Forêts publiques : les clés pour une facturation claire et conforme
La gestion et la vente de bois constituent une ressource économique importante pour de nombreuses communes, qu'il s'agisse de bois d'œuvre, bois d’industrie ou de bois de chauffage. Cependant, pour garantir une transparence financière et respecter les obligations légales, il est essentiel de bien structurer le processus de facturation. Cet article propose des conseils pratiques et des points de vigilance pour aider les communes à établir des factures conformes, précises et adaptées à leur activité forestière.
Identifier le type de vente
Tout d’abord, il y a lieu d’identifier s'il s'agit d'une vente publique (vente organisée dans une salle avec publication d’un catalogue) ou d'une vente de gré à gré.
Une vente publique s’organise en deux périodes, vente de printemps et vente d’automne, avec obligation de faire une publicité large des lots mis en vente, au minimum 15 jours à l’avance, conformément à l’article 73 du Code forestier. Une vente de gré à gré se fait, quant à elle, par contrat entre le propriétaire et un acheteur potentiel et peut avoir lieu tout au long de l'année.
Frais de vente
Dans le cadre d'une vente publique, vous devez ajouter 3 % de frais de vente au prix offert par l’acheteur (conformément à l’article 21 du cahier des charges des ventes de bois). Ceux-ci couvrent les coûts administratifs liés à l'organisation de la vente et à la gestion du produit vendu.
Pour les ventes de gré à gré, ces 3 % de frais ne sont pas applicables.
Garantie Dégâts
Le montant de la facture pourra se voir complété d’une garantie dégâts (conformément à l’article 45 du cahier des charges). Cette garantie est conservée jusqu’à la délivrance de la décharge d’exploitation du dernier lot acquis par un acheteur au cours d’une même vente. Elle correspond à une somme de 20 % du montant total (prix principal augmenté des frais et de la TVA) et est plafonnée à 6 000 euros.
Vente publique de bois marchand : prévoir la garantie dégâts uniquement si le client souhaite payer au comptant (paiement total en un seul versement, soit par virement bancaire, soit par chèque bancaire en séance). Si le client paie par étalement, c’est-à-dire un paiement en 4 tranches échelonnées sur 8 mois, la garantie dégâts est incluse dans la dernière tranche de la caution bancaire et est maintenue par la banque jusqu’à libération de cette dernière.
Vente publique de bois de chauffage : la garantie doit être ajoutée dès que le volume total des lots obtenus en vente par un même acheteur dépasse 35 m³.
Vente de gré à gré : ce type de vente prévoit de retenir une garantie dégâts à partir d’un montant d’achat de 500 euros. Cependant, ce montant minimum à partir duquel une garantie dégâts est réclamée reste à l'appréciation du propriétaire.
TVA
Il est important pour les communes de déterminer correctement le taux de TVA qu’elles doivent appliquer lors des ventes de bois. Reprenons ci-dessous in extenso l’article de M. Mathieu Lambert, Conseiller expert au sein de l’UVCW, paru dans le Mouvement communal n°976 du mois de mars 2023.
« Les villes, communes et CPAS ne sont en principe pas assujettis à la TVA, sauf en cas de distorsion de concurrence d’une certaine importance ou d’exercice d’un certain nombre d’activités limitativement énumérées.
Pratiquement, l’importance de la distorsion de concurrence menant en principe à l’assujettissement à la TVA s’évalue au regard du seuil de franchise, fixé à 25 000 euros de chiffre d’affaires annuel pour l’activité concernée. Il en va ainsi de la vente de bois issu de l’exploitation forestière, par les pouvoirs locaux.
Le régime agricole
L’article 57 du Code de la TVA (CTVA) instaure néanmoins un régime particulier de TVA pour les exploitants agricoles. Et la sylviculture relève de celui-ci, conformément à l’article 1er, 4°, de l’arrêté royal n° 22 du 29 décembre 1992 relatif au régime particulier applicable aux exploitants agricoles en matière de taxe sur la valeur ajoutée (AR n° 22), notamment quand l’activité consiste en la livraison, en l'état ou après leur avoir fait subir une transformation primaire qui relève normalement des exploitations sylvicoles, des biens produits par l’exploitant (AR n° 22, art. 2, par. 1er, 1°).
