Le lotissement durable: utopie ou réalité?
Les lotissements, au sens de groupement d’habitations individuelles, font partie du paysage wallon. S’ils jouissent toujours des faveurs du grand public souhaitant bâtir une maison "idéale", leurs effets négatifs sont de plus en plus décriés, tant par les urbanistes que par les environnementalistes. L’ouverture de nouveaux territoires à l’urbanisation par la mise en œuvre des zones d’aménagement communal concerté ainsi que l’élaboration des programmes communaux du logement vont être source de nombreuses questions sur l’habitat au niveau local.
Pour les élus locaux, la production de nouveaux quartiers d’habitat pose la question du modèle de société que l’autorité publique entend favoriser. En effet, l’ouverture d’un lotissement ne consiste pas uniquement à faire changer le statut foncier de quelques parcelles de terrain. En fonction de son importance, le lotissement va opérer des changements durables non seulement sur le paysage, mais va également influencer le fonctionnement social et économique de la communauté locale et des entités avoisinantes.
Les enjeux environnementaux s’invitent dorénavant aux débats: comment concilier nouveaux logements et sauvegarde de l’environnement? Quelles sont les tendances actuelles dans la production de nouveaux quartiers d’habitat? Peut-on proposer des formules alternatives? Quels seront les effets à long terme des choix posés?
Même si d’autres formes d’urbanisation répondent de manière parfois plus adéquate aux enjeux d’un aménagement du territoire de qualité, les lotissements font partie de la panoplie des outils actuels et, en ce sens, méritent que les acteurs de l’aménagement du territoire fassent preuve de créativité pour en améliorer la qualité.
Petite histoire de la production des lotissements
Il y a "lotissement" et lotissement. Si le droit reconnaît sous ce terme une division parcellaire destinée à la construction d’habitations [1], le mot a acquis, au fil du temps, une signification qui inclut toute forme de production du bâti, planifiée ou pas, qui aboutit à la construction de maisons individuelles, généralement similaires. Le terme est connoté de façon positive ou négative selon que le lotissement symbolise un rêve d’accession à la propriété ou des préoccupations d’aménageur.
Plusieurs générations de lotissements, au sens commun du terme, émaillent le territoire. En 1962, suite à de nombreuses déconvenues d’acquéreurs malheureux ou trompés, le législateur a encadré la vente de terrains à bâtir au travers de la loi organique de l’aménagement du territoire. La première fonction du lotissement était ainsi définie: assurer l’acquéreur de la possibilité de construire sur un terrain dans des conditions définies par avance. L’encadrement de l’urbanisation a complété le dispositif. Depuis lors, les préoccupations ont évolué et la réglementation a intégré successivement des notions telles que la garantie de réalisation de l’équipement des terrains, l’information citoyenne au travers des enquêtes publiques et la prise en compte des incidences sur l’environnement pour les plus grosses opérations.
Pourtant, si la réglementation a évolué, la méthode de production des lotissements n’a pour ainsi dire quasiment pas changé, même si la mise en œuvre des lotissements est de plus en plus souvent assurée par des entreprises de construction ou des sociétés spécialisées. On peut estimer que seules les prescriptions urbanistiques ont subi une évolution liée à la volonté des autorités de mieux maîtriser la construction ultérieure. Ce sont donc souvent uniquement des préoccupations liées aux constructions futures qui définissent le lotissement. Il en résulte que, si l’évolution des modes architecturales permet de dater les bâtiments, la conception même des lotissements, au niveau de leurs projets urbanistiques, a fort peu évolué.
Pourtant, les enjeux actuels sont différents de ceux qui prévalaient dans les années soixante et méritent une réflexion approfondie sur le type d’urbanisation qui doit être proposé. La pression foncière sur les zones non urbanisées se fait plus insistante et les problèmes énergétiques et environnementaux ainsi que la mobilité imposent que les projets de lotissement soient étudiés au travers du prisme du développement durable.
Au delà de ces préoccupations indispensables, il est également nécessaire de constater que le principal intéressé, l’habitant, a lui-même fort évolué. Cette évolution se manifeste sous de multiples formes qui doivent être décryptées dans le cadre d’une planification de l’habitat.
