Ce document, imprimé le 23-05-2025, provient du site de l'Union des Villes et Communes de Wallonie (www.uvcw.be).
Les textes, illustrations, données, bases de données, logiciels, noms, appellations commerciales et noms de domaines, marques et logos sont protégés par des droits de propriété intellectuelles.
Plus d'informations à l'adresse www.uvcw.be/info/politique-confidentialite
Mis en ligne le 19 Mars 2024

Mobiliser les forces du territoire pour préserver la petite faune des plaines et le gibier c’était l’objectif du projet Agriculture & Biodiversité du Parc naturel Burdinale-Mehaigne. A la veille de la clôture du projet, le Parc naturel propose aux communes un retour sur plusieurs enseignements.   

Contexte : un paysage agricole typique

Le projet Agriculture & Biodiversité est un projet financé par le fonds européen LEADER porté par le GAL (Groupe d’Action Locale) et le Parc naturel, situés sur les Communes de Braives, Burdinne, Héron et Wanze. Démarré en 2017, le projet s’inscrit dans un contexte agricole typique de la Hesbaye. En effet, le territoire est occupé par de la superficie agricole utile (SAU) sur près de 80% et se caractérise par les paysages d’openfield où la grande culture domine.

Ainsi, ce sont de nombreuses cultures de céréales, pommes de terre, betteraves, légumes, lin et bien d’autres qui s’étalent sur des champs à perte de vue. Ces paysages typiques abritent une biodiversité particulière inféodée à la plaine agricole, il s’agit de la petite faune des plaines. Ici, les balades dans les campagnes sont rythmées par le sifflement mélodieux des Alouettes des champs, le survol continu des rapaces ou encore par des lièvres matinaux à la recherche de jeunes pousses.

La petite faune des plaines, fortement menacée

Parmi les habitants de la plaine, certains captent l’attention tant il est devenu difficile de les observer. Il s’agit par exemple du Bruant proyer, de l’Alouette des champs, du Vanneau huppé, de la Perdrix grise, de la Caille des blés, de la Bergeronnette printanière ou encore du Busard Saint-Martin. La petite faune des plaines agricoles est parmi la plus menacée et subit une pression énorme liée à l’intensification des pratiques culturales et l’urbanisation. Depuis les années 70, les effectifs wallons d’Alouettes des champs ont diminué de près de 60%. En à peine 25 ans, la population wallonne de Bruant proyer a quant à elle chuté de 90% ! Le déclin est tel qu’on ne peut plus observer ces derniers que dans quelques plaines agricoles en Wallonie.

Agir avec le projet Agriculture & Biodiversité

Le projet Agriculture & Biodiversité est né dans ce contexte et a eu pour objectifs d’augmenter la capacité d’accueil de la plaine agricole pour la petite faune des plaines et de lutter contre son déclin. Pour y arriver, le projet a mené une intense sensibilisation des agriculteurs mais aussi de nombreux autres acteurs locaux (chasseurs, communes, etc...) pour encourager la prise d’initiative et l’action. Le projet a ainsi permis la rencontre de près de 170 agriculteurs qui cultivaient sur les quatre communes pour leur présenter la problématique et des moyens d’y répondre. Dans un premier temps, il y a eu un démarchage important pour travailler sur des outils de la PAC (Politique Agricole Commune) destinés à la biodiversité comme les mesures agroenvironnementales et climatiques (bandes fleuries et bandes enherbées). Ces mesures sont éprouvées scientifiquement et constituent l’un des outils les plus sûrs pour enrayer le déclin de la biodiversité et avoir de l’impact. Elles peuvent être engagées sur base volontaire par les agriculteurs qui bénéficient de primes pour la consécration d’une partie de leur parcellaire en faveur de la biodiversité. La plantation de haies et de ligneux a aussi été proposée aux agriculteurs. Ces mesures visent à recréer du maillage écologique pour la biodiversité et les oiseaux des plaines. Elles permettent de recréer un habitat favorable et de fournir de la nourriture en suffisance pour les oiseaux granivores et insectivores.

