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Mis en ligne le 1er Juillet 2022

1. Objet de la présente fiche

Déterminer l’incidence de la fusion de communes sur le lancement, l’attribution et l’exécution des marchés publics et concessions des entités fusionnées ; pour ce faire, connaître tous les marchés lancés ou en cours ; établir si la nouvelle entité doit poser certains actes en vue de la reprise des contrats.

2. Organes décisionnels impliqués

  • Conseil et collège des communes fusionnantes
  • Conseil de l’action sociale et bureau permanent des CPAS fusionnants
  • Le cas échéant, le directeur général ou un autre fonctionnaire des communes et CPAS fusionnants en cas de délégation à leur bénéfice des compétences du conseil en matière de marchés publics et concessions
  • Conseil et collège de la nouvelle commune
  • Conseil de l’action sociale et bureau permanent du nouveau CPAS
  • Le cas échéant, le directeur général ou un autre fonctionnaire de la nouvelle commune et du nouveau CPAS en cas de délégation à leur bénéfice des compétences du conseil en matière de marchés publics et concessions

3. Réglementations en cause

  • Code de la démocratie locale et de la décentralisation (CDLD), art. L1154-1
  • CDLD, art. L1155-1
  • CDLD, art. L1222-3 à L1222-9
  • Loi organique des CPAS (L.O. CPAS), art. 135terdecies, par. 3
  • L.O. CPAS, art. 135quaterdecies
  • L.O. CPAS, art. 84 à 84quater

4. Descriptif/enjeu(x)

Il s’agit de connaître l’état de tous les marchés publics et concessions au sein des communes à fusionner et des CPAS concernés pour permettre à la nouvelle commune et au nouveau CPAS de poursuivre les procédures de passation ou d’assurer le suivi de leur exécution, dès fusion.

Il s’agit également pour les communes à fusionner et les CPAS concernés d’anticiper la fusion par une concertation des organes décisionnels concernant la passation et l’exécution des marchés publics et concessions.

5. Développements

 a. Dès la décision de principe, avant l’adoption de la proposition de fusion

Il convient que les communes et CPAS à fusionner aient une vision claire de l’ensemble de leurs marchés publics et concessions, afin de permettre la reprise de ces derniers, après fusion, par la nouvelle entité (poursuite de la procédure de passation, attribution ou conclusion ou renonciation, suivi de l’exécution, etc.).

Pour ce faire, l’article L1155-1, alinéa 2, du CDLD prévoit qu’« un inventaire des biens meubles, immeubles, des marchés publics, des concessions et conventions des communes fusionnées est joint à la proposition de fusion. Le Gouvernement établit un modèle d’inventaire ».

L’article 135quaterdecies, alinéa 2, de la loi organique des CPAS prévoit la même obligation de dresser un inventaire concernant les marchés et concessions des CPAS.

Les communes et CPAS à fusionner devront donc, préalablement à l’adoption de la proposition de fusion, dresser l’inventaire de leurs marchés et concessions, selon le modèle établi par le Gouvernement. Les communes et CPAS à fusionner veilleront à inventorier tous les marchés et concessions, en cours de passation ou en cours d’exécution, et ce dès l’instant où existe au moins une décision approuvant le choix de la procédure et les conditions du marché ou de la concession. Nous conseillons aux communes et CPAS de veiller à ce que l’inventaire reprenne également les marchés et concessions pour lesquels des consultations préalables ont été menées, bien qu’aucune décision relative aux choix de la procédure et des conditions du marché ou de la concession ne soit encore intervenue. En effet, ces consultations préalables sont susceptibles d’entraîner certaines obligations dans le chef du pouvoir adjudicateur, conformément à l’article 52 de la loi du 17 juin 2016 relative aux marchés publics, et à l’article 40 de la loi du 17 juin 2016 relative aux contrats de concession. En outre, nous conseillons aux communes et CPAS à fusionner de maintenir à jour cet inventaire jusqu’à la date de la fusion, afin de faciliter la reprise des contrats par la nouvelle entité.

