc applicable aux mandataires locaux wallons prévoit que les congés peuvent être pris de manière fractionnée (minimum 1 heure) afin de pouvoir s'absenter pour signer un acte ou participer à une réunion sans devoir prendre nécessairement toute une journée de congé.
En outre, les personnes travaillant à temps partiel ont également droit à un congé politique.
En ce qui concerne les travailleurs de la fonction publique, ils peuvent désormais consacrer au moins un jour par semaine (en volume global) à l'exercice de leur mandat exécutif, quelle que soit la taille de la commune, puisque le volume de travail ne décroît pas proportionnellement au nombre de la population.
La situation se présente comme suit[6]:
|
Bourgmestre |
Echevin/ Président de CPAS |
Conseiller communal/ Conseiller de l'action sociale[7] |
Dispense de service |
2 jours/mois |
||
Congé facultatif |
- jusqu'à 30 000 h.: - 30 001 – 50 000 h.: |
- jusqu'à 30 000 h. : - 30 001 – 50 000 h. : - 50 001 – 80 000 h.: |
- jusqu'à 80 000 h. : - plus de 80 000 h. : |
Congé d'office |
- jusqu'à 20 000 h. : - 20 001 – 30 000 h. : - 30 001 – 50 000 h. : - plus de 50 000 h. : |
- jusqu'à 20 000 h. : - 20 001 – 30 000 h. : - 30 001 – 50 000 h. : - 50 001 – 80 000 h. : - plus de 80 000 h. : |
Pour rappel, la dispense de service n'a aucune incidence sur la situation administrative et pécuniaire du fonctionnaire, tandis que les congés politiques d'office et facultatifs ne sont pas rémunérés.
Contrairement au régime applicable aux membres du personnel du secteur privé (v. infra), il n'existe aucun mécanisme de récupération, par l'employeur du fonctionnaire, de la rémunération qu'il a octroyée à ce dernier pendant les journées où une dispense de service a été accordée.
2. Le secteur privé
Les règles de ce congé sont contenues dans la loi du 19 juillet 1976[8], qui fut profondément modifiée par une loi du 23 mars 2001[9].
Depuis lors, les travailleurs du secteur privé qui sont bourgmestre, échevin ou président du conseil de l'action sociale ont le droit de s'absenter de leur travail pendant un maximum de 2 jours de travail par semaine.
Il est également prévu la possibilité pour les bourgmestres, échevins et présidents de CPAS de suspendre complètement l'exécution de leur contrat de travail pendant la durée du mandat[10].
Le texte de la loi étant ambigu, le caractère non rémunéré de ce congé était sujet à controverses.
Sur base des travaux préparatoires, la Ministre de l'Emploi de l'époque a clarifié la situation en précisant que, « pour les mandats exécutifs, il s'agit bien d'un congé sans solde »[11].
Il n'est donc plus question pour les employeurs de réclamer aux autorités locales un quelconque remboursement.
En revanche, les conseillers communaux, les conseillers de l'action sociale et les membres du bureau permanent continuent à bénéficier d'un congé rémunéré, qui varie en fonction de la taille de la commune, de 0,5 à 2,5 jours par mois[12] (v. le tableau ci-après). Dès lors, l'employeur peut toujours, mais pour ces mandats uniquement, réclamer à l'autorité locale le montant du salaire et des cotisations patronales.
|
Conseillers communaux/Conseillers de l'action sociale |
Membres du bureau permanent du CPAS |
Moins de 10 000 habitants |
½ jour par mois |
1 jour par mois |
10 000 à 50 000 habitants |
1 jour par mois |
2 jours par mois |
50 001 habitants et + |
1 jour par mois |
2½ jours par mois |
Le montant qui peut être réclamé par l'employeur privé en vertu des dispositions évoquées ci-dessus est limité à ce que cet employeur a effectivement dû supporter pour les jours non prestés.
Il s'agit donc de la rémunération brute (100 %) augmentée des cotisations patronales. L'arrêté royal du 22 février 1977[13] stipule que cette rémunération est calculée conformément à la législation relative aux jours fériés. Cette rémunération est toutefois limitée à la rémunération plafonnée prescrite par le régime d'assurance obligatoire contre la maladie et l'invalidité (secteur des indemnités), le plafond journalier en vigueur depuis le 1er août 2022 est de 164,0651 euros en régime 6 jours/semaine, et de 196,8781 euros en régime 5 jours/semaine.
Finalement, le montant qui pourra être réclamé par l'employeur privé sera de l'ordre de 140 à 150 % de la rémunération brute (dans le respect du plafond précité) pour les jours de prise de congé politique, ce montant variant en fonction des cotisations patronales spéciales que l'employeur est amené à supporter dans certaines hypothèses particulières.
Conformément à l'arrêté royal du 31 mai 1977[14], l'autorité locale récupère ensuite la somme remboursée à l'employeur privé auprès du conseiller ou du membre du bureau permanent, mais cette récupération est limitée à la moitié de la totalité des jetons de présence perçus par le conseiller ou membre du bureau permanent sur une année.
