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Mis en ligne le 27 Août 2018

Notre commune s’interroge sur les pouvoirs dont dispose ou qui incombent au Bourgmestre lorsque des faits de grèves se déroulent sur son territoire. Une action est-elle envisageable/obligatoire et pour quels types de perturbations devons-nous ou pouvons-nous envisager des mesures de police administrative ?

Le droit de grève et ses limites

L'article 6 de la Charte sociale européenne et l'article 11 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme disposent que l'exercice du droit de grève ne peut faire l'objet de restrictions ou limitations que si celles-ci sont prescrites par la loi et sont nécessaires, dans une société démocratique, pour garantir le respect des droits et des libertés d'autrui ou pour protéger l'ordre public, la sécurité nationale, la santé publique ou les bonnes mœurs.

De telles mesures ont été prises dans plusieurs pays européens, autre que la Belgique pour assurer un service minimum. La Belgique tend, néanmoins, à l’assurer pour les TEC dans les projets de textes légaux en cours de réflexion pour le moment.

En l’absence de textes, quel pouvoir ont les communes en la matière ?
Les  communes sont garantes de la sécurité, la tranquillité et la salubrité publiques (les trois composantes du terme plus générique qu’est « l’ordre public ») et peuvent à ce titre prendre des mesures contraignantes en toute proportionnalité. Dès lors, pour garantir l’ordre public on pourrait envisager que certaines mesures soient prises réprimant en partie l’exercice d’une grève.

Les communes ne peuvent cependant pas intervenir pour régler des litiges d’ordre privé qui n’intéressent pas la sécurité publique en général. Elles ne peuvent intervenir dans des lieux privés par le biais de mesures de police que lorsque l’ordre public est menacé (par exemple, pour exiger la démolition de bâtiments menaçant ruine ou des travaux de nature à remédier à l’insalubrité) et ne peuvent pas non plus intervenir là où des législations spécifiques existent.

Rappelons également que, quand bien même l’ordre public serait menacé, permettre l’accès aux locaux de travail est une mesure qui fait déjà partie du droit à l’exercice du droit de grève. Cela signifie que le seul recours de l’employeur est le recours à la justice, le cas échéant en référé puisqu’il s’agit d’une application d’un texte légal. Les juges des référés sont seuls compétents pour déterminer l’exercice abusif du droit de grève. Les services de police pourront être requis par les employeurs en cas de troubles et ce de manière autonome, sans qu’il ne soit possible de passer par des mesures émanant des pouvoirs locaux.

La police administrative

Ces éléments impliquent que l’action communale est parfois possible dans un contexte de grève mais encadrée en matière de maintien de l’ordre public par une série d’éléments.

Tout d’abord, les communes ne peuvent qu’intervenir lorsque des répercussions pour l’ordre public en général sont identifiables et dans la stricte mesure de ces répercussions. Le Bourgmestre sera l’autorité compétente. Il dispose en effet de la compétence d’adopter des mesures individuelles en cas de troubles ponctuels sur le territoire de sa commune (on parle « d’arrêtés de police » ou « d’arrêtés du Bourgmestre ») Ainsi, si un lock out engendre des embarras de circulation, le Bourgmestre pourrait demander à ce que les parkings de l’entreprise soient accessibles afin d’éviter les encombrements sur la voie publique donc la sécurité et la commodité de passage. Il peut par exemple limiter les attroupements puisque la Nouvelle loi communale confie aux communes « le soin de réprimer les atteintes à la tranquillité publique, telles que les rixes et disputes accompagnées d'ameutements dans les rues; le tumulte excité dans les lieux d'assemblée publique, les bruits et attroupements nocturnes qui troublent le repos des habitants; ».

Ensuite, il est impératif de se rappeler que l’action du Bourgmestre en tant que protecteur de l’ordre public est encore encadrée par le principe de proportionnalité. On le voit, le Bourgmestre dispose d’un large pouvoir de prescrire la réalisation de mesures pour autant que ces mesures soient en lien avec la préservation de l’ordre public. Cela ne signifie pas que son choix des mesures à exécuter ou à imposer au citoyen n’est pas limité. La proportionnalité est toujours de mise. Ainsi, le Bourgmestre ne peut jamais restreindre un droit ou porter atteinte à des libertés individuelles si ce n’est dans la stricte mesure que requiert le maintien de l’ordre public. Il ne sera donc pas question pour lui d’imposer l’ouverture de locaux d’une entreprise en cas de lock out si des circonstances particulières le rendant indispensable ne le justifient pas. Le Bourgmestre pourrait par exemple obliger les grévistes à laisser entrer des médecins et infirmières sur leur lieu de travail si un danger pour la sécurité ou l’intégrité physique de personnes est en jeux (par exemple, si le seul hôpital de la région est inaccessible suite à un lock out, il pourrait exiger que les urgences soient à tout le moins accessibles pour le personnel et les citoyens).

Conclusion

En matière de grève, il semble donc que la commune ne dispose pas des outils nécessaires pour intervenir et l’empêcher purement et simplement ni même pour garantir le droit au travail. Cela n’entre pas dans les attributions des autorités communales.

Par contre, une mesure de police peut être prise en cas de trouble spécifique rattaché expressément à l’ordre public. Dès lors, un contexte de grève pourrait mener à l’adoption de mesures de police administrative par le Bourgmestre si les actions des grévistes engendrent un danger ou menacent l’ordre public et uniquement dans la stricte mesure de cette menace. La mesure envisagée doit toujours être proportionnée au trouble constaté.

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Date de mise en ligne
27 Août 2018

Type de contenu

Q/R

Matière(s)

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