Par ailleurs, il nous semble que dès que les communes s’accordent sur le principe d’une fusion, la passation de marchés conjoints pourrait être une option à envisager[1]. L’article 48 de la loi du 17 juin 2016 relative aux marchés publics concerne les marchés conjoints. Cette disposition prévoit que deux ou plusieurs pouvoirs adjudicateurs peuvent convenir de passer conjointement certains marchés spécifiques. Ce mécanisme, mis en œuvre avant la fusion, permettrait de prendre en compte les besoins des communes et CPAS concernés au sein d’un seul et même marché qui sera transmis, à la date de la fusion, à la nouvelle entité, comme nous le verrons ci-après. Cette technique permettrait, dans une certaine mesure, d’éviter à la nouvelle entité de devoir fonctionner avec plusieurs marchés en parallèle, de devoir procéder à des modifications de marchés pour les adapter à ses besoins, voire de devoir résilier ceux-ci.   Les entités concernées pourraient également prévoir des clauses de réexamen dans les documents de leurs marchés et concessions permettant une modification en cours d’exécution ou la résiliation du marché ou de la concession et ses modalités. En outre, la durée des marchés et des concessions pourrait être adaptée au projet de fusion.

b. Pendant la période de concertation obligatoire mais seulement jusqu’à la date de la fusion

L’article L1154-1 du CDLD dispose qu’« à partir de l’introduction de la proposition commune de fusion jusqu’à la date d’approbation par la tutelle du budget de la nouvelle commune ou jusqu’au jour auquel le Gouvernement décide de ne pas donner suite à la proposition de fusion ou auquel le Parlement rejette le projet de décret de fusion, les actes des communes à fusionner ne sont pris qu’après une concertation obligatoire entre ces communes à l’exception des actes qui soit :

  • relèvent de la gestion quotidienne des affaires publiques ;
  • s’ils ne sont pas pris risqueraient de causer un préjudice irréparable à la collectivité;
  • constituent l’aboutissement normal des procédures entamées avant la notification par les conseils communaux de l’intention conjointe de procéder à une fusion au Gouvernement conformément à l’article L1153-1.

En cas de dissentiment entre les organes de concertation ou entre les organes communaux, le différend est tranché par l’autorité de tutelle définie au Titre Ier du Livre Ier de la troisième partie du présent Code ».

L’article 135terdecies, paragraphe 3, prévoit une règle de concertation similaire entre les CPAS des communes à fusionner. Les développements ci-après sont transposables aux organes des CPAS.

Pendant cette période, les conseils et collèges communaux devront donc en principe se concerter concernant les procédures de marchés publics et concessions.

Ainsi, par exemple, l’on ne doute pas de la pertinence d’une concertation entre communes à fusionner concernant l’opportunité de lancer, par exemple, un marché public de travaux impliquant des investissements non négligeables ou un marché ayant une durée de plusieurs années et engageant le fonctionnement de l’administration à long terme.

Relevons néanmoins que certains actes pourront être dispensés de ladite concertation en vertu de l’article L1154-1 : ceux qui relèvent de la gestion quotidienne des affaires publiques (l’on pense, par exemple, à une commande ponctuelle au sein d’un accord-cadre pour des fournitures de bureau ou la fourniture de papier, par exemple), ainsi que ceux qui, s’ils n’étaient pas pris, risqueraient de causer un préjudice irréparable à la communauté (l’on pense, par exemple, au lancement d’un marché concernant la réparation, en période hivernale, d’une chaudière dans une école ou une maison de repos, etc.), ou encore ceux qui constituent l’aboutissement normal des procédures entamées avant la notification par les conseils communaux de l’intention conjointe de procéder à une fusion au Gouvernement.

Concernant spécifiquement les actes relevant de la gestion quotidienne, cette dernière notion pourrait s’avérer difficile à circonscrire en pratique.

La jurisprudence du Conseil d’Etat relative à la notion de « gestion journalière » pourrait apporter quelques indications à cet égard. En effet, avant sa modification par le décret du 17 décembre 2015[2], l’article L1222-3 du CDLD prévoyait la possibilité pour le conseil communal de déléguer ses compétences au collège notamment pour les marchés relatifs à la gestion journalière de la commune. Dans son arrêt n°230.716 du 1er avril 2015, le Conseil d’Etat a défini les marchés relatifs à la gestion journalière comme des marchés portant sur l'administration « au jour le jour » de la commune, par opposition à des marchés engageant son fonctionnement sur un plus long terme. S’agissant en l’espèce d’un marché relatif aux services juridiques d’un avocat, le Conseil d’Etat a estimé que « la circonstance que les services de l'administration seraient régulièrement confrontés à des problèmes les amenant à consulter les avocats ainsi sélectionnés ne suffit pas à qualifier le marché d'acte de gestion quotidienne. Au contraire, en liant la commune pour plusieurs années avec un cabinet d'avocats déterminé pour chaque lot attribué, le collège a pris une décision susceptible d'influer durant plusieurs années sur la manière dont seront traitées des questions, parfois importantes, qui se posent de manière récurrente à l'administration. Une telle décision engage la gestion à moyen ou long terme de la commune et s'oppose donc par nature à la notion de gestion journalière ».