3. Les enseignants
Les enseignants ne relèvent ni du champ d'application de la loi de 1986, ni de celle de 1976. Quel que soit le réseau concerné, ils se voient appliquer les dispositions portées par l'arrêté royal du 15.1.1974[15] et explicitées par la circulaire du 23.3.2007[16].
4. Les militaires
Le congé politique des mandataires locaux qui sont militaires est modalisé par l’arrêté royal du 20 décembre 2018[17], pris en exécution de la loi du 28 février 2007[18].
[1] L. 18.9.1986 instituant le congé politique pour les membres du personnel des services publics, M.B., 31.10.1986.
[2] M.B., 28.7.1999.
[3] L. 4.2.2003 mod. diverses dispositions en matière de congé politique pour les membres du personnel des services publics, M.B., 19.2.2003.
[4] Projet de loi mod. la L. 18.9.1986 instituant le congé politique pour les membres du personnel des services publics, avis de la Section de Législation du Conseil d'Etat, Doc. parl., Ch., sess. ord. 2001-2002, n° 1573/005, p. 4.
[5] Au moment où nous écrivons ces lignes, aucune réglementation régionale n'a modifié la L. 18.9.1986 dans sa version antérieure aux modifications apportées au texte, dans sa version fédérale, en 2003.
[6] Signalons en outre que, en vertu de l'art. 9 de la L. 18.9.1986, les bourgmestres, échevins et présidents de CPAS qui bénéficient d'un congé politique n'excédant pas la moitié d'un emploi à temps plein peuvent, à leur demande, obtenir un congé politique à mi-temps ou à temps plein. Quant aux mandataires exécutifs qui bénéficient déjà d'un congé politique à mi-temps, ils peuvent, toujours en vertu de l'art. précité, solliciter un congé politique à temps plein.
[7] Les membres du bureau permanent ont droit, en leur qualité de membre du conseil de l'action sociale, à 2 jours de dispense de service par mois. Ils ont également droit à des congés facultatifs (1 ou 2 jours/mois jusqu'à 10 000 h. ; 1, 2 ou 3 jours/mois de 10 001 à 20 000 h. ; 1, 2, 3, 4 ou 5 jours/mois pour une population de plus de 20 000 h.).
[8] L. 19.7.1976, instituant un congé pour l'exercice d'un mandat politique, M.B., 24.8.1976.
[9] Cette loi a notamment eu pour effet de mettre fin à l'exclusion des mandataires des communes de plus de 50 000 habitants du champ d'application de la L. 19.7.1976. Cette exclusion était prévue par l'A.R. 15.12.1977 rel. au champ d'application de la L. 19.7.1976 instituant un congé pour l'exercice d'un mandat politique, qui exécutait l'ancien art. 2, par. 2, de la loi de 1976. Cet art. 2, par. 2, ayant été modifié en 2001, l'A.R. précité perdait sa base légale, comme ce fut confirmé par les travaux préparatoires de la L. 23.3.2001 (v. Prop. de L. mod. la législation rel. au congé pour l'exercice d'un mandat politique (…), Doc. parl., Ch., sess. ord. 2000-2001, n° 1010/001, p. 5.).
[10] L. 19.7.1976, art. 4bis.
[11] Q.R. Ch., 18.10.2001, 2001-2002, Com. 558, 22-23.
[12] A.R. 28.12.1976 rel. à la durée et aux conditions d'utilisation du congé accordé par la L. 19.7.1976 instituant un congé pour l'exercice d'un mandat politique, M.B., 31.12.1976.
[13] A.R. 22.2.1977 fixant le montant de la rémunération normale des travailleurs qui bénéficient d'un congé politique, M.B., 28.4.1977.
[14] A.R. 31.5.1977 d'exécution de l'art. 4 de la L. 19.7.1976 instituant un congé pour l'exercice d'un mandat politique, M.B., 2.7.1977.
[15] A.R. pris en application de l'art. 160 de l'A.R. 22.3.1969 fixant le statut des membres du personnel directeur et enseignant, du personnel auxiliaire d'éducation, du personnel paramédical des établissements d'enseignement gardienne, primaire, spécialisé, moyen, technique, artistique et normal de l'Etat, des internats dépendant de ces établissements et des membres du personnel du service d'inspection chargé de la surveillance de ces établissements, M.B., 26.2.1974, http://www.gallilex.cfwb.be/document/pdf/01608_003.pdf
[16] Circ. n° 1810 du 23.3.2007, Congé pour l’exercice d’un mandat politique de bourgmestre, d’échevin, de conseiller communal, de président du conseil de l’aide sociale, de membre du conseil de l’aide sociale, de conseiller provincial ou de membre de la députation permanente d’un conseil provincial,http://www.adm.cfwb.be/upload/docs/1997_20070326112537.pdf
[17] AR 20.12.2018 rel. au congé politique des militaires, MB 22.1.2019.
[18] L. 28.2.2007 fixant le statut des militaires et candidats militaires du cadre actif des Forces armées, MB 10.4.2007.

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