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Mis en ligne le 13 Juillet 2010

Les villes et communes sont confrontées à de nombreux problèmes en ce qui concerne la consommation d'alcool: consommation en rue par des mineurs d'âge, présence d'alcool dans des distributeurs automatiques, vente d'alcool à des mineurs, etc. Ces différents comportements font apparaître des troubles au niveau de la tranquillité, de la salubrité publiques et même en matière de sécurité publique.

Il est dès lors intéressant d'examiner le pouvoir des communes en la matière. Doivent-elles tout accepter? Peuvent-elles tout interdire? Existe-t-il des législations spécifiques concernant l'alcool?

Vente et consommation d'alcool

Il convient, avant toute chose, de rappeler les principes légaux.

Ainsi, l'article 6 de la loi du 24 janvier 1977 relative à la protection de la santé des consommateurs en ce qui concerne les denrées alimentaires et les autres produits (M.B. 08.04.1977) énonce qu'il est interdit de vendre, de servir ou d'offrir toute boisson ou produit ayant un titre alcoométrique acquis supérieur à 0,5 % vol aux jeunes de moins de seize ans.

Il est prévu qu'on peut demander à toute personne qui entend acquérir des boissons ou d'autres produits à base d'alcool de prouver qu'elle a atteint l'âge de seize ans.

Concernant les alcools plus forts, la loi prévoit qu'il est interdit de vendre, de servir ou d'offrir des boissons spiritueuses aux jeunes de moins de dix-huit ans.

Comme pour les alcools moins forts, on peut également exiger de toute personne qui entend acquérir ce type de boissons de prouver qu'elle a atteint l'âge de dix-huit ans.

Ainsi, la vente et l'offre d'alcool fort (spiritueux) sont interdites aux mineurs d'âge; par ailleurs, la vente et l'offre d'alcool ayant un titre alcoométrique acquis supérieur à 0,5% vol est interdite pour les mineurs d'âge de moins de 16 ans.

Remarquons qu'une commune ne peut pas interdire purement et simplement la vente d'alcool dans tous les commerces. Cette mesure irait à l'encontre du principe de liberté de commerce et d'industrie.

Cas particulier - ouverture d'un débit de boissons

Lorsqu'un débit de boissons ouvre sur le territoire d'une commune wallonne, une autorisation doit être obtenue par le débitant. Les conditions d'obtention de cette autorisation diffèrent quelque peu que l'on soit en présence d'un débit de boissons fermentées ou spiritueuses.

Pour rappel, les boissons fermentées sont définies aux articles 4, 8 et 11 de la loi du 7 janvier 1998 concernant la structure et les taux des droits d'accise sur l'alcool et les boissons alcoolisées (M.B. 4.2.1998).

En ce qui concerne les débits de boissons fixes ou ambulants, il est prévu que le futur "débitant" dépose sa demande d'ouverture auprès de la commune. Sur la base de cette demande, la commune vérifiera, pour les débits de boissons fermentées, que le demandeur et les personnes habitant chez lui et pouvant participer à ce débit ne sont pas déchues du droit d'exploiter un débit de boissons par une des exclusions stipulées à l'article 1 des lois coordonnées du 3 avril 1953 (M.B. 4.4.1953). Pour les débits de boissons spiritueuses, la commune vérifiera que le demandeur, le mandataire éventuel du demandeur et, le cas, échéant, les personnes habitant chez le demandeur ou dans l'établissement et qui participent à l'exploitation du débit, ne tombent pas sous le coup d'une des interdictions d'ouverture prévues à l'article 11 de la loi du 28 décembre 1983 sur la patente pour le débit de boissons spiritueuses (M.B. 30.12.1983)

Ensuite, la commune vérifiera si le débit de boissons fixe remplit les exigences en matière d'hygiène prévue aux articles 5 et 6 des dispositions légales concernant les débits de boissons fermentées, coordonnées le 3 avril 1953, ainsi qu'aux articles 4 à 7 de l'arrêté royal du 4 avril 1953 réglant l'exécution des dispositions légales concernant les débits de boissons fermentées.

Remarquons sur ce point que la loi du 25 avril 2007 portant des dispositions diverses (M.B. 8.5.2007) a abrogé ces dispositions concernant les conditions d'hygiène, toutefois, à ce jour, cette abrogation n'est pas encore entrée en vigueur.

Sur la base des contrôles de moralité et d'hygiène, la commune décidera de façon autonome si le "débitant" peut recevoir ou non l'avis positif [1] ou la patente [2]. Cet avis positif prendra la forme que la commune souhaite [3]. Le "débitant" pourra ouvrir son débit de boissons dès réception de l'avis positif ou de la patente émanant de la commune.

Pour ce qui est des débits de boissons occasionnels (maximum 10 fois par an), la commune ne doit plus délivrer d'avis. Rappelons, toutefois, pour les débits de boissons spiritueuses que l'article 9 de la loi du 28 décembre 1983 est toujours d'application. Ainsi, pour les débits de boissons spiritueuses ouverts occasionnellement aux endroits où se déroulent des manifestations publiques telles que des manifestations sportives, politiques ou culturelles une autorisation spéciale du collège communal est requise.

