Avant-projet de décret - loi sur la conservation de la nature: l’avis de l’UVCW
A la demande de Céline Tellier, Ministre de l’Environnement, de la Nature, de la Forêt, de la Ruralité et du Bien-être animal, l’Union des Villes et Communes de Wallonie a pris connaissance de l’avant-projet de décret modifiant la loi du 12 juillet 1973 sur la conservation de la nature.
L’UVCW est ainsi pleinement consciente du caractère urgent et impératif de la nécessité d’enrayer le déclin de la biodiversité pour tendre, au contraire, vers son amélioration. L’UVCW partage également le constat que le cadre légal n’est plus adapté aux enjeux actuels et qu’il doit évoluer. Toutefois, l’UVCW estime que la voie contraignante doit absolument être accompagnée d’une politique d’incitation et de projets publics ambitieux, dont la teneur ou l’ampleur n’est pas appréhendable à ce stade, que ce soit dans le cadre du présent projet ou de la stratégie biodiversité.
L’UVCW a également tenu à souligner sa grande difficulté à remettre un avis sur un projet largement articulé autour d’un réseau écologique qui ne lui a pas été communiqué. Le champ d’application d’un grand nombre de mesures phare du projet de texte est donc inconnu au moment d’écrire l’avis et ne permet pas d’en appréhender la portée exacte.
Outre les objectifs énoncés dans l’article 1er du texte en projet, le but de la réforme est également d’assurer une simplification administrative des procédures et de renforcer la sécurité juridique des autorisations. A la lecture des nouvelles dispositions, force est de constater que la rencontre de cet objectif n’est pas si évidente qu’annoncé.
En effet, la création de nouvelles dérogations (habitats naturels), de la nouvelle obligation de motivation ERC résultant du réseau écologique, ainsi que l’extension des cas dans lesquels l’étude appropriée est requise, vont venir complexifier la constitution des dossiers et la prise de décision sur les plans et projets.
L’UVCW demande dès lors que les nouvelles listes à adopter par le Gouvernement (liste des projets soumis à la carte du réseau écologique, liste des projets nécessitant une dérogation, liste des projets soumis à évaluation appropriée) soient réalistes et limitées aux projets ayant un impact significatif ou concernant des espèces particulièrement vulnérables. Il semble, en outre, que la liste des projets dispensés d’évaluation appropriée des incidences est particulièrement importante pour la sécurité juridique et la simplification administrative et l’UVCW demande que son adoption par le Gouvernement soit obligatoire et non facultative.
Pour les plans, l’UVCW estime que l’extension du champ d’application de l’évaluation appropriée est trop importante. Les plans en matière d’urbanisme que sont les schémas de développement communal et les schémas d’orientation local comprendront la plupart du temps des zones impliquant une évaluation appropriée des incidences. Or, ces plans devant respecter les zonages du plan de secteur et donc, notamment, les affectations de la zone agricole, forestière ou naturelle, ils ont rarement un impact sur les éléments protégés par la loi tel qu’une évaluation appropriée soit justifiée. L’UVCW demande dès lors que l’adoption de la liste des plans dispensés d’évaluation appropriée soit obligatoire et non-facultative et rédigée de façon telle que cette évaluation appropriée ne s’impose que lorsqu’elle est proportionnée aux enjeux concernés.
Le champ d’application de certaines obligations reste par ailleurs imprécis. Ainsi, la nécessité de solliciter une dérogation pour atteinte à un habitat naturel, ou la nécessité de réaliser une évaluation appropriée en vertu de l’article 31-2, paragraphe 2,1° sont liées à des notions soumises à interprétation, en l’absence de liste exhaustive des cas qui y sont soumis. En outre, la présence d’espèces protégées qui conditionne l’application de nombreuses obligations n’est pas toujours évidente et connue des demandeurs ou de l’autorité compétente. La réforme doit, selon l’UVCW, s’accompagner d’un inventaire le plus précis possible des espèces protégées et de leur localisation, que ce soit à l’intérieur ou en dehors du réseau écologique.
L’UVCW remarque également que le texte en projet implique un accroissement considérable des tâches du DNF (avis sur ERC dans le cadre du réseau écologique, avis sur l’évaluation appropriée, suivi des compensations, lecture et suivi des divers rapportages prévus). Afin de pouvoir assumer ces missions, il est indispensable que le DNF soit renforcé en proportion et ne soit pas contraint de délaisser certaines autres missions. Le DNF doit absolument être en mesure de répondre à toute les demandes d’avis dans la mesure où les autorités compétentes, singulièrement les communes, ne disposent pas des outils pour pouvoir se prononcer sur une évaluation appropriée ou une motivation ERC.
En ce qui concerne les aires protégées, l’UVCW salue la simplification de la typologie des réserves naturelles, mais ne perçoit pas, dans le décret, les éléments d’incitation à la création de ces réserves ou la simplification de la gestion de celles-ci (rapport périodique, participation du public).
Enfin, le régime des compensations paraît aller beaucoup trop loin, que ce soit dans la fixation de ses objectifs, dans l’obligation de rapportage, dans le cautionnement, ou bien encore dans la possibilité de modifier la compensation a posteriori lorsque l’initiale n’a pas fonctionné (et ce même pour des motifs indépendants du demandeur). Le porteur d’un projet doit pouvoir compter sur une certaine stabilité.
Le lecteur trouvera l’intégralité de l’avis du conseil d’administration de l’UVCW en annexe.
L'avis complet du CA de l'UVCW
Lire aussi en Environnement
Formations - Environnement
- Comment mieux anticiper et se préparer aux crises à venir?
- Clés pour comprendre le permis d’environnement
- La formation des agents constatateurs et des fonctionnaires sanctionnateurs en environnement (2)
- Le développement durable
- Clés pour comprendre le décret sols
- La formation des agents constatateurs et des fonctionnaires sanctionnateurs en environnement (1)