Evolution et tendances actuelles de l’habitat
Le lotissement, dans sa forme la plus courante, à savoir la juxtaposition de parcelles accueillant une habitation isolée, reflète de manière symptomatique deux facettes de notre société contemporaine. La première facette concerne le rapport de l’individu au groupe, à la société. Elle est illustrée par Nietzsche qui relève que "les deux traits qui caractérisent les européens modernes semblent contradictoires: l’individualisme et l’exigence de droits égaux". Au niveau des lotissements, cette contradiction se manifeste par le recours quasi systématique aux dérogations dans le cadre des demandes de permis d’urbanisme et à la difficulté d’accepter la diversité ou l’originalité au sein d’un ensemble bâti.
La seconde facette concerne l’économie des ménages qui consacrent une partie importante (et croissante) de leurs revenus au logement. Pour les Belges, la possession d’une habitation représente un objectif financier et patrimonial, favorisé en cela par la politique publique menée depuis l’après-guerre et par les banques qui y puisent une part non négligeable de leurs ressources.
Ces deux facettes continuent à être explorées par des promoteurs qui proposent des "produits" d’habitations qui répondent, anticipent (voire créent) les besoins ou les désirs de certaines catégories d’habitants. La maison est ainsi devenue un produit commercial soumis aux mêmes règles que les objets de consommation.
Une brique dans le ventre
Au niveau des professionnels de l’urbanisme, la promotion de la maison individuelle fait souvent débat en raison des coûts induits par le mode d’urbanisation qu’elle suppose [2] et des modes de vie qu’elle engendre. Hors des cercles spécialisés, le débat porte sur la "beauté" des constructions en omettant toute considération sur les impacts environnementaux de ce type d’urbanisation.
Un autre aspect de la question n’est que rarement envisagé et, pourtant, il porte peut-être en germe la réunion des intérêts contradictoires soulevés par les débats précités: il s’agit de l’inadéquation entre l’offre et la demande du point de vue qualitatif.
Au fil des ans, la maison individuelle augmente son statut de produit commercial exemplatif de la réussite sociale et familiale. Elle est plébiscitée par les salons spécialisés, les nombreux magazines et revues et même, depuis peu, par des émissions de télévision.
Or, comme le relève David Mangin [3], on ne peut que s’étonner de la contradiction fondamentale entre les demandes exprimées par les personnes qui ont, selon l’expression consacrée, une brique dans le ventre, et la réponse offerte par les promoteurs. Les demandes, renforcées en cela par un marketing très présent [4], portent sur la notion d’individualisation ou de personnalisation de la maison, de présence de la nature et de la notion de "village" au sens social du terme.
La volonté de personnaliser son habitat débouche souvent, de manière paradoxale, sur une "customisation" des modèles standards véhiculés par les catalogues et la presse grand public. Le recours obligatoire à un architecte rend le phénomène moins criant chez nous qu’en France où les sociétés de construction ne proposent généralement que des modèles stéréotypés très pauvres en termes de qualité architecturale.
De manière générale, il faut cependant constater que la plupart des lotissements qui devraient, au travers des prescriptions, viser à promouvoir un urbanisme de qualité, sont un échec de ce point de vue. A titre d’exemple, la personnalisation de la maison au travers d’un choix de brique, pourtant encadré du point de vue réglementaire (la fameuse teinte brun-rouge), conduit à une variété de propositions frisant le patchwork qui rend illusoire tout souci de cohérence. En effet, ce sera moins souvent par une création architecturale originale qu’au travers de la couleur de la brique ou des châssis, d’une variation légère de la pente de toit ou de la forme de la boîte aux lettres que s’exprimera la créativité, somme toute relative, des habitants soucieux de se distinguer de leur voisin.
A l’analyse, le choix posé par certains auteurs de projet d’accentuer la précision des critères de construction au travers des prescriptions n’a pas non plus permis l’émergence de lotissements de qualité. On peut même se poser la question de savoir si l’augmentation substantielle au fil des ans, des prescriptions urbanistiques ne produit pas le contraire de l’effet recherché. La plupart des acteurs s’interrogent d’ailleurs sur la manière de promouvoir une urbanisation de qualité en concurrence avec les images véhiculées par la publicité.
