Ce document, imprimé le 28-05-2025, provient du site de l'Union des Villes et Communes de Wallonie (www.uvcw.be).
Les textes, illustrations, données, bases de données, logiciels, noms, appellations commerciales et noms de domaines, marques et logos sont protégés par des droits de propriété intellectuelles.
Plus d'informations à l'adresse www.uvcw.be/info/politique-confidentialite
Mis en ligne le 5 Mai 2025

Les pouvoirs adjudicateurs locaux sont nombreux à recourir à des marchés qui fixent le cadre de futures commandes, tant en travaux, en fournitures qu’en services. Ces marchés sont parfois appelés « accords-cadres », « marchés stock », « marchés à bons de commande »… Ces différentes dénominations correspondent-elles à des figures juridiques différentes ou désignent-elles, en réalité, une seule et même opération ?

A notre estime, il n'existe aucune distinction à opérer entre la notion d'accord-cadre, d’une part, et celle de « marché à bons de commande » ou de « marché stock », d’autre part (ces deux dernières notions ne sont d'ailleurs pas consacrées dans la règlementation relative aux marchés publics, mais sont issues de la pratique développée par les pouvoirs adjudicateurs avant l'introduction de la notion d'accord-cadre en droit belge pour les secteurs classiques).

Le « marché à bons de commande » ou « marché stock » -  entendu au sens d'un marché où le pouvoir adjudicateur se réserve la faculté de passer des commandes à l'adjudicataire au fur et à mesure de ses besoins, et dont tous les termes relatifs aux commandes futures sont fixés de manière contraignante - correspond en tout point à la définition de l'accord-cadre. Intituler le contrat autrement ne suffit pas à le disqualifier.

Cela est d'ailleurs confirmé par les travaux préparatoires de la loi du 15 juin 2006 (qui introduit la notion d'accord-cadre en droit belge pour les secteurs classiques).  Le commentaire de l'article 3, 15° - disposition qui concerne la définition de l'accord-cadre - indique, en effet, que : "l’accord-cadre existe depuis longtemps en Belgique sous diverses dénominations (marchés à commandes, marchés stock, …). Cette notion n’a été introduite officiellement dans la législation et exclusivement pour les secteurs spéciaux par les articles 27 et 41bis de la loi du 24 décembre 1993. Son application est généralisée. L’accord-cadre permet à un pouvoir adjudicateur ou à une entreprise publique de conclure un accord fixant tout ou en partie des termes qui régiront les marchés à passer avec le ou les entrepreneurs, fournisseurs ou prestataires de services au cours de la période couverte par l’accord-cadre, par exemple les termes concernant les prix, les garanties, les délais et conditions de livraison."

Relevons également l'arrêt du Conseil d'Etat, n° 249.203 du 11 décembre 2020, qui juge - concernant un contrat que le pouvoir adjudicateur agissant en centrale avait qualifié de « marché à bons de commande » - que : 

"L’article 2, 35°, de la loi du 17 juin 2016 relative aux marchés publics définit l’accord-cadre comme « l’accord entre un ou plusieurs adjudicateurs et un ou plusieurs opérateurs économiques ayant pour objet d’établir les termes régissant les marchés à passer au cours d’une période donnée, notamment en ce qui concerne les prix et, le cas échéant, les quantités envisagées ». L’accord-cadre se caractérise par le fait qu’au jour de sa conclusion, il n’y pas nécessairement de commandes. Celles-ci sont passées ultérieurement, en fonction de la détermination de l’état des besoins à satisfaire. L’accord-cadre formalise déjà les futurs marchés ou commandes à passer.
(...)
Comme le soutient la requérante, le marché à bons de commande conclu par la partie adverse peut prima facie être qualifié d’accord-cadre, dès lors que l’opération paraît bien entrer dans la définition de ce type de contrat. L’accord-cadre est, en l’espèce, conclu avec un seul opérateur économique par lot et fixe, de manière contraignante, tous les termes relatifs aux commandes futures à passer par les bénéficiaires de la centrale d’achat. Il s’exécutera par l’émission de bons de commande qui préciseront celles des prestations, décrites dans l’accord-cadre, dont l’exécution sera demandée et en détermineront les quantités. C’est donc par le biais d’un accord-cadre conclu par une centrale d’achat que les quatre catégories de pouvoirs adjudicateurs bénéficiaires précitées pourront acquérir les services de « prélèvement et analyse des sols et terres en vue d’établir […] le rapport de qualité des terres à présenter pour validation à l’autorité compétente chargée de la certification du contrôle de qualité et du suivi de la gestion des terres (Walterre) ».