La gestion « journalière » et la gestion « quotidienne » pourraient toutefois s’avérer être deux notions distinctes et la jurisprudence précitée ayant été rendue dans le cadre de l’application d’une disposition bien spécifique du CDLD, la définition donnée par le Conseil d’Etat peut, à notre estime, uniquement servir d’indice. Il conviendra de mener la réflexion, concrètement, au cas par cas.

Par ailleurs, l’on s’interroge sur ce qu’il convient d’entendre par « l’aboutissement normal des procédures entamées avant la notification par les conseils communaux de l’intention conjointe de procéder à une fusion au Gouvernemen». La décision d’attribution ou de renonciation à l’attribution d’un marché prise par le collège entre-t-elle dans cette catégorie, car elle constituerait l’aboutissement normal de la délibération d’approbation des conditions et du choix de la procédure, prise en amont, du conseil communal ? Qu’en est-il des décisions prises dans le cadre de l’exécution du marché (modifications de marché, réceptions provisoire et définitive, etc.) ? A notre estime, les décisions relatives à la sélection des candidats, à l’attribution du marché ou de la concession ou la renonciation à celle-ci tombent, de toute évidence, dans cette catégorie. Il semble en aller de même de l’approbation ou du refus d’accorder une réception provisoire ou définitive. Concernant la question de l’approbation d’un procès-verbal de manquement et l’application d’une mesure d’office le cas échéant, le risque d’un défaut d’exécution étant inhérent à tout contrat, ces mesures nous semblent également constituer « l’aboutissement normal » de la procédure. Peut-on, en revanche, considérer qu’une modification de marché constitue un « aboutissement de procédure » ? Dans l’affirmative, dans quelle mesure une modification de marché peut-elle être qualifiée d’aboutissement « normal » ? Les hypothèses de modifications de marché en cours d’exécution nous semblent donc demander davantage de prudence.

Enfin, dans le cas où les communes à fusionner appartiennent à des provinces différentes, le projet de décret de fusion présenté par le Gouvernement au Parlement au plus tard le 31 décembre de la deuxième année précédant la date de la fusion indique la province à laquelle la nouvelle commune appartiendra. Aussi, il convient de s’interroger sur le sort des contrats conclus entre, d’une part, la commune ou le CPAS qui quittera le territoire provincial en raison de la fusion et des entités, telles que des intercommunales ou des centrales d’achat, dont les activités seraient limitées au territoire de la province, d’autre part. Dans un tel cas, il conviendra d’être attentif au fait qu’une fois les limites de la province modifiées, les contrats concernés devront probablement être résiliés par ces entités, voire seront rendus caduques si l’appartenance de la commune ou du CPAS à la province faisait partie des conditions contractuelles. Il nous semble que la commune ou le CPAS à fusionner concerné(e) pourrait anticiper cette problématique en prenant contact, dès le projet de fusion déposé, avec les entités concernées.

c. A partir de la date de la fusion

L’article L1155-1 du CDLD règle notamment le sort des marchés publics et concessions : « A la date de la fusion, la nouvelle commune succède aux droits et obligations des communes fusionnées pour ce qui est des biens mobiliers, immobiliers, des marchés publics pour travaux, fournitures et services, des concessions de travaux et de services et des conventions qui lui ont été transférés, y compris aux droits et obligations découlant des procédures judiciaires et administratives en cours et futures.

Un inventaire des biens meubles, immeubles, des marchés publics, des concessions et conventions des communes fusionnées est joint à la proposition de fusion. Le Gouvernement établit le modèle d’inventaire ».

La même disposition est reprise à l’article 135quaterdecies de la loi organique des CPAS. Les développements ci-après sont transposables aux organes des CPAS.