La ville à la campagne
La plupart des personnes qui construisent dans un lotissement, croient répondre à leur besoin de nature, à leur recherche d’un coin de verdure, d’un coin de "nature" [5]. La déconvenue peut être au rendez-vous lorsque la magnifique vue sur le paysage est obstruée par de nouvelles constructions, que le calme recherché est pollué par le bruit des tondeuses à gazon et de la circulation automobile ou que la végétation se limite aux haies de thuyas du voisin. Si les coûts écologiques de la construction périurbaine sont bien connus des autorités et que les besoins des habitants [6] ne sont pas réellement satisfaits, n’y a-t-il pas une voie à explorer pour proposer des rapprochements avec la nature? Une étude paysagère préalable [7] serait de grande utilité pour favoriser le maintien ou la mise en valeur des qualités initiales des lieux. Le maintien d’un couvert végétal intéressant pourrait être favorisé par l’interdiction de l’abattage des arbres et haies trop souvent réalisés pour, soi-disant, rendre les terrains à bâtir plus attractifs d’un point de vue commercial. Les pays scandinaves proposent des rapprochements plus importants avec la nature en favorisant le maintien des reliefs, l’approche fine de la topographie et le maintien des biotopes présents sur les sites d’urbanisation. Plutôt que de viser à créer des alignements de type rue, l’implantation des bâtiments y est régulièrement fonction de la présence de la végétation et du relief. De surcroît, la forte présence de la nature (arbres, haies, prairies, ruisseaux, fossés, …) autorise une densification plus importante des habitations comme le démontrent certains éco-quartiers réalisés à l’étranger.
Une nouvelle tendance se fait jour depuis peu. L’augmentation du coût de l’énergie, la promotion du bois dans la construction, les problèmes climatiques, etc. incitent les futurs constructeurs à souhaiter davantage de logements "écologiques". Si ce souci est louable, il va régulièrement de pair avec l’image d’une maison isolée dans un coin de nature préservée … c’est-à-dire tout le contraire d’une utilisation parcimonieuse du sol [8]! Plusieurs lotissements intégrant des objectifs écologiques tant au niveau des maisons qu’au niveau de la situation ou des espaces publics sont en cours de réalisation et peuvent servir d’exemple pour de futurs maîtres de l’ouvrage [9].
Feu l’esprit de clocher
La croyance qu’une sorte d’esprit villageois résulterait de l’urbanisation de type lotissement est encore fort présente aujourd’hui. Pourtant, la maison individuelle isolée au milieu de sa parcelle, au sein d’un environnement mono-fonctionnel, à peine atténué par la présence éventuelle de quelques jeux d’enfants, n’offre pas de support pour la vie sociale telle qu’elle a pu exister au sein des villages anciens. En effet, l’esprit communautaire ne naît pas de la juxtaposition d’individualités mais éclôt dans un contexte de partage rendu nécessaire et possible par l’organisation de la vie quotidienne. La configuration des lieux peut participer à cet objectif. Outre qu’elles sont plus économiques et moins énergivores [10], les constructions accolées ou en rangées permettent la continuité d’un modèle villageois. La création de petits hameaux autour d’espaces publics de qualité peut également favoriser le rapprochement social.
Dans ce contexte, il faut signaler que les projets d’habitat groupé connaissent un regain d’intérêt important. Réunissant plusieurs personnes ou ménages dans des bâtiments proches ou des appartements, les habitats groupés sont sous-tendus par le partage d’un projet (vie communautaire, entraide, activités communes, etc.). Ce type d’habitat risque de connaître un développement important dans le futur sous les effets conjugués de la hausse du coût du foncier et des prix de la construction. De nombreux jeunes ménages sont intéressés par l’aspect sympathique de la formule mais nombreux sont les projets portés par les seniors qui y voient une manière fort intéressante de poursuivre une vie sociale active.
Le terreau de la vie sociale, c’est l’espace public. Les autorités locales doivent encourager la réalisation d’espaces publics de grande qualité. L’Union a d’ailleurs proposé que les plans précis de ces espaces soient adjoints aux demandes de permis de lotir privées de manière à en garantir la qualité [11].
La maison et son milieu
L’analyse de l’évolution des lotissements résidentiels en France [12] montre notamment l’émergence d’une tendance à créer des enclavements de plus en plus fréquents, de manière à favoriser un entre soi [13]. Cet enclavement se manifeste de différentes manières. On peut ainsi constater que de nombreux lotissements ne sont pas reliés aux autres quartiers par des voiries ou des chemins piétons. Dans certains cas, ces liaisons n’ont pas été planifiées, dans d’autres, elles avaient été prévues mais elles n’ont pas été réalisées pour répondre à une demande exprimant le besoin, supposé ou réel, de sécurité.
Une autre forme d’enclavement consiste à créer des clos dont le degré de fermeture peut atteindre un paroxysme à l’instar des "gated communities" américaines, lotissements clôturés et gardés, accessibles seulement aux résidents [14]. Les enquêtes ont démontré que la population de ces clos ne se limite pas à une petite frange de population très riche soucieuse de rester entre soi. Ce sont des enseignants, des fonctionnaires, des professions libérales, voire même des ouvriers spécialisés qui recherchent ce type d’habitat.