Des freins au changement et des leviers

D’une manière générale, de nombreux agriculteurs ont pris conscience de l’enjeu du déclin des oiseaux des plaines car peu à la base étaient informés sur le sujet. Agir pour la biodiversité n’est pas toujours facile pour les agriculteurs, qui doivent souvent concilier leurs pratiques avec l’environnement, l’économie et la technicité. Les mécanismes de la PAC sont évolutifs et relativement complexes dans l’ensemble. Ils rebutent plus d’un agriculteur à s’aventurer volontairement dans l’engagement de mesures en raison de leur appréhension face au cahier des charges à respecter et au contrôle exercé dans ce cadre par l’administration.

Malgré ces différents freins, le projet a conduit à l’engagement de près de 156 mesures agroenvironnementales sur le territoire, tant en plaine fertile qu’en fond de vallée, avec la participation de plus d’un tier des agriculteurs.

Pour la plantation de ligneux, par contre, la participation ne fut pas la même, surtout en plaine fertile. Les raisons invoquées sont dans ce cas la persistance d’une haie à travers le temps et donc l’inconfort qu’elle peut engendrer si une parcelle est remaniée ou si l’agriculteur n’est pas propriétaire. La question de l’entretien représente aussi une difficulté. Il est à noter que cette tendance évolue positivement actuellement avec le programme YesWePlant qui permet de lever des freins à la plantation et à l’entretien avec pour résultat davantage d’agriculteurs participant maintenant aux plantations par rapport à 2017.

De nouveaux outils intégrés aux pratiques culturales

Pour répondre aux difficultés liées aux outils de la PAC et soulevées par les agriculteurs, le projet a rédigé la brochure ‘’Cultiver et soutenir la biodiversité’’. Cette brochure propose un panel de pratiques favorables aux oiseaux des plaines, flexibles et faciles à mettre en œuvre et qui permettent de conserver des pratiques efficientes d’un point de vue agronomique.

Cette brochure est disponible au format PDF sur le site du Parc naturel Burdinale-Mehaigne. Elle existe aussi en version imprimée et est disponible sur demande.

Ces mesures sont par exemple les plots à Alouettes, des petites surfaces non semées de +-15m² dans les céréales et qui jouent un rôle de piste d’atterrissage pour les Alouettes des champs qui viennent s’y nourrir.

Il y a aussi la multiplication des tas de fumier qui constituent de véritables garde-mangers et aussi des postes de chant pour des oiseaux comme le Bruant proyer. La pratique consiste alors à diviser les tas de fumier pour mieux les répartir sur le territoire et augmenter le nombre de poste de chant. Les couverts hivernaux (par exemple, les moutarde et phacélie pendant l’automne et l’hiver) font aussi l’objet d’adaptations pour les oiseaux des champs, avec des compositions de couverts plus favorables.

 

Enfin, il y a l’utilisation de la barre d’effarouchement lors des travaux de fauche des fourrages et de destruction des couverts hivernaux. Cette barre, attelée à l’avant du tracteur, est constituée de chaines qui produisent des vibrations dans la végétation lors du passage des engins agricoles et fait fuir la faune, ce qui permet de réduire la mortalité des lièvres, faisans, chevreuils, etc.

 

Lever les freins : accompagner et être au contact de tous

L’animation territoriale fut vraiment bénéfique à la mobilisation. Elle a permis de conscientiser sur un enjeu peu connu des agriculteurs tout en les aidant dans la réalisation des démarches administratives. D’une manière générale, le contact avec l’agriculteur compte énormément. Il permet de tisser du lien avec lui, de connaitre ses motivations, ses préoccupations actuelles et ses limites. Le métier d’agriculteur est confronté à des incertitudes à court terme comme la météo, le cours des matières premières ou des engrais. D’autres préoccupations sont plus profondes, comme la transmission de l’exploitation à la famille ou encore la pression sur le foncier, ce qui fait que les agriculteurs peuvent être moins réceptifs à certains moments.