Les marchés et concessions des anciennes communes sont donc cédés à la nouvelle entité. A notre estime, ce transfert a lieu de plein droit, de sorte qu’aucune formalité n’est requise pour que les droits et obligations soient transférés à la nouvelle entité et pour que ce transfert soit rendu opposable aux tiers. Par ailleurs, à défaut de précision en sens contraire à l’article L1155-1 du CDLD, le transfert semble concerner tous les marchés et concessions, en cours de passation ou en cours d’exécution, et ce dès l’instant où existe au moins une décision approuvant le choix de la procédure et les conditions du marché.

Il résulte de ce transfert, par exemple, que les déclarations de créances émises dans le cadre de l’exécution d’un marché ainsi transféré et impayées par la commune fusionnée devront être honorées par la nouvelle entité. Il en résulte également que le collège de la nouvelle commune procèdera à l’attribution d’un marché ou d’une concession lancé(e) par la commune fusionnée, ou renoncera à son attribution en vertu de l’article 85 de la loi du 17 juin 2016 relative aux marchés publics, ou de l’article 56 de la loi du 17 juin 2016 relative aux contrats de concession.

Les éventuelles délégations de compétence consenties par les conseils communaux des entités fusionnées sur la base des articles L1222-3, paragraphes 2 et 3, L1222-6, paragraphes 2 et 3, L1222-7, paragraphes 3 et 4, et L1222-8, paragraphe 2, du CDLD n’ont, naturellement, plus cours tant que le conseil de la nouvelle entité n’a pas lui-même décidé d’approuver de telles délégations. Il en va, bien entendu, de même pour les délégations accordées par le conseil de l’action sociale sur la base des articles 84 et suivants de la loi organique des CPAS.

En pratique, la nouvelle entité pourrait, selon toute vraisemblance, se voir transférer plusieurs marchés ayant le même objet… ou presque. La nouvelle commune sera donc, dans un premier temps du moins, appelée à fonctionner avec ces différents marchés exécutés « en parallèle ». Dans le respect de la règlementation relative aux marchés publics et aux contrats de concession et des éventuelles clauses prévues par les documents du marché ou de la concession, la nouvelle commune pourrait, si nécessaire, procéder à des modifications de marché ou concession en cours d’exécution afin de les adapter à ses besoins (dans les limites des articles 37 à 38/19 de l’A.R. du 14.1.2013 établissant les règles générales d'exécution des marchés publics ; articles 61 et suivants de l’A.R. du 25.6.2017 relatif à la passation et aux règles générales d'exécution des contrats de concession), voire résilier ceux-ci.

Il nous semble important que dès la date de la fusion, les adjudicataires et concessionnaires soient tenus informés du changement intervenu dans le chef du pouvoir adjudicateur.

 


[1] Le cas échéant, une des communes concernées pourrait également envisager de s’ériger centrale d’achat au bénéfice de l’autre commune et d’entités paralocales de ces communes. A la date de la fusion, la nouvelle commune demeurerait centrale au bénéfice des entités restantes.

[2] Décr. 17.12.2015 modif. le CDLD en vue de préciser les règles de compétences en matière de marchés publics communaux et provinciaux, M.B., 5.1.2016, p. 117.


Vade-mecum à destination des pouvoirs locaux pour une fusion volontaire réussie
Cette fiche provient du Vade-mecum à destination des pouvoirs locaux pour une fusion volontaire réussie

Depuis la publication au Moniteur belge du 17 septembre 2019 du décret du 2 mai 2019, modifiant le Code de la démocratie locale et de la décentralisation (CDLD) en vue d’établir le cadre de la fusion volontaire de communes, et du décret du 2 mai 2019, modifiant la loi du 8 juillet 1976 organique des centres publics d’action sociale dans le cadre de la fusion volontaire de communes et relativement à l’installation des conseils de l’action sociale, certaines communes situées sur le territoire de la région de langue française peuvent d’ores et déjà être tentées de sauter le pas, tout en se demandant vers quoi elles vont ainsi s’engager.

C’est pour démystifier ce saut dans l’inconnu et tenter de répondre à une première série de questions que le présent vade-mecum a été élaboré. Il s’agit de mettre en avant les points d’attention pour réussir sa fusion.

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Date de mise en ligne
1er Juillet 2022

Auteur
Elodie Bavay

Type de contenu

Matière(s)

Marchés publics
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