Code du Patrimoine: les villes et communes refusent de perdre la main sur l’aménagement de leur centre urbain
Suite à la publication au Moniteur belge de l’arrêté du Gouvernement wallon relatif au Code du Patrimoine, l’entrée en vigueur de cette importante réforme est confirmée pour le 1er juin 2019. L’UVCW a eu l’occasion, dans le cadre de la fonction consultative, de souligner l’intérêt de cette réforme au travers d’avis constructifs. Elle pointe cependant les implications notables que cette réforme pouvait avoir, si elle n’était pas mieux cadrée, sur l’autonomie communale et, plus globalement, le développement (économique) de la Région et de ses acteurs locaux. Elle vient donc d’interpeller René Collin, Ministre de l'Agriculture, de la Nature, de la Forêt, de la Ruralité, du Tourisme et du Patrimoine, à ce propos.
Pour rappel, le CoPat prévoit la mise en place de procédures spécifiques pour les autorisations urbanistiques (permis d’urbanisme ou d’urbanisation) et assimilées (permis intégré ou unique) au sein des zones dites « sensibles » de la carte archéologique. La procédure de droit commun vise à soumettre l’ensemble des projets de construction, de reconstruction et de transformation de bâtiments existants au sein de ces zones à l’avis de l’AWAP, à enquête publique et à l’avis conforme du fonctionnaire délégué. Il en découle que plus aucun permis ne pourra être délivré suivant la procédure de 30 ou 75 jours. La procédure de 115 jours sera, par principe, la norme dans ces zones « sensibles ».
Dans le cadre de ses avis, l’Union des Villes et Communes de Wallonie avait proposé diverses modifications au niveau du décret et de l’arrêté afin d’assurer un meilleur équilibre entre protection du patrimoine et gestion urbanistique. A défaut d’avoir été entendus, elle avait ensuite proposé une solution alternative qui visait à circonscrire expressément la définition des « zones sensibles » inscrites au sein de la carte archéologique. Elle avait, dans ce cadre, demandé d’être associés ou, au moins, informés de l‘évolution de cette cartographie, mais jusqu’à présent, sans succès.
Depuis quelques jours, des informations contradictoires parviennent à ce sujet. Sans avoir pu les vérifier officiellement, il semblerait qu’outre l’ensemble des centres anciens protégés – soit la toute grande majorité des centres urbains en Wallonie – une partie conséquente des territoires communaux seraient également concernés au travers de la notion de « biens archéologiques ». Si ces informations venaient à être confirmées, leurs conséquences seraient intolérables et inadmissibles pour les villes et communes qui se verraient dépouillées purement et simplement de leur compétence au profit des instances régionales. Si certes, l’avis conforme du fonctionnaire délégué était déjà présent dans le Cwatupe, il faut noter qu’il n’a jamais été mis en œuvre. A défaut d’un accès (aisé) à la carte archéologique, aucune procédure n’y faisait référence et n’avait été adaptée en conséquence. Le CoDT, de par la publication large de la carte, va profondément modifier cette pratique.
Plus aucune ville ne pourrait décider seule du développement de son centre urbain et, plus largement, de son territoire sans le double aval de la Région. Soulignons que l’avis du fonctionnaire délégué est conforme pour tous les projets localisés en zones sensibles (démolition, abattage d’arbres, pose de fenêtres de toit, construction de maison, etc.). L’avis de la CRMSF est par ailleurs requis, en plus de celui de l’AWAP, pour les actes et travaux projetés impliquant une modification de la structure portante d’un bâtiment antérieur au XXe siècle visé à la carte archéologique.
Ces conséquences pratiques de l’adoption du CoPat contredisent frontalement les objectifs du CoDT qui poussent notamment à la responsabilisation des acteurs locaux, à une juste répartition des compétences et à une accélération des procédures. Elles s‘inscrivent par ailleurs en contradiction avec de nombreuses politiques développées et projetées au niveau régional comme la reconstruction de la ville sur la ville, qui découlent, notamment du (projet de) schéma de développement territorial (SDT) ou des perspectives de développement urbain (PDU).
Les options prises au sein du CoPat, qui multiplient par quatre le délai de traitement des demandes de permis, vont nécessairement constituer un frein au développement de ces territoires. Outre ces conséquences sur les politiques communales et régionales, le premier préjudicié par ces options restera sans conteste le citoyen qui, en raison de la localisation de son projet, sera contraint par des lourdeurs administratives injustifiables.
Pour répondre à ces constats, il s’avère indispensable de jouer sur cette dernière variable que constitue la carte archéologique. Si l’adoption est confirmée, deux options semblent envisageables: soit limiter drastiquement l’étendue des zones sensibles (zones bleues), soit créer, au sein de ces zones bleues, des sous-zones, d’une autre couleur, qui seraient celles dites « sensibles ».
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