Le maintien d’un contact régulier avec les agriculteurs peut fortement aider à ce que des enjeux communaux (biodiversité, etc.) rencontrent plus d’adhésion, au moment le plus propice. Dans de nombreux cas, un contact régulier peut être établi au sein de la commune par un échevin qui peut être également agriculteur, par une commission communale (CLDR, CCAR, CCATM, etc.) ou tout simplement par des services communaux qui animent la vie rurale locale.

Les Communes qui sont situées dans un Parc naturel, un GAL ou qui accueillent d’autres acteurs du monde rural bénéficient aussi d’une « ligne » précieuse pour le contact. Dans tous les cas, il est très important de construire une « cartographie » des agriculteurs du territoire et de se rendre compte de leur diversité. Lors d’évènements ou de manifestations, ce sont souvent les agriculteurs les plus actifs de la commune qui se mobilisent. Pourtant, il existe une part souvent non-négligeable d’agriculteurs moins visibles mais dont l’importance sur le territoire est conséquente. Il peut s’agir d’agriculteurs retraités ou encore d’enfants d’agriculteurs qui conservent les parcelles agricoles dans la famille tout en exerçant un métier bien différent. Ces agriculteurs peuvent sous-traiter les travaux agricoles à un entrepreneur ou encore confier la gestion de l’exploitation à un gestionnaire. S’ils paraissent moins actifs dans les champs, ces agriculteurs pilotent pourtant bien souvent la conduite de leur exploitation et leur participation est essentielle pour mobiliser l’ensemble du territoire. Pour constituer la cartographie des agriculteurs, entrepreneurs et gestionnaires de la commune, c’est de nouveau le contact et surtout avec les agriculteurs les plus actifs, qui permettra de les identifier et les localiser. Ensuite, un coup de téléphone et une rencontre permettront d’établir les prémices d’une collaboration future.

Que ce soit pour la biodiversité ou d’autres enjeux, le contact humain et la relation gardent une place primordiale pour motiver à travailler ensemble. 

 

Encart : agir avec les bords de route

Les bords de route jouent un rôle important pour la biodiversité. Une étude botanique réalisée dans le cadre du projet a permis de recenser pas moins de 140 espèces de plantes différentes sur les bords de route de la plaine agricole Braives-Burdinne. Ces milieux semi-naturels accueillent une diversité riche et spontanée qui attire les insectes et jouent un rôle de maillage écologique. Ils sont pourtant menacés et dégradés, soit par la dérive des engrais ou des herbicides, par fauche rase (voir arasement) et répétée ou encore par piétinement des engins agricoles ou des automobiles. Une gestion raisonnée par fauche et récolte entre septembre et avril permet aux plantes de fleurir et aussi d’augmenter la diversité spécifique du milieu. Les bords de route sont aussi un lieu potentiel pour la plantation de ligneux. Ainsi, la commune de Burdinne a planté des petits tronçons de 8 mètres de haie de part et d’autre des poteaux électriques de la plaine agricole pour en augmenter son maillage. Avant la plantation, la commune a pris contact avec les agriculteurs pour savoir si les plantations n’entravaient pas le travail des engins agricoles (passage des tracteurs, récoltes des betteraves), ce qui fut bien accueilli par les agriculteurs qui se sentent pris en compte dans la démarche.

 

Auteur:

Hadrien Gaullet

Parc naturel Burdinale-Mehaigne asbl

Chargé de mission GAL "Agriculture et Biodiversité"

hadrien.gaullet@pnbm.be

http://pnbm.be/

 


 

Voir le catalogue complet
Assemblée générale UVCW 2025

Date de mise en ligne
19 Mars 2024

Type de contenu

Matière(s)

Environnement
Activez les notifications

Soyez notifié de toutes les nouveautés dans la matière Environnement