Le fait que les documents du marché ne contiennent aucune mention à ce sujet n’empêche pas de requalifier le marché litigieux en accord-cadre. Cette requalification n’est pas contredite par la circonstance que le marché est à bordereau de prix, s’agissant d’un mode de détermination du prix qui, à l’évidence, peut s'appliquer à ce type de contrat."

Cela est également confirmé en doctrine, notamment en ces termes : "L’article 43, § 4, vise la situation d’un accord-cadre conclu avec un seul adjudicataire. Selon cette disposition : « Lorsqu’un accord-cadre est conclu avec un seul opérateur économique, les marchés fondés sur cet accord-cadre sont attribués dans les limites des conditions fixées dans l’accord-cadre.

Pour l’attribution de ces marchés, les pouvoirs adjudicateurs peuvent consulter par écrit l’opérateur économique partie à l’accord-cadre, en lui demandant de compléter, si besoin est, son offre ».

Dans le premier cas, correspondant à la notion de marché stock ou marché à bons de commande, tous les termes sont fixés de manière contraignante pour les parties à l’accord-cadre. L’exécution de l’accord-cadre se déroulera dès lors conformément aux termes convenus, sans que l’offre initiale de l’adjudicataire ne doive être complétée."

Les auteurs précisent en note de bas de page : "Le marché à bon de commande ou marché stock peut en effet être considéré comme une forme simplifiée d’accord-cadre. Il s’agit en général d’un marché conclu avec un seul opérateur visé à l’article 32, paragraphe 3, de la directive 2004/18/CE. Les pouvoirs adjudicateurs qui recourent à un marché stock (ou marché à bons de commande) devront cocher la case spécifique dans les avis de marché relative à la passation d’un accord-cadre. Dès lors qu’ils entrent dans le cadre de la définition de l’accord-cadre, il n’y a pas de raison de ne pas mentionner cette qualification dans l’avis de marché." (Cabuy, Y., Dereau, G., Dor, V., Duprez, B., Libert, Y., Paiva, I., Thiel, P., Vastmans, M. et Wauthier, S., « 1. - L’accord-cadre » in Le droit des marchés publics en Belgique, 2e édition, Bruxelles, Larcier, 2019, p. 459)

Il s'en déduit, à notre estime, qu'un « marché à bons de commande » ou « marché stock » doit être qualifié d'accord-cadre, et toutes les "commandes" passées sur la base de cet accord-cadre sont des marchés subséquents à l'accord-cadre, ou - pour le dire autrement - des marchés fondés sur l'accord-cadre.

Il s'en déduit également que la jurisprudence européenne relative à la fixation des quantités/valeur maximales s'applique bien aux "marchés à bons de commande" ou aux « marchés stocks ».

 

Auteur Conseiller(e)(s) / personne(s) de contact
Marchés publics : Mathieu Lambert - Marie-Laure Van Rillaer - Elodie Bavay
Formations - Marchés publics
Voir le catalogue complet
Assemblée générale UVCW 2025

Date de mise en ligne
5 Mai 2025

Auteur
Elodie Bavay

Type de contenu

Q/R

Matière(s)

Marchés publics
Activez les notifications

Soyez notifié de toutes les nouveautés dans la matière Marchés publics