Cas particulier - Heure d'ouverture des débits de boissons

La légalité d'un règlement communal qui imposerait une heure de fermeture obligatoire à tous les débits de boissons situés sur le territoire de la commune est une question qui a déjà été tranchée tant par le Conseil d'Etat que par la Cour de Cassation.

Le Conseil d'Etat estime que l'imposition générale d'une heure de fermeture ordonnée à l'ensemble des cafetiers d'une commune constitue une atteinte disproportionnée à la liberté de commerce et d'industrie [4].

Cette jurisprudence bien établie dénie donc au conseil communal le pouvoir d'adopter un règlement de police aussi général. Le raisonnement que tient le Conseil d'Etat est à peu près le suivant: ce n'est pas parce que un ou deux cafés troublent la tranquillité ou l'ordre public dans la commune que l'ensemble des cafés de l'entité, qui n'ont jamais causé de dérangements ou se trouvent suffisamment à l'écart des habitations pour éviter le tapage nocturne, doivent subir cette mesure de police radicale. Pour le Conseil d'Etat, il est donc disproportionné d'imposer à tous une réaction au comportement de quelques-uns.

Sans remettre en cause sa jurisprudence, le Conseil d'Etat y a toutefois apporté un léger bémol reconnaissant la légalité d'un règlement communal imposant, pour une période déterminée, une heure de fermeture à tous les cafés situés dans un quartier déterminé. Il a ainsi été jugé que "lorsque le règlement attaqué est limité à la fois dans l'espace, c'est-à-dire à un périmètre déterminé au cœur de la ville, et dans le temps, c'est-à-dire pendant seulement deux heures de la nuit et pour un mois seulement, cette mesure ne peut raisonnablement être considérée comme instaurant un régime d'interdiction générale, incompatible avec la liberté de commerce et d'industrie. Ainsi limitée, elle ne paraît pas non plus hors de proportion avec les troubles auxquels elle tend à porter remède" [5].

Si aucun recours auprès du Conseil d'Etat n'a eu lieu dans les 60 jours de la publication de l'ordonnance, seuls des recours devant les cours et tribunaux sont encore envisageables pour ce type de règlement. Or, le juge civil n'a pas, contrairement au Conseil d'Etat, la compétence d'annuler ces textes, mais seulement de les déclarer inapplicables au seul requérant, s'il estime la demande fondée. De plus, la position de la Cour de Cassation [6] étant différente de celle du Conseil d'Etat sur cette question de la proportionnalité (la Cour estime que les communes ont bien le pouvoir de prendre ces mesures générales d'imposition d'une heure de fermeture), les juges de l'ordre judiciaire semblent suivre cette jurisprudence constante de la Haute juridiction, et déboutent le plus souvent les requérants.

Dans les faits donc, si un tel règlement communal n'est pas annulé par le Conseil d'Etat (ou la tutelle) en temps utile, il apparaît, au vu de la jurisprudence judiciaire évoquée plus haut que les exploitants ont peu de chance d'obtenir un jugement civil condamnant ce règlement.

Toutefois, au moment où la commune adopte son règlement, elle ne peut pas être certaine que celui-ci ne fera pas l'objet d'un recours en annulation dans les 60 jours de sa publication.

A noter que le bourgmestre peut, au vu des circonstances préalablement constatées, adopter un arrêté de police de portée individuelle enjoignant à un ou plusieurs exploitants de fermer à une heure déterminée.

En d'autres termes, un arrêté de police ordonnant une fermeture en réaction à une situation problématique spécifique est légal et cela, tant aux yeux de la Cour de Cassation que du Conseil d'Etat.

Dans ce cas, insistons sur la nécessité de motiver dûment l'arrêté en précisant les particularités qui rendent la mesure nécessaire et adaptée pour assurer le maintien de l'ordre public.

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  1. [Remonter] On parle d'avis positif pour les débits de boissons fermentées.
  2. [Remonter] On parle de patente pour les débits de boissons spiritueuses.
  3. [Remonter] Soulignons qu'un modèle d'avis positif est disponible sur le site de l'Union des Villes et Communes de Wallonie (www.uvcw.be)
  4. [Remonter] C.E., n°41.380, 16.12.1992, Sound processing system c/ commune d'Eghezée; C.E., n° 76.387, 13.10.1998, Van Calberg c/ Bourgmestre de Mouscron.
  5. [Remonter] C.E., 18.10.2002, J.L.M.B., 2004/11, p. 460 et ss.
  6. [Remonter] Voir notamment Cass., 18.5.1988, Pas., I, 1988, p. 1139; Cass., 4.3.1998, R.D.P., 1998, p. 804.

Auteur Conseiller(e) / personne de contact
Police administrative : Sylvie Smoos
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Date de mise en ligne
13 Juillet 2010

Auteur
Sylvie Smoos

Type de contenu

Matière(s)

Police administrative
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