S’agissant d’un régime de TVA simplifié, les pouvoirs locaux exploitants sylvicoles qui effectuent des livraisons de produits de leur exploitation ne sont pas tenus, en ce qui concerne l'exercice de cette activité, aux obligations en matière, notamment, de déclaration et de paiement de la TVA qui incombent normalement aux assujettis (à l'exception néanmoins des obligations résultant des opérations intracommunautaires qu'ils réalisent) (CTVA, art. 57, par. 1er).
Mais au contraire du régime d’assujettissement ordinaire, conduisant l’opérateur économique à déduire la TVA due en amont sur les biens et services nécessaires à l’exercice de ses activités, la TVA qui a grevé les éléments constitutifs du prix des livraisons effectuées par l'exploitant sylvicole lui est remboursée par des compensations forfaitaires (CTVA, art. 57, par. 2) versées par l'acheteur, lorsque celui-ci est un assujetti (en l’occurrence un professionnel de la filière du bois). Ce pourcentage de compensation est fixé forfaitairement à 2 % de la base d'imposition en ce qui concerne les livraisons de bois (AR n° 22, art. 3), excluant ainsi toute autre forme de déduction dans le chef de l’exploitant.
L’exercice d’autres activités assujetties
En principe, les exploitants sylvicoles restent soumis à toutes les obligations incombant aux assujettis (et sont alors exclus du régime agricole), lorsqu'ils ont déjà la qualité d'assujetti en raison de l'exercice d'une autre activité (à moins d’être soumis, pour cette autre activité, au régime particulier de la franchise, c’est-à-dire réaliser un chiffre d’affaires n’atteignant pas 25 000 euros).
Dans ce cas, la vente de bois est alors soumise au taux réduit de TVA de 6 %.
Depuis le 1er janvier 2022, l’article 57, par. 6, CTVA, ajoute néanmoins que les exploitants sylvicoles conservent le bénéfice du régime agricole, pour leur activité couverte par ce régime, lorsqu'ils réalisent par ailleurs, de manière accessoire à cette activité, des opérations pour lesquelles ils sont soumis au régime normal, qui répondent aux conditions suivantes :
1° ces opérations sont liées, par leur nature, à leur activité principale d'exploitant agricole, en l’occurrence sylvicole ; sont par exemple visées l'exécution de travaux saisonniers tels que le déneigement des routes pour le compte d'une commune, la vente d'électricité produite via l'exploitation… (AR n° 22, art. 2, par. 2) ;
2° et le chiffre d'affaires HTVA généré par ces opérations ne dépasse pas, au cours de l'année civile en cours, et n'a pas dépassé, au cours de l'année civile qui précède, 30 % du chiffre d'affaires total des activités exercées comme exploitants agricoles ou sylvicoles.
La vente d’eau par les communes distributrices, exploitant leur propre réseau, n’est cependant – et sans doute logiquement – pas considérée comme une opération liée à l’activité agricole ou sylvicole permettant, sans préjudice du seuil de 30 %, de maintenir le bénéfice du régime agricole. Cet important rappel, qui concerne un certain nombre de communes du sud et de l’est de la Wallonie, a été apporté par le Ministre des Finances en réponse à une récente question parlementaire. Cette précision nous a également été confirmée par le SPF Finances, que nous avions interrogé à la demande de plusieurs communes concernées qui ont récemment constaté la fin d’une pratique ou tolérance antérieure (mais pas non plus uniforme, semble-t-il), selon laquelle ces communes appliquaient le régime agricole – et donc bénéficiaient de la compensation de 2 % – sur leurs ventes de bois, tout en appliquant le régime ordinaire à la distribution d’eau.
Désormais donc, ces communes sont priées d’appliquer le régime ordinaire à l’ensemble de leurs opérations assujetties, y compris les ventes de bois (AR n° 22, art. 2, par. 3), ce qui s’avère regrettable pour elles. Car, en effet, dans la toute grande majorité des cas, sinon dans tous, la compensation forfaitaire de 2 % découlant du régime sylvicole s’avérait plus intéressante pour une commune que la déduction de TVA, selon le régime ordinaire, due sur les biens et services nécessaires à l’exercice de cette activité, tant ceux-ci sont limités voire quasi inexistants ». |
Rédaction de la facture
La rédaction de la facture dépendra des modalités de paiement choisies par le client. En effet, pour tout type de vente, l’acheteur a deux possibilités de paiement :
- paiement au comptant (art. 19 du cahier des charges) ;
- paiement par étalement (art. 23 du cahier des charges).
Le prix de vente se verra additionner, le cas échéant, des frais de vente, de la TVA et du montant de la garantie dégâts.
Prenons des exemples pour illustrer ce sujet:
1. Une facture au comptant
Prenons l’exemple d’une facture pour une vente publique de bois marchand pour un lot vendu à 1 000 euros.
Comme c’est une vente publique, les 3% de frais sont appliqués. C’est une commune distributrice d’eau ou une commune ayant choisi ce régime de TVA ; de ce fait la TVA est de 6%. Enfin, c’est une vente en paiement au comptant, la garantie dégâts est facturée directement.
Prix |
1 000,00 € |
Frais (3 %) |
30,00 € |
Sous-total |
1 030,00 € |
TVA (6 %) |
61,80 € |
Sous-total |
1 091,80 € |
Garantie (20% ou max 6.000€) |
218,36 € |
TOTAL |
1 310,16 € |
2. Une facture par étalement
A nouveau, il y a lieu de vérifier s’il faut appliquer les frais de vente. Comme c’est une vente par étalement, il n’y aura pas de garantie dégâts car elle est déjà comprise dans la dernière échéance de la caution bancaire ! L’étalement est programmé en quatre paiements.
Prenons à nouveau un exemple d’une facture datée au 21 janvier 2025 pour une vente publique de bois marchand dans une commune appliquant les 6 % de TVA pour laquelle l’acheteur a choisi l’étalement de son paiement.
Prix |
100 000,00 € |
Frais (3 %) |
3 000,00 € |
Sous-total |
103 000,00 € |
TVA (6 %) |
6 180,00 € |
TOTAL |
109 180,00 € |
Les échéances étant fixées au 1er jour du mois qui suit la date d’expiration du terme de 2, 6 et 8 mois.
Ce type de paiement doit toujours être accompagné d’une caution bancaire qui vous couvre pour les 8 prochains mois. Chaque mensualité sera couverte par la banque pendant 45 jours calendrier. Passé ce délai, vous ne pourrez plus y faire appel. C’est à l’acheteur de vous fournir cette caution bancaire sur base de la facture que vous aurez émise.
Lors de la vente publique, les acheteurs qui souhaitent payer par étalement vous fournissent préalablement à la vente une promesse de caution bancaire. Actuellement, le permis d’exploiter peut être délivré sur cette base. Cependant, une caution bancaire définitive doit vous être fournie dans les 15 jours de l’émission de votre facture.
Suivi des garanties et cautions bancaires
Lorsque votre facture est entièrement payée et que vous recevez du cantonnement la (les) décharge(s) d’exploitation pour le(s) lot(s) lié(s) à votre facture, il est impératif de rembourser la garantie dégâts de 20 % dans le cas d’un paiement au comptant ou de libérer la caution bancaire en cas de paiement par étalement. Dans ce dernier cas, il faut envoyer un courrier recommandé à la banque concernée en précisant qu’elle peut libérer définitivement la caution. Les acheteurs ont des frais tant qu’une caution bancaire est active ; il est donc important d’assurer un suivi continu de toutes les cautions bancaires à votre disposition.
Pour plus d’informations sur les ventes de bois :
Cellule Environnement de l’UVCW : environnement@uvcw.be
Service Recettes du DNF pour les forêts domaniales : ventedebois@spw.wallonie.be
L'article complet au format PDF
Notices inforum

Quelles sont les règles de TVA applicables à la vente de bois par les pouvoirs locaux ? Quelle est l'incidence de l'exercice par ceux-ci d'autres activités assujetties, en particulier la distribution d'eau ?

Forêts publiques: les clés pour une facturation claire et conforme
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