L’émergence de cette tendance pose une question fondamentale: comment établir du lien social dans un contexte favorisant l’absence de contact social?
La politique du logement en Région wallonne donne priorité à la mixité sociale … dans le cadre des actions publiques. Dans le cadre des lotissements privés, les autorités peuvent favoriser l’interrelation des quartiers par le biais de la planification urbanistique, notamment au travers du schéma de structure et du rapport urbanistique et environnemental de mise en œuvre des ZACC [15]. Une attention particulière devrait être mise sur la réflexion en matière de développement des réseaux de voirie, de chemins piétons et cyclistes.
D’autres outils peuvent favoriser la mixité sociale et un équilibre de la pyramide des âges au sein des lotissements. On pense bien entendu à la variation de la taille des parcelles alternant des superficies petites, moyennes et grandes en supposant que cette variété attirera une population se distinguant par les moyens financiers dont elle dispose. Pour atteindre la mixité, il serait toutefois plus efficace de favoriser d’autres types d’habitation que la maison individuelle, réservée malgré tout à certaines catégories socio-économiques. On pourrait, par exemple, favoriser la construction groupée en lui réservant certaines parcelles. La mixité des âges peut également être encouragée en prévoyant des espaces publics à destination du 3e âge et en permettant, sur certaines parcelles, la construction de logements adaptés aux personnes à mobilité réduite dont l’emprise au sol est généralement plus importante que pour une maison à étage. En matière de mixité fonctionnelle, propice également aux échanges, la possibilité d’exercer certaines professions, voire de tenir certains commerces pourrait être envisagée. Il faut pour cela les autoriser dans le lotissement, voire les encourager sur certaines parcelles stratégiques et organiser leur accessibilité, notamment grâce aux liaisons avec les autres quartiers.
Le développement durable en question
Les lotissements d’hier et d’aujourd’hui seront-ils les friches - résidentielles - de demain? Cette question pourrait prêter à sourire lorsqu’on connaît la pression immobilière actuelle qui se manifeste par des hausses régulières et constantes du prix des maisons depuis plusieurs années [16]. Pourtant, l’abandon de quartiers d’habitations relativement récents n’est cependant pas un scénario à négliger [17].
En effet, l’évolution actuelle de plusieurs facteurs risque d’avoir une incidence importante sur l’attractivité de certains lotissements.
Parmi ces facteurs, la hausse du coût de l’énergie est certainement la plus évidente. Comme la plupart des maisons construites après-guerre et jusqu’à ce jour sont peu, pas ou médiocrement isolées, l’évolution du marché de l’énergie va avoir comme conséquence directe de rendre l’amélioration de l’isolation de ces bâtiments indispensable [18]. Malheureusement, les architectes et les entrepreneurs savent que suivant le type de construction auquel on a affaire, le coût des travaux peut s’avérer fort important. Si l’isolation de toiture ne pose généralement pas de difficulté, il n’en va pas de même pour l’isolation des murs qui impose des travaux coûteux et qui affecte souvent l’esthétique du bâtiment. Or des milliers de logements n’ont pu être créés que grâce à l’utilisation de techniques de construction relativement bon marché et donc généralement difficile à améliorer à faible coût. Quel sera l’impact du coût de ces travaux sur le marché immobilier? Vraisemblablement, dans de nombreux cas, les acheteurs renonceront à ajouter le coût des travaux nécessaires au prix d’achat de la maison, entraînant un désintérêt pour les maisons "récentes" mais mal conçues [19].
Par ailleurs, la problématique énergétique risque surtout d’imposer d’autres modes de déplacement. De nombreux lotissements sont éloignés des centres urbains ou villageois et sont généralement démunis de tous services et commerces de proximité. C’est par les problèmes de mobilité que certains lotissements risquent de périr sous la pression combinée du retour en ville orchestré, à juste titre, par les autorités publiques et de l’augmentation du coût financier et en temps des déplacements.
L’économie des lotissements
Les lotissements répondent à la logique économique de l’après-guerre qui vit émerger l’individu, le consommateur, et s’affaiblir le poids de la communauté, de la collectivité. La croissance économique des cinquante dernières années a permis à ce modèle d’urbanisation de naître et de progresser. Cependant, si la croissance économique a permis l’émergence et le maintien d’une urbanisation relativement étalée, les aspects financiers des impacts environnementaux n’ont pas été anticipés.
Au niveau collectif, l’impact financier de la politique des lotissements est important. Hormis les coûts de la désurbanisation [20] qui ont fait l’objet d’études approfondies, les aspects financiers incluant les coûts à charge de la collectivité et le retour économique que ces logements génèrent, n’ont pas suscité beaucoup de publications en raison de l’extrême difficulté de disposer de chiffres fiables à grande échelle.
Au niveau local, il serait pourtant fort utile que les autorités puissent s’appuyer sur une étude financière permettant d’anticiper les coûts d’entretien des voiries, de renouvellement des équipements, de sécurité, de nettoyage, etc. pour poser leur décision d’octroi de permis.
A titre d’exemple, qui connaît l’impact de la hausse du coût des hydrocarbures et surtout leur raréfaction sur l’entretien des voiries communales [21] dans un futur proche? Cette simple question montre l’importance de l’enjeu. Il ne s’agit pas ici de contester une quelconque technique de construction mais bien de constater que les procédures de décision actuelles n’intègrent pas de grille d’analyse permettant aux autorités de poser leur décision en anticipant les frais futurs de leur entretien. Pourtant, la collectivité doit assumer ces charges dont le coût va croissant.
Diminuer l’impact environnemental des nouveaux quartiers
L’enjeu de l’urbanisation durable se pose certainement moins en termes de satisfaction des demandes individuelles qu’en termes de création d’espaces d’habitat garantissant une qualité de vie élevée au niveau collectif.
L’amélioration de la qualité de l’air, de l’eau, notamment des eaux de surface, de la préservation de la biodiversité et de la maîtrise de la consommation d’énergie passe par des choix fondamentaux et même radicaux en matière d’urbanisme et d’aménagement du territoire. Ces choix peuvent être l’occasion de proposer des formes d’habitats plus performants que les lotissements traditionnels.
Si la présence importante de végétation améliore la qualité de l’air, c’est surtout au niveau de la mobilité qu’un effort doit être fourni en la matière pour diminuer la production de gaz. La présence de garages à vélos dans ou à proximité des habitations, la création de pistes cyclables peuvent être imposées au travers des prescriptions et réglementations urbanistiques. Lorsque l’importance du quartier le permet, la mise en place de systèmes de déplacement alternatifs comme des voitures partagées ou l’amélioration de la desserte par les transports en commun peuvent faire partie du cahier des charges du lotisseur, en collaboration avec les autorités concernées. Certains lotissements bannissent la voiture des parcelles privées et concentrent les véhicules dans des parkings ou garages collectifs. Les voiries n’étant accessibles aux véhicules que pour le déchargement des courses, on constate, par effet d’entraînement, une diminution de l’utilisation de la voiture pour les petits trajets. Outre l’impact sur l’air, la qualité de vie du lotissement y gagne par la convivialité retrouvée des rues rendues au piéton.
Concernant la qualité de l’eau, nul ne conteste, aujourd’hui, l’importance de l’épuration des eaux usées. Il faut dorénavant s’attaquer à l’imperméabilisation du sol pour garantir le réapprovisionnement des nappes phréatiques et éviter les problèmes d’inondation et de ruissellement des eaux pluviales. Des prescriptions adaptées peuvent permettre une diminution importante des surfaces imperméables, notamment en limitant ou interdisant les surfaces d’accès ou de terrasses imperméables sur les parcelles privées. La percolation peut être améliorée par la présence de fossés destinés à l’écoulement de l’eau pluviale en remplacement des collecteurs traditionnels. L’aménagement de surfaces destinées à accueillir les eaux en cas de pluie abondante peuvent être à l’origine d’espaces publics intéressants tout en limitant les coûts d’investissement qui auraient été nécessaires à la construction d’un bassin d’orage.
Le travail sur les espaces verts collectifs et sur les jardins privés peut amener à préserver une biodiversité préexistante sur le site et à favoriser la vie des espèces végétales et de la faune. La présence de végétation indigène, prônée depuis longtemps par les autorités, devrait s’accompagner par des plans de plantation qui mettent en place des corridors de haies, d’arbres et d’arbustes permettant la mise en place d’un maillage écologique favorable à la migration de la faune. Certaines administrations communales fournissent déjà des informations aux futurs propriétaires sur la plantation des haies ou des arbres. L’intégration des orientations du PCEDN [22] dans la planification des lotissements est également une piste à ne pas négliger.
Pour préserver le patrimoine végétal existant sur un terrain, une information des lotisseurs et des auteurs de projet est indispensable. Dans les parcelles privées, il pourrait être intéressant d’exiger le maintien des arbres et des haies jusqu’au moment de la réalisation de la construction.
Vers de nouveaux modes d’habitat
Depuis maintenant près de quinze ans, de nombreux projets de nouveaux quartiers d’habitat à travers l’Europe se basent sur des stratégies de développement durable [23]. Des méthodes de travail intégrant la participation citoyenne, les problématiques énergétiques et de mobilité, la préservation de la nature etc. ont été mises au point pour permettre aux autorités publiques et aux auteurs de projet de développer de nouvelles solutions d’habitat appelées à répondre aux défis tant environnementaux qu’économiques ou sociaux posés par l’évolution de la société.
Au travers de ses formations, notamment les séminaires techniques d’urbanisme, et de ses publications, l’Union des Villes et Communes de Wallonie entend diffuser ces bonnes pratiques en souhaitant que l’ensemble des acteurs de l’aménagement du territoire puisse travailler de concert à créer un environnement agréable, harmonieux et durable pour que les générations futures puissent en bénéficier.
Pour favoriser la réalisation de lotissements durables, un travail constant de diffusion d’information, de sensibilisation des lotisseurs, des maîtres de l’ouvrage et des auteurs de projet est nécessaire car "mettre en oeuvre une réglementation de qualité des lotissements est une chose, concevoir des lotissements de qualité en est une autre [24]".Cette tâche pédagogique, les communes l’assurent en première ligne, au bénéfice de l’environnement et de tous les citoyens.
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- [Remonter] Cwatup, at. 89 et ss.
- [Remonter] V. e.a. les travaux de la Conférence permanente du développement territorial (CPDT) sur les coûts de la désurbanisation: www.cpdt.wallonie.be.
- [Remonter] D. Mangin, La ville franchisée: formes et structures de la ville contemporaine, Ed. de la Villette, Paris, 2004.
- [Remonter] En 2004, on parlait d’un budget d’environ 2.000 euros en publicité par habitation.
- [Remonter] V. e.a. J.-D. Urbain, Paradis verts, désirs de campagne et passions résidentielles, Ed. Payot, Paris, 2002.
- [Remonter] A la différence de leur demande qui exprime, de manière imparfaite, les besoins fondamentaux qu’ils ressentent.
- [Remonter] Telle que proposée par l’UVCW dans sa proposition d’amélioration de la réglementation du permis de lotir - v. M. Smoos, Pistes pour une refonte du permis de lotir, Mouv. comm., 12/2006.
- [Remonter] Cwatup, art. 1.
- [Remonter] V. notamment le projet Elea à Mouscron et le site www.sus-cit.org.
- [Remonter] V. e.a, A. Lébart et A. de Herde, Traité d’architecture et d’urbanisme bioclimatique, Ed. Du Moniteur, Paris, 2005.
- [Remonter] M. Smoos, op. cit.
- [Remonter] La Belgique connaît la même situation.
- [Remonter] D. Mangin, op. cit.
- [Remonter] H. Belmessous, Voyage à travers les forteresses des riches, Le Monde Diplomatique, Paris, 11/2002.
- [Remonter] Cwatup, art. 33. Zones d’aménagement communal concerté.
- [Remonter] P. Janssens, Cinquante années de marché immobilier en Belgique, Stadim, 2005.
- [Remonter] L’Allemagne est déjà confrontée à ce type de problème à grande échelle.
- [Remonter] Comme la directive européenne sur les performances énergétiques de bâtiments l’impose.
- [Remonter] A terme, la certification énergétique des bâtiments permettra de comparer le coût de l’énergie nécessaire au fonctionnement des habitations entre ce qui influencera certainement le marché secondaire (vente d’habitations).
- [Remonter] V. e.a. les travaux de la CPDT cités supra et M. Suavez, Les coûts cachés de l’étalement urbain, Etudes foncières, n° 95, Paris, 1-2/2002.
- [Remonter] Indépendamment du coût lié à la consommation de carburant des véhicules de chantier, il s’agit d’évaluer l’impact de la présence d’hydrocarbonés dérivés du pétrole dans les revêtements routiers.
- [Remonter] Plan communal d’environnement et de développement de la nature
- [Remonter] V. notamment, Collectif, Quartiers durables; guide d’expériences européennes, ARENE, Paris, 2005.
- [Remonter] Actes du Colloque sur le lotissement comme outil qualitatif du développement des villages, Fondation Rurale de Wallonie